Dans le noyau, l’ADN eucaryote s’associe avec les histones (H2A, H2B, H3 et H4) pour former l’unité fondamentale de la chromatine : le nucléosome. L’architecture précise de la chromatine détermine si celle-ci est permissive ou non à la transcription et à d’autres événements qui dépendent de son organisation, tels que la réplication, la réparation de l’ADN ou la recombinaison. Alors que la grande majorité des nucléosomes sont constitués des mêmes histones, une immense diversité de nucléosomes différents découle des modifications post-traductionnelles qui touchent les histones. Celles-ci peuvent être acétylées, méthylées, phosphorylées, ubiquitinylées ou sumoylées. Il est proposé que ces différentes modifications agissent en combinaison pour former un « code histone » [1-3]. Ce code est lu par des protéines non-histones qui se lient aux résidus modifiés des histones, et influencent alors l’organisation de la chromatine, la transcription ou la réplication. Certaines modifications comme l’acétylation ou la phosphorylation sont réversibles et dynamiques, et souvent associées à la régulation inductible de gènes individuels. En revanche, pendant de nombreuses années, la méthylation des histones était considérée comme une marque épigénétique stable et irréversible qui rendait compte du caractère héritable des états ouvert (euchromatine) ou fermé (hétérochromatine) de la chromatine. Cette vision découlait de l’incapacité à mettre en évidence une activité histone déméthylase et des études qui suggéraient que la demi-vie de la méthylation des histones est similaire à celle des histones elles-mêmes [4]. Cependant, le dogme de l’irréversibilité de la méthylation des histones est maintenant remis en question. Des études ont montré que la méthylation pouvait même être extrêmement dynamique. Par exemple, la méthylation de la lysine 9 de l’histone H3 des nucléosomes localisés au niveau de gènes qui répondent à l’inflammation disparaît lors de leur activation, puis est restaurée lors de la répression transcriptionnelle post-induction [5]. Depuis fin 2004, un nouveau pas a été franchi avec la découverte des protéines et des mécanismes directement impliqués dans la déméthylation des histones (Figure 1). Les arginines sont sujettes à une conversion enzymatique qui engendre un acide aminé non conventionnel. La peptidylarginine désiminase 4 humaine (PADI4/PAD4) convertit les arginines monométhylées des histones H3 et H4 en citrulline par déméthylimination [6, 7]. Le fait que PADI4 transforme également les arginines non méthylées en citrullines, qui ne peuvent plus être méthylées, suggère que le rôle de PADI4 serait d’éliminer les histones en tant que substrats des arginine méthyltransférases, et non seulement de déméthyler les histones. LSD1 (lysine-specific demethylase 1) est une amine oxydase nucléaire dépendante de l’adénine flavine dinucléotide (FAD) capable de déméthyler la lysine 4 de l’histone H3 [8]. LSD1 catalyse une réaction oxydative de l’amine via le clivage oxydatif de la liaison α-CH du substrat pour former une imine en réduisant un cofacteur, la flavine. L’imine intermédiaire est ensuite hydrolysée spontanément pour produire du carbinolamine, groupe instable qui se transforme en formaldéhyde, régénérant ainsi une lysine déméthylée. Seules les lysines mono- et di-méthylées sont des substrats de LSD1. En effet, la formation de l’imine intermédiaire nécessite une lysine protonée, et les lysines tri-méthylées ne peuvent donc pas être substrats des amine oxydases. L’activité et la spécificité de déméthylation des lysines 4 de l’histone H3 dépend à la fois des autres modifications post-traductionnelles de l’histone H3, comme son état de phosphorylation en sérine 10 [9] et de la présence de cofacteurs. En effet, quand LSD1 est associé au cofacteur CoREST, LSD1 déméthyle la lysine 4 de l’histone H3 [10] (une marque de l’euchromatine), alors qu’associée avec le récepteur des androgènes, LSD1 déméthyle la lysine 9 de l’histone H3 [11] (une marque de l’hétérochromatine). Ainsi, la protéine LSD1 agit à la fois comme un …
Parties annexes
Références
- 1. Strahl BD, Allis CD. The language of covalent histone modifications. Nature 2000 ; 403 : 41-5.
- 2. Jenuwein T, Allis CD. Translating the histone code. Science 2001 ; 293 : 1074-80.
- 3. Ray-Gallet D, Gérard A, Polo S, Almouzni G. Variations sur le thème du « code histone ». Med Sci (Paris) 2005 ; 21 : 384-9.
- 4. Byvoet P, Shepherd GR, Hardin JM, Noland BJ. The distribution and turnover of labelled methyl groups in histone fractions of cultured mammalian cells. Arch Biochem Biophys 1972 ; 148 : 558-67.
- 5. Saccani S, Natoli G. Dynamic changes in histone H3 Lys 9 methylation occurring at tightly regulated inducible inflammatory genes. Genes Dev 2002 ; 16 : 2219-24.
- 6. Cuthbert GL, Daujat S, Snowden AW, et al. Histone deimination antagonizes arginine methylation. Cell 2004 ; 118 : 545-53.
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- 8. Shi Y, Lan F, Matson C, et al. Histone demethylation mediated by the nuclear amine oxidase homolog LSD1. Cell 2004 ; 119 : 941-53.
- 9. Forneris F, Binda C, Vanoni MA, et al. Human histone demethylase LSD1 reads the histone code. J Biol Chem 2005 ; 280 : 41360-5.
- 10. Shi Y, Matson C, Lan F, et al. Regulation of LSD1 histone demethylase activity by its associated factors. Mol Cell 2005 ; 19 : 857-64.
- 11. Metzger E, Wissmann M, Yin N, et al. LSD1 demethylates repressive histone marks to promote androgen-receptor-dependent transcription. Nature 2005 ; 437 : 436-9.
- 12. Trewick SC, McLaughlin PJ, Allshire RC. Methylation : lost in hydroxylation? EMBO Rep 2005 ; 6 : 315-20.
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- 14. Kubicek S, Jenuwein T. A crack in histone lysine methylation. Cell 2004 ; 119 : 903-6.