Corps de l’article

1. Introduction

1.1 L’éducation à la sexualité en contexte scolaire québécois

Les violences sexuelles envers les enfants constituent une problématique sociale majeure, les études internationales estimant qu’entre 8 % à 31 % des filles et entre 3 % et 17 % des garçons sont victimes avant l’âge de 18 ans (Barth et al., 2013). Leur prévention en milieu scolaire contribuerait à diminuer la prévalence et leurs conséquences sur les enfants. Selon les Orientations gouvernementales en matière d’agression sexuelle, l’agression sexuelle se définit comme «un geste à caractère sexuel, avec ou sans contact physique, commis par un individu sans le consentement de la personne visée, ou dans certains cas, notamment dans celui des enfants, par une manipulation affective ou par du chantage […]» (Ministère de la Santé et des Services sociaux, 2001, p. 22). Cette définition qui prévaut encore au gouvernement du Québec est plus large que les articles du Code criminel se référant à l’agression sexuelle et implique un continuum de manifestations dont le harcèlement sexuel, l’exhibitionnisme, l’exploitation sexuelle, les attouchements sexuels non désirés (Secrétariat à la condition féminine, 2022). D’ailleurs, le concept de violences sexuelles est celui préconisé dans les dernières années et retenu dans la présente étude, pour se distinguer de la définition légale de l’agression sexuelle.

Au Québec, le ministère de l’Éducation (MES) souligne la nécessité de faire de l’éducation à la sexualité auprès des enfants afin de favoriser leur développement dans un contexte sécuritaire ainsi qu’une saine construction identitaire. En ce sens, l’éducation à la sexualité est obligatoire dans le cursus scolaire de tous les élèves depuis 2018 (MES, 2018). Pour ce faire, le MES a établi une liste, au niveau primaire, de contenus obligatoires à aborder dont la thématique des violences sexuelles en première et troisième année du primaire dans le cadre du nouveau programme «Culture et citoyenneté québécoise» qui sera officiellement implanté lors de la rentrée scolaire 2024. Chaque établissement scolaire détermine de quelle façon l’éducation à la sexualité est offerte, soit par l’équipe-école exclusivement ou en collaboration avec des ressources externes. Cependant, on constate que les personnes enseignantes sont souvent déléguées pour la faire, car elles sont présentes dans toutes les classes (Action Canada pour la santé & les droits sexuels, 2020; Descheneaux et al., 2019; Jetté, 2017).

Malgré le fait que le personnel scolaire soit mandaté pour aborder les contenus obligatoires, la thématique des violences sexuelles demeurerait celle avec laquelle il est le moins à l’aise (Fournier-Gallant, 2019; Jetté, 2017; Ordre professionnel des sexologues du Québec [OPSQ], 2020). En effet, il y aurait une lacune importante quant à la préparation avant leur arrivée sur le marché du travail (Duquet, 2006; Fournier-Gallant, 2019; OPSQ, 2020; Young et Durocher, 2010).

Ainsi, bien que des formations soient offertes dans les centres de services scolaires ou les écoles privées (MES, 2018), il semblerait qu’elles soient accessibles exclusivement pour le personnel scolaire embauché, mais non pour les futurs enseignants et enseignantes. Or, il serait pertinent de l’offrir pendant la formation universitaire afin de leur permettre une préparation minimale avant leur arrivée sur le marché du travail. À cet effet, la consultation des descripteurs officiels des programmes de baccalauréat en enseignement des universités québécoises confirme l’absence de cours consacrés à l’éducation à la sexualité, à l’exception d’un cours sur l’éducation à la sexualité dans l’enseignement secondaire à l’UQAM, offert par le département de sexologie (SEX2209). La présente étude vise ainsi à pallier cette absence de formation systématique par la conception et l’évaluation d’un module de formation destiné spécifiquement aux personnes étudiantes en quatrième année de formation du baccalauréat en éducation préscolaire et enseignement primaire (BEPEP).

1.2 Les violences sexuelles chez les enfants

Une récente étude menée au Québec auprès d’un échantillon représentatif d’élèves des écoles secondaires du Québec révèle que 14,9 % des filles et 3,9 % des garçons rapportent avoir été victime d’agression sexuelle au cours de l’enfance (Hébert et al., 2019). Les conséquences et leur intensité varient d’un enfant à l’autre en fonction des caractéristiques de l’enfant et de la violence sexuelle vécue (Collin-Vézina et al., 2013). Les enfants victimes peuvent vivre de la dépression, un syndrome de stress post-traumatique, faire des tentatives de suicide; ils et elles peuvent présenter aussi des troubles de comportements extériorisés, tels que des comportements turbulents et de l’opposition, des difficultés de sommeil, des symptômes de dissociation, des difficultés académiques et ultimement des échecs scolaires (Langevin et Hébert, 2021). Finalement, le fait de vivre de la violence sexuelle dans l’enfance est un facteur de risque associé à l’apparition de problèmes d’adaptation psychologique et sociale qui peut perdurer (Hébert, 2011). Par ailleurs, le personnel enseignant qui côtoie ces enfants âgés de 5 à 17 ans quotidiennement occupe une place privilégiée permettant de détecter et de signaler les maltraitances envers les enfants, comme les violences sexuelles (Bergeron et Hébert, 2011), notamment en raison de l’établissement du lien de confiance.

1.3 La pertinence et les objectifs de l’étude

Dans le cadre de leur stage final, les personnes étudiantes au BEPEP assureront la prise en charge complète d’une classe et pourront ainsi être exposées à des situations telles que le dévoilement d’une situation de violence sexuelle. De plus, l’animation d’activité en éducation à la sexualité pourrait leur être demandée. Cependant, l’absence de formation dans le cadre des programmes du BEPEP, dans les universités du Québec, peut affecter leur préparation pour une telle prise en charge. En ce sens, l’objectif général du projet se décline ainsi: concevoir un module de formation asynchrone sur la thématique des violences sexuelles destiné aux personnes étudiantes du BEPEP et procéder à l’évaluation formative des effets à court terme. À l’aide d’un devis préexpérimental avec une collecte de données mixte, le volet évaluatif vise les deux objectifs spécifiques suivants:

  1. vérifier les effets du module de formation sur les connaissances à propos des violences sexuelles chez les enfants, la motivation à aborder la thématique des violences sexuelles dans le cadre des tâches en éducation à la sexualité et le sentiment d’autoefficacité face au rôle de prévention des violences sexuelles auprès des élèves;

  2. documenter l’appréciation des personnes participantes et la pertinence du module de formation dans le cadre de la formation initiale.

1.4 La description du module de formation asynchrone

Le module de formation intitulé «Parler de violence sexuelle au primaire» (PVSP) vise la communauté étudiante du BEPEP, soit le futur personnel enseignant au primaire, afin de leur offrir les outils nécessaires en vue de leurs tâches en éducation à la sexualité. L’objectif général du module de formation PVSP est de leur permettre d’aborder avec plus d’aisance les concepts en lien avec les violences sexuelles. Trois objectifs spécifiques sont aussi ciblés et constituent chacune des sections.

Le but de la première section est de permettre à l’apprenant de reconnaître l’importance d’aborder la thématique des violences sexuelles auprès des élèves du primaire en identifiant les différentes formes, en reconnaissant la prévalence et les caractéristiques des violences sexuelles subies dans l’enfance. L’objectif de la deuxième section est de planifier des situations d’apprentissages en lien avec la thématique des violences sexuelles en se familiarisant avec le matériel disponible, les contenus à aborder et en repérant les bonnes informations ou partenaires potentiels. Les personnes participantes sont ainsi amenées à reconnaître leur pouvoir d’agir dans la prévention des violences sexuelles. La troisième section a pour objectif de permettre aux personnes participantes de réagir de manière adéquate auprès des enfants victimes ou soupçonnés de violence sexuelle en reconnaissant l’importance du dévoilement ainsi que les attitudes aidantes à adopter en cas de dévoilement. De plus, les indices qui pourraient suggérer qu’un enfant a été victime de violence sexuelle ainsi que les règles et obligations en matière de dénonciation pour rapporter les faits aux autorités concernées sont présentés. Chacune de ces sections se termine par un court jeu-questionnaire portant sur les informations apprises afin de consolider les acquis. Considérant la sensibilité du sujet, et le fait que les personnes dans notre société peuvent être témoins ou victimes de violence sexuelle, des précautions ont été prises telles que la possibilité de mettre sur pause ou de quitter à tout moment ainsi que l’ajout de références vers des ressources pour adultes.

La formation est offerte sur la version gratuite de la plateforme Genial.ly, qui permet de créer du contenu interactif. La durée approximative pour achever le module de formation est de 90 minutes. Le module a été développé dans le cadre d’un projet de maîtrise, par la première autrice. À l’été 2021, le contenu a été révisé par deux personnes expertes, l’une en pédagogie et l’autre en sexologie. En septembre 2021, la formation a été expérimentée par cinq personnes provenant du milieu de l’enseignement afin de procéder à quelques ajustements.

Le développement du module de formation s’appuie sur le modèle «information, motivation et habilités comportementales» (IMHC) de Fisher et ses collègues (2003) qui soutiennent qu’un individu bien informé, motivé et habilité sur le plan comportemental devrait adopter et maintenir les comportements préventifs souhaités. Ce modèle a été sélectionné, car il a servi de base à une gamme d’interventions efficaces en promotion de la santé et plusieurs recherches évaluatives ont démontré son efficacité (Conseil d’information et d’éducation sexuelle du Canada, 2019).

2. Méthodologie

Une évaluation formative des effets a été réalisée avec un protocole préexpérimental et une collecte de données prétest et post-test (Alain et Dessureault, 2009). Ainsi, le devis mixte concomitant imbriqué a permis d’obtenir une plus large perspective en intégrant des données qualitatives aux données quantitatives recueillies (Tougas et Kishchuk, 2021).

2.1 Le déroulement de la démarche évaluative

L’échantillon est composé de personnes étudiantes volontaires inscrites en quatrième année du BEPEP des universités ciblées. Ces personnes devaient être inscrites au régime d’étude à temps plein. Le seul critère d’exclusion était d’étudier à temps partiel puisque dans ce profil se retrouve un certain nombre de personnes qui cumule déjà des expériences professionnelles en enseignement (Fédération des professionnelles et professionnels de l’éducation du Québec, 2022). Les autres expériences professionnelles (ex.: suppléance) ne figuraient pas dans les critères d’exclusion.

Le recrutement s’est effectué durant la session d’automne 2021 dans deux universités québécoises francophones. D’abord, un courriel de sollicitation a été envoyé à six personnes responsables d’un cours d’initiation à la recherche scientifique offert en quatrième année du BEPEP, quatre d’entre elles ont accepté que l’équipe de recherche présente le projet (total de 247 personnes étudiantes rejointes). Lors de ces présentations virtuelles, une affiche informative a été partagée, ce qui comprenait notamment la nature de la contribution demandée ainsi qu’un lien menant directement au formulaire de consentement et au questionnaire en ligne.

Les personnes intéressées ont donc répondu à un premier questionnaire en ligne (prétest) en fournissant une adresse courriel pour être contactées pour la seconde étape. Après un délai de sept jours, ces personnes ont reçu un lien Internet pour accéder au module de formation. Sept jours plus tard, la troisième étape était de remplir le questionnaire post-test en ligne. Dans ce dernier questionnaire, les personnes participantes étaient invitées à inscrire leur adresse courriel si elles désiraient être contactées pour la dernière étape, soit les entrevues (quatre personnes ont manifesté leur intérêt et trois ont réellement participé aux entrevues). Le projet de recherche a obtenu l’approbation du comité d’éthique de la recherche pour les projets étudiants.

L’échantillon initial est composé de 30 personnes étudiantes qui ont minimalement complété le questionnaire prétest. En dépit des deux relances, la moitié de ces personnes participantes n’ont pas confirmé avoir visionné la formation, cette validation étant nécessaire pour recevoir le lien menant vers le questionnaire post-test. L’échantillon final est donc composé de 15 personnes ayant complété toutes les étapes de la démarche évaluative.

2.2 Le profil sociodémographique de l’échantillon

L’échantillon final est constitué de 15 personnes issues de la communauté étudiante inscrites en quatrième année du BEPEP. L’âge moyen se situe à 26,6 ans (ET = 7,54). Les personnes s’identifiant comme femme (80 %) sont plus nombreuses que les personnes s’identifiant comme homme (13,3 %) ou comme non-binaire (6,7 %). Une majorité (60 %) prévoit enseigner dès l’année suivante, à la fin de leur baccalauréat, tandis que d’autres (40 %) souhaitent poursuivre leurs études au deuxième cycle en éducation. En moyenne, les personnes participantes (73,3 %) ont un à six mois d’expérience professionnelle en enseignement, en excluant les stages obligatoires. Finalement, 80 % d’entre elles affirment ne pas avoir abordé la thématique des violences sexuelles dans le cadre de leurs cours au BEPEP et 86,7 % n’ont jamais reçu de formation sur ce sujet dans le cadre de leur travail.

2.3 La collecte des données

La collecte de données s’est effectuée par le biais d’un questionnaire en ligne (prétest et post-test) sur la plateforme institutionnelle LimeSurvey et d’entrevues. Voici le descriptif des différentes sections du questionnaire.

  • Profil sociodémographique. Lors du prétest, une série de questions a permis de recueillir les informations suivantes: l’âge, le genre, les choix professionnels pour l’année suivante, le nombre de mois d’expérience professionnelle en enseignement, le fait d’avoir déjà abordé la thématique des violences sexuelles dans les cours au baccalauréat et les formations reçues sur la thématique des violences sexuelles chez les enfants dans le cadre du travail.

  • Connaissances. Cette section compte dix énoncés concernant la problématique des violences sexuelles chez les enfants, notamment en lien avec la définition, la prévalence, les conséquences, ainsi que la loi entourant le signalement. Les énoncés proviennent d’un questionnaire déjà existant et utilisé dans le cadre d’une analyse des besoins de formation en matière de violence sexuelle (Bergeron et al., 2008). Les questions comportent des réponses dichotomiques vrai ou faux. Les réponses ont été recodées (0 pour une mauvaise réponse et 1 pour une bonne réponse), générant ainsi un score global pouvant se situer entre 0 et 10, un score plus élevé signifiant un niveau plus élevé de connaissances.

  • Motivation (α = ,95). Les items en lien avec la motivation à aborder la thématique des violences sexuelles en éducation à la sexualité sont inspirés de l’instrument québécois «l’échelle de motivation au travail» (Blais et al., 1993). Cette échelle est largement utilisée pour évaluer la motivation au travail, notamment dans deux études récentes sur les effets de l’adoption du télétravail sur la motivation (Aourzag, 2021) ainsi que sur la formation aux adultes (Chen et Aryadoust, 2021). Deux des huit sous-dimensions de l’échelle originale sont utilisées dans la présente étude: la motivation intrinsèque à la connaissance et la motivation intrinsèque à l’accomplissement. La consigne était la suivante:

    Dans le cadre de leur travail, les enseignants et enseignantes jouent un rôle dans l’éducation à la sexualité qui comprend d’aborder la thématique des violences sexuelles. Lorsque vous effectuerez votre dernier stage, l’une de vos tâches pourrait être d’aborder les violences sexuelles avec les élèves. Indiquez dans quelle mesure chacun des énoncés suivants correspond à l’une des raisons pour lesquelles vous réaliseriez cette tâche.

    La section comporte huit items avec une échelle dont la réponse se situe de «Ne corresponds pas du tout» (1) à «Corresponds très fortement» (7). Voici un exemple d’item: «Pour la satisfaction que je vivrai lorsque je serai en train de réussir des tâches difficiles». Un score total variant entre 8 et 56 est possible. Un score plus élevé traduit un plus haut niveau de motivation à aborder la thématique des violences sexuelles en éducation à la sexualité.

  • Sentiment d’autoefficacité (α = ,93). Les items en lien avec le sentiment d’autoefficacité face au rôle de prévention des violences sexuelles auprès des élèves sont adaptés de la recherche évaluative d’une formation dans le domaine de la violence sexuelle (Bergeron, 2012). Cette section compte 15 items dont les réponses varient sur une échelle allant de «Je me sens incapable de pouvoir le faire» (1) à «Je suis certain de pouvoir le faire» (10). Les personnes participantes doivent indiquer à quel point elles se sentent capables d’accomplir actuellement ce qui est décrit dans les énoncés tels que ceux-ci: «Faire preuve d’empathie et de respect pour recevoir le dévoilement d’un ou d’une élève victime de violence sexuelle» et «Signaler un ou une élève à la Direction de la protection de la jeunesse que vous soupçonnez être victime de violence sexuelle». Le score global peut se situer entre 15 et 150. Un score plus élevé réfère à un plus grand sentiment d’autoefficacité face au rôle de prévention des violences sexuelles.

  • Appréciation du module de formation (α = ,93). Cette section sur l’appréciation du module de formation est aussi adaptée de l’étude évaluative de Bergeron (2012). Les 13 énoncés concernent l’appréciation de la plateforme utilisée, le contenu de la formation, les méthodes pédagogiques utilisées, l’utilité de la formation et les connaissances de la formatrice. Les personnes participantes indiquent leur degré d’accord, à l’aide d’une échelle allant de «Pas du tout» (1) à «Complètement» (5). Le score total peut s’étendre entre 13 et 65. Un score plus élevé indique une plus grande appréciation envers le module de formation.

  • Section à court développement. Les personnes étaient invitées à s’exprimer sur ce qu’elles ont appris, le plus aimé, le moins aimé et sur leurs commentaires ou suggestions pour l’amélioration de la formation.

  • Exposition au module de formation. À l’aide d’une échelle allant de «Je n’ai pas été en mesure de regarder la formation» (1) à «Totalement» (10), les personnes participantes devaient autodéclarer leur visionnement de la formation.

Dans une deuxième phase, les entrevues semi-dirigées se sont déroulées en ligne, via la plateforme Zoom. Au total, deux entrevues d’une durée de 60 minutes ont eu lieu, l’une comptait deux personnes participantes et l’autre une personne considérant l’impossibilité de trouver une plage horaire commune (deux femmes et un homme). Cinq thématiques sont abordées lors des entrevues soit: les opinions sur les modalités utilisées, l’appréciation générale du module de formation, les effets perçus à la suite du module de formation, la pertinence du module de formation ainsi que les recommandations en lien avec le module de formation. L’entrevue de groupe a été privilégiée afin de permettre aux personnes de construire leurs opinions à partir des points de vue exprimés par les autres et ainsi les inviter à ajouter des commentaires supplémentaires qui vont au-delà de leurs réponses originales (Patton, 2002).

2.4 Les analyses effectuées

D’abord, les personnes ayant terminé toutes les étapes du projet-pilote (n = 15) ont été comparées aux personnes n’ayant effectué que le prétest (n = 15) sur le plan sociodémographique et des scores obtenus lors du prétest. Aucune différence significative n’a été observée entre les deux groupes pour l’ensemble des variables examinées. Les deux groupes peuvent donc être considérés comme équivalents. Ainsi, les analyses subséquentes ont été effectuées exclusivement avec les 15 personnes composant le groupe expérimental.

Des tests-t pour échantillons appariés ont été réalisés afin de déterminer si la participation au module de formation était associée à des améliorations, entre le prétest et le post-test, sur les connaissances, la motivation et le sentiment d’autoefficacité. De plus, l’indice du d de Cohen a aussi été utilisé afin de mesurer la taille des effets observés. Ainsi un d se situant autour de 0,20 est considéré comme une taille d’effet faible, alors que 0,50 équivaut à un effet moyen puis au-delà de 0,80 cela représente une grande taille d’effet (Cohen, 1988).

Finalement, à partir des données qualitatives recueillies par le biais des questions du questionnaire et des entrevues, l’analyse thématique a permis une relecture des corpus afin d’en extraire un certain nombre de thématiques. Ainsi, des catégories ressortent (effets perçus de la formation, nécessité des formations, contenus aidants, recommandations, etc.), ce qui permet de mettre en lumière des segments de verbatims et de dégager les messages clés (Fortin et Gagnon, 2016).

3. Résultats

L’objectif principal du projet de recherche est de procéder à l’évaluation formative des effets du module de formation PVSP sur les personnes étudiantes du BEPEP, plus spécifiquement sur leur niveau de connaissances à propos des violences sexuelles dans l’enfance, de motivation à aborder la thématique des violences sexuelles en éducation à la sexualité et leur sentiment d’autoefficacité face à leur rôle de prévention des violences sexuelles auprès des élèves. Les effets de la participation seront d’abord présentés puis suivront les résultats obtenus quant à l’appréciation des personnes participantes. Il est à noter que 93,3 % de l’échantillon affirme avoir terminé le module de formation PVSP, cette donnée étant autodéclarée dans le questionnaire.

3.1 Les effets de la participation au module de formation

Le tableau 1 présente les résultats des tests-t entre le prétest et post-test. Les analyses révèlent des différences statistiquement significatives autant pour les connaissances à propos des violences sexuelles envers les enfants, la motivation à aborder la thématique des violences sexuelles en éducation à la sexualité et le sentiment d’autoefficacité face au rôle de prévention des violences sexuelles. En moyenne, les personnes participantes obtiennent des scores plus élevés sur les connaissances au post-test (M = 8,40; ET = 1,12) qu’au prétest (M = 6,46; ET = 1,35). Dans ce cas-ci, les analyses du d de Cohen relèvent une taille d’effet moyenne (D = 0,63). Les personnes participantes rapportent également des scores plus élevés au post-test (M = 37,27; ET = 8,92) qu’au prétest (M = 32,93; ET = 11,32) pour la motivation. Une taille d’effet moyenne est aussi observée pour cette variable avec les analyses du d de Cohen (D = 0,42). Finalement, les personnes participantes rapportent des scores plus élevés au post-test (M = 119,80; ET = 16,61) qu’au prétest (M = 89,20; ET = 24,25) pour le sentiment d’autoefficacité. Pour cette dernière variable, les analyses du d de Cohen relèvent cette fois-ci une grande taille d’effet (D = 1,47).

Tableau 1

Effet de la participation au module de formation sur les variables

Effet de la participation au module de formation sur les variables

Note : le score entre parenthèses correspond à l’étendue des scores possibles.

-> Voir la liste des tableaux

Par le biais d’une question ouverte dans le questionnaire, les personnes participantes ont précisé que le module de formation leur avait permis d’apprendre les contenus suivants: les réactions à privilégier pour recevoir un dévoilement de la part d’un enfant (n = 4), de nouvelles informations à propos des violences sexuelles (n = 3), le signalement auprès de la Direction de la protection de la jeunesse (n = 2), les signes possibles d’un enfant victime (n = 2), les gestes considérés comme de la violence sexuelle (n = 2) et les ressources des complémentaires (n = 2).

De façon complémentaire, les entrevues réalisées auprès de trois personnes ont permis d’apporter des précisions sur les effets perçus du module de formation PVSP. En plus de l’acquisition de nouvelles connaissances, ces personnes participantes indiquent que la formation leur a permis une prise de conscience sur l’importance d’être bien préparées pour réagir en cas de dévoilement de la part d’un ou d’une élève, comme le souligne cette personne: «Moi, ça m’a allumé. Ça m’a dit de garder l’oeil ouvert, faut que je sois prête à recevoir ça [un dévoilement].» Un autre effet perçu du visionnement de la formation, nommé lors des entrevues, est celui de mieux saisir l’importance d’aborder la thématique des violences sexuelles avec les élèves afin de leur signifier l’ouverture et la disponibilité de l’adulte. Ainsi, d’ouvrir le dialogue à ce sujet peut encourager un enfant à dévoiler, comme mentionné par cette personne: «Plus vite l’enfant s’en rend compte, plus vite il est mis devant le fait que ce n’est pas correct qu’il soit traité de cette façon-là, plus vite il peut […] aller parler à quelqu’un.»

3.2 L’appréciation des personnes participantes

Au post-test, le questionnaire a permis de mesurer le degré d’appréciation envers le module de formation. Le score moyen d’appréciation est de 54,86 (ET = 9,68), sur un score maximal de 65, ce qui signifie un degré d’appréciation largement positif. Les quatre énoncés qui obtiennent les scores moyens les plus élevés (score supérieur à 4,5 sur un score maximal de 5) sont: les exemples appropriés, le fait d’apprendre de nouvelles choses, le langage clair utilisé et le fait que la formation a répondu aux besoins et aux attentes des personnes participantes. Par ailleurs, ces dernières recommandent de rendre accessible la formation PVSP aux futures cohortes d’enseignants, ce qui est cohérent avec une moyenne de quatre sur un score possible de cinq. Les réponses fournies aux questions ouvertes dans le questionnaire et les propos recueillis lors des deux entrevues apportent un éclairage complémentaire quant à l’appréciation des personnes ayant bénéficié du module de formation PVSP. Les prochaines lignes explicitent ces aspects, les plus appréciés d’abord, les moins appréciés ensuite.

À la question à propos des aspects les plus appréciés du module de formation, les réponses des personnes participantes sont les suivantes: les exemples concrets avec des mises en situation réalistes et des exemples d’intervention (n = 5), le langage clair et le contenu bien expliqué (n = 3) et la quantité de ressources utiles fournies (n = 3). Aussi, les entrevues ont permis d’identifier que la structure du module de formation est un élément particulièrement apprécié, notamment la structure en trois sections de même que l’organisation identique à l’intérieur de chaque section (objectifs de la section, éléments théoriques et jeux-questionnaires). Les jeux-questionnaires ont permis de favoriser l’intégration du contenu comme le souligne cette participante: «Le fait d’avoir des quiz, ça nous obligeait d’être actif, de nous rappeler ce qu’on venait d’écouter. Donc après ça, c’est plus facile de s’en souvenir à long terme.»

En ce qui concerne les aspects moins appréciés, les personnes participantes ont indiqué une quantité insuffisante d’exemples, d’activités concrètes ou de mises en situation pratiques (n = 4), le niveau d’information perçu comme étant général (n = 4) et le visuel peu attrayant similaire à un PowerPoint (n = 2). Lors des entrevues, les personnes participantes mentionnent le besoin d’avoir des informations plus concrètes en lien avec le savoir-faire: elles soulignent savoir maintenant «quoi faire», mais auraient aimé aussi savoir «comment le faire». En effet, les personnes participantes mentionnent vouloir développer des compétences pour savoir comment construire des situations d’apprentissage, comment animer une discussion ou encore quelles activités prioriser ou encore quelles activités ne pas faire.

3.3 Craintes et recommandation soulevées lors des entrevues

Les entrevues réalisées auprès de trois personnes participantes renseignent sur des craintes ou inconforts ainsi que sur une recommandation consensuelle. D’abord, les personnes participantes expriment des craintes en lien avec leur rôle de prévention, sans être exclusives à la thématique des violences sexuelles. Ces craintes concernent notamment le niveau de développement psychosexuel des élèves qui varie d’une année scolaire à l’autre et qui exige une adaptation pédagogique de la part du personnel scolaire qui se voit souvent changer de niveau d’enseignement, surtout en début de carrière. Une autre crainte concerne le risque que certaines informations apprises en classe soient ramenées à la maison de manière inadéquate par les élèves.

Parler de la thématique des violences sexuelles avec les élèves est perçu tout à la fois comme un sujet sensible et important. Ainsi, une formation est nommée comme une condition préalable pour le faire adéquatement, comme mentionné ici: «C’est tellement important [d’aborder les violences sexuelles] que soit que vous prenez des personnes qui sont vraiment qualifiées pour le faire ou sinon formez-moi correctement. Parce que je ne veux pas mal le faire.» Ce commentaire reflète l’inconfort face au sujet des violences sexuelles et le besoin d’une formation pour cette thématique.

Enfin, les entrevues ont permis d’interroger la pertinence d’une formation comme celle du module PVSP, dans le cadre de la dernière année d’étude au baccalauréat. Les personnes participantes soulignent être satisfaites de bénéficier de la formation PVSP à ce moment-ci de leur formation universitaire, car cela leur a permis d’être informées avant leur arrivée sur le marché du travail. Aussi, cela fait consensus qu’une telle formation devrait être offerte plus tôt durant le baccalauréat afin de permettre une meilleure préparation, et ce, dès le premier stage.

Moi je pense que pour les étudiants du baccalauréat, ça serait vraiment bien, avant même de mettre les pieds dans une école. Parce que ce n’est pas long qu’un enfant peut décider de nous faire confiance, puis ce n’est pas long qu’on peut se retrouver dans les mains avec un enfant qui nous signale un abus.

D’ailleurs, deux des trois personnes interrogées lors des entrevues estiment qu’une telle formation pourrait s’offrir à l’intérieur d’un cours du BEPEP. L’ajout d’un caractère obligatoire d’une telle formation ou le fait de l’insérer dans un cours lui accorderait une place formelle dans la formation universitaire et serait suivi par un plus grand nombre de personnes étudiantes.

4. Discussion

Ce projet-pilote visait à concevoir et évaluer les effets du module de formation Parler de violence sexuelle au primaire (PVSP) destiné aux personnes étudiantes du BEPEP. Les effets à court terme ainsi que l’appréciation de ces dernières ont été évalués. D’abord, la pertinence d’une telle formation est largement confirmée par un premier résultat, soit le fait que 80 % des personnes participantes affirment ne pas avoir abordé la thématique des violences sexuelles dans le cadre de leurs études au BEPEP. De plus, la participation à la formation est associée à une augmentation des connaissances à propos des violences sexuelles dans l’enfance, à une motivation à aborder la thématique des violences sexuelles en éducation à la sexualité et au sentiment d’autoefficacité face au mandat de prévention des violences sexuelles. Les effets perçus par les personnes participantes sont également pertinents. En effet, elles affirment avoir acquis de nouvelles connaissances sur les violences sexuelles chez les enfants, notamment quant aux conséquences possibles.

Il demeure important d’offrir des formations aux futures personnes enseignantes surtout lorsque l’on considère que la thématique des violences sexuelles ressort comme l’une des thématiques avec laquelle elles sont le moins à l’aise dans le cadre de leur tâche en éducation à la sexualité (Jetté, 2017). Le fait d’offrir un tel module de formation en amont du stage final améliore leur préparation avant d’intégrer le marché du travail. De plus, les personnes participantes mentionnent être plus motivées à aborder la thématique des violences sexuelles, ce qui pourra avoir un effet sur leur niveau d’intérêt quant à la mise en place d’activités pédagogiques. Par ailleurs, le sentiment d’autoefficacité est lié au fait d’améliorer le sentiment de compétence du personnel enseignant, cela se révèle donc prometteur pour offrir une éducation à la sexualité efficace (Descheneaux et al., 2019). De plus, le degré de motivation d’un individu à s’engager dans des comportements est influencé par le sentiment d’autoefficacité (Bandura et Lecomte, 2007). Par conséquent, le sentiment d’autoefficacité joue aussi un rôle essentiel dans l’adoption de nouveaux comportements (Bandura et Lecomte, 2007; Bartholomew et al., 2016), soit dans ce cas-ci aborder la thématique des violences sexuelles dans le cadre d’activités pédagogiques en éducation à la sexualité. Ainsi, l’effet observé sur l’autoefficacité pourrait être prometteur quant aux retombées positives qu’il peut y avoir sur les personnes participantes. Il serait intéressant de mesurer si les gains se maintiennent à long terme chez les personnes participantes.

Le format asynchrone du module de formation a aussi été apprécié. L’un des intérêts de ce projet de recherche était de documenter les effets et l’appréciation d’une telle formation offerte en ligne. Ainsi, cela fait écho à l’étude de Scott et ses collègues (2016) qui ont comparé une formation offerte en mode présentiel versus asynchrone en ligne, à l’aide d’un devis quasi expérimental. La formation portait sur la prévention du suicide et s’adressait au personnel d’une école secondaire. Les résultats démontrent que l’acquisition de connaissances était significativement plus élevée chez les personnes ayant participé à la formation en ligne. Par ailleurs, d’autres études évaluatives ont aussi documenté l’efficacité d’activités de formation asynchrone pour d’autres thématiques en éducation, à l’aide d’un devis quasi expérimental (Dumont, 2022; Boudreault et al., 2021).

En somme, ce module de formation a été perçu comme étant prometteur sur le plan d’une préparation efficace quant au rôle du personnel relativement à l’éducation à la sexualité, plus particulièrement en lien avec la thématique des violences sexuelles. Il a pu contribuer également au développement de l’éthique professionnelle permettant de mieux recevoir désormais un dévoilement de la part d’un enfant. Il est possible de situer le module de formation PVSP comme une formation de base portant sur la notion des violences sexuelles envers les enfants qu’il serait possible d’offrir à toute la communauté étudiante. Il serait recommandé de penser à un second module de formation, complémentaire au premier, qui lui permettrait d’aborder les aspects moins couverts selon les personnes participantes, soit des idées d’activité clés en main à réaliser en classe en fonction de l’âge des élèves. Finalement, les propos de plusieurs personnes participantes quant à leurs craintes et leurs inconforts face à leur rôle en éducation à la sexualité appuient l’idée d’insérer de manière systématique une telle formation dans tous les programmes du BEPEP des universités du Québec.

4.1 Les limites

Malgré les effets positifs et prometteurs du module de formation, l’étude évaluative comporte certaines limites. L’une d’elles est liée au devis préexpérimental n’impliquant pas de groupe témoin, qui ne permet pas de conclure avec certitude que les résultats obtenus sont attribuables directement au module de formation lui-même (Fortin et Gagnon, 2016). Cependant, comme il s’agit d’une évaluation de type formative, un devis préexpérimental peut convenir, car un groupe unique permet surtout de mesurer les changements survenus sur la variable dépendante (Fortin et Gagnon, 2016). Ainsi, bien qu’initialement un groupe témoin était prévu dans le protocole, le faible nombre de personnes participantes a nécessité un ajustement. Cela introduit la deuxième limite qui est la petite taille de l’échantillon initial. Les défis du recrutement en période de pandémie sont réels, dans ce cas-ci, la faible taille d’échantillon a pu être causée par un recrutement exclusivement en ligne. Il pourrait être possible également que la thématique de la formation ait fait hésiter certaines personnes pour qui le sujet est plus sensible. Aussi, il aurait été intéressant d’avoir un échantillon plus grand afin d’explorer les associations entre différentes variables (Fortin et Gagnon, 2016), notamment en fonction du genre. À cet effet, un échantillon de plus grande taille permettrait d’avoir une proportion plus représentative des hommes (environ 10 %) et des femmes (environ 90 %) qui enseignent dans les écoles primaires (Ministère de l’Éducation du Québec, 2022).

La troisième limite concerne l’attrition entre les deux temps de mesure. En effet, cela peut avoir un impact sur les changements observés chez les personnes participantes, car les personnes qui n’ont pas achevé l’évaluation auraient pu avoir des motivations différentes (Goulet et al., 2021). Dans ce cas-ci, il n’est pas possible d’estimer la proportion de personnes ayant visionné la formation comme il s’agissait d’un lien disponible à la toute fin du module de formation et que les personnes devaient faire une étape supplémentaire afin d’indiquer qu’elles avaient terminé la formation. Cependant, les analyses comparatives entre l’échantillon initial (n = 30) et l’échantillon final (n = 15) indiquent que les deux groupes sont comparables au niveau du profil sociodémographique et de leurs scores sur les trois variables. Finalement, considérant qu’il s’agit d’un échantillon volontaire, il est aussi possible que les personnes participantes aient eu un intérêt accru envers l’éducation à la sexualité ou la thématique des violences sexuelles (Fortin et Gagnon, 2016). D’autres études seraient nécessaires pour documenter les effets dans un contexte de formation obligatoire, par exemple dans le cadre d’un cours universitaire.

4.2 Les contributions d’un tel module de formation sur les violences sexuelles

Ce projet-pilote vise à mettre en lumière la nécessité et l’ajout d’un tel module formation dans le cadre des études universitaires en enseignement. En effet, cela permet d’offrir une introduction aux personnes étudiantes afin de les préparer adéquatement aux tâches qu’elles auront à faire dans leur classe respective, mais aussi de leur permettre d’avoir accès aux ressources et informations disponibles. Il s’avère d’autant plus pertinent d’offrir une telle formation de manière asynchrone aux personnes étudiantes ayant une charge de travail déjà très dense. En effet, cette méthode d’apprentissage asynchrone est reconnue pour être efficace, peu couteuse et flexible et elle offre la possibilité d’atteindre un large auditoire (Scott et al., 2016). Finalement, le fait de cibler les personnes en quatrième année de formation s’avère être un choix judicieux considérant l’effet observé sur l’augmentation du sentiment d’autoefficacité, car elles seront responsables d’une classe très prochainement. Par ailleurs, le fait que le plus grand nombre possible de futurs membres du corps professoral soit mieux préparé pour assumer la prévention des violences sexuelles est une condition gagnante pour une meilleure prévention auprès des enfants et ainsi assurer un soutien plus adéquat en cas de dévoilement. À cet effet, rappelons que près d’un quart des enfants victimes de violences sexuelles sont âgées de 6 à 11 ans (Baril et Tourigny, 2009), cette tranche d’âge correspond aux élèves qui se trouvent dans les écoles primaires.

4.3 Les recommandations

À la lumière des résultats obtenus, il serait pertinent d’apporter des ajustements en ce qui a trait à l’ajout d’outils et d’activités clés en main afin de déployer une telle formation à travers l’ensemble des programmes du BEPEP. En effet, les personnes participantes auraient souhaité savoir quelles activités faire en classe et comment les faire. Finalement, le fait de rendre une telle formation obligatoire dans le cursus scolaire assurerait un taux de participation plus élevé.

5. Conclusion

Les résultats du projet-pilote indiquent des changements significatifs sur les trois variables mesurées: les connaissances à propos des violences sexuelles chez les enfants, la motivation à aborder la thématique des violences sexuelles et le sentiment d’autoefficacité face au rôle de prévention des violences sexuelles auprès des élèves. De manière générale, les personnes participantes sont satisfaites d’avoir reçu une telle formation et pour une très grande majorité d’entre elles il s’agissait de leur première fois. Ainsi, le développement de formations portant sur la violence sexuelle et destinée spécifiquement aux futurs membres du personnel enseignant est nécessaire. Cependant, comme les formations disponibles actuellement sont offertes aux titulaires de classe uniquement, une telle formation pourrait être donnée en amont dès la formation initiale. L’intérêt de cette formation ne se limite pas au Québec. Par exemple, le programme EVRAS (Éducation à la vie relationnelle, affective et sexuelle) implanté en Belgique de manière obligatoire depuis une dizaine d’années rencontre aussi ses défis pour former les personnes en voie de devenir animateurs et animatrices par le biais des Centres de planning familial (Van Ossel, 2022). La formation développée dans cette étude suggère ainsi que le module de formation PVSP constitue une avenue prometteuse notamment par sa modalité asynchrone et son adaptation pour le milieu scolaire. Au-delà du Québec, une telle formation apparaît nécessaire pour les futures enseignantes et futurs enseignants qui font de l’éducation à la sexualité en milieu scolaire, un lieu considéré comme propice à la prévention des violences sexuelles.