Les comptes rendus

L’économie sociale au Nord et au Sud. Jacques Defourny, Patrick Develtere et Bénédicte Fonteneau (sous la direction de), Paris, De Boeck et Larcier, 1999, 278 p. [Notice]

  • Manon Boulianne

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  • Manon Boulianne
    Chercheure associée à la Chaire de recherche en développement communautaire
    Université du Québec à Hull

Cet ouvrage collectif comporte une série d’articles dont certains abordent l’économie sociale sous un angle plutôt empirique tandis que d’autres s’attardent davantage aux enjeux théoriques et politiques qu’elle soulève. L’approche générale adoptée est interdisciplinaire et internationale. Les contributions sont signées par une vingtaine d’auteurs provenant des milieux universitaires, de la recherche ou de l’intervention et dont la grande majorité sont originaires de pays du Nord et affiliés à des institutions au Nord. En arrière-plan, une préoccupation partagée sur les moyens à mettre en oeuvre pour contribuer à une transformation des rapports sociaux orientée vers le développement de démocraties au sein desquelles s’exprime une citoyenneté active. Une lecture de la réalité qui s’attarde principalement aux dynamiques liant mouvements sociaux, économie mondiale, économie sociale et politiques publiques. Le livre est structuré en quatre parties. Dans la première, Jacques Defourny, du Centre d’économie sociale de l’Université de Liège, et Patrick Develtere, de Solidarité mondiale, situent l’objet d’étude dans une perspective historique et transnationale. La deuxième partie est construite autour d’expériences concrètes. On y décrit et analyse quatre champs de pratiques au sein desquels se sont multipliées et diffusées les initiatives d’économie sociale dans différents pays au cours des 20 ou 30 dernières années. Les deux premiers de ces champs ou « chantiers » concernent les services financiers et la santé. Il s’agit de l’épargne et du crédit solidaire ainsi que du mutualisme. Ils sont abordés par Christian Jacquier, du Programme stratégies et outils contre la pauvreté et l’exclusion sociale et Chris Atim (économie de la santé au Sénégal) à l’aide d’exemples provenant de pays du Sud. Le troisième champ, celui du commerce équitable, se situe au coeur des relations Nord-Sud. Michael Barratt Brown (Twin Trading, Grande-Bretagne) et Sophie Adam du Centre d’économie sociale de l’Université de Liège en font la description. Enfin, le champ de l’emploi dans les pays du Nord est examiné par Danièle Demoustier, de l’Institut d’études politiques de Grenoble, et Enzo Pezzini, de la Confédération des coopératives italiennes. Les exposés contenus dans cette partie du livre permettent d’identifier, dans chaque cas, les acteurs sociaux impliqués, les projets qu’ils poursuivent, les pratiques organisationnelles mises en place ainsi que les implications éventuelles de ces initiatives aux plans institutionnel et politique au regard du modèle économique et sociétal dominant. Ces « chantiers » sont assez représentatifs des tendances actuelles dans le domaine de l’économie sociale au Nord et au Sud. Un ouvrage ultérieur pourrait cependant inclure certains champs de pratiques n’ayant pas été abordés ici, par exemple les initiatives solidaires construites par le biais d’Internet ou les entreprises sociales actives dans le domaine environnemental. La troisième partie de l’ouvrage troque les pratiques pour les enjeux que représentent ces façons novatrices de faire face aux problématiques sociales dans le cadre de systèmes économiques et politiques nationaux. Isabel Yépez del Castillo, du Groupe de recherche interdisciplinaire sur l’Amérique latine de l’Université catholique de Louvain, et Sophie Charlier, de l’Institut d’études du développement de la même institution, se penchent notamment sur le difficile passage des stratégies de survie individuelles à l’action collective et sur l’hybridation des ressources, du travail et des logiques à l’oeuvre aux sein des initiatives de l’économie sociale. Prenant bien soin de distinguer l’économie populaire de l’économie informelle et de l’économie sociale, Bénédicte Fonteneau, de l’Institut supérieur du travail, et Marthe Nyssens, du Centre de recherche interdiscipinaire sur la solidarité et l’innovation sociale, toutes les deux de l’Université catholique de Louvain, se demandent avec Abdou Salam Fall de l’Institut fondamental d’Afrique noire, de l’Université Cheick Anta Diop de Dakar, dans quelle mesure et sous quelles conditions l’économie informelle peut être porteuse d’une économie …