Échos et débats

La présence des organismes communautaires de soutien aux groupes vulnérables dans un quartier de centre-villeLeurs rapports avec la collectivité[Notice]

  • Rosario Demers

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  • Rosario Demers
    Résidant du centre-ville de Montréal
    Président de la Table de concertation du faubourg Saint-Laurent
    rosariod@videotron.ca

Les relations entre les organismes communautaires intervenant auprès des populations marginales et la communauté résidante ou d’affaires, dans le centre-ville, ne sont pas toujours harmonieuses. Nous vivons des tensions ces temps-ci à propos de la localisation ou de la relocalisation de certains organismes de soutien. Leur présence et leurs actions sont associées à des irritants subis par la population résidante, ainsi que par les commerçants, les promoteurs de projets de développement ou les représentants des institutions. À titre d’exemple, dans le faubourg Saint-Laurent, des voix se sont élevées dernièrement pour contester le choix d’un site d’opérations pour un programme d’échange de seringues. La confrontation a pris des proportions inquiétantes, lorsque l’arrondissement de Ville-Marie a procédé à l’adoption d’un règlement qui impose des usages conditionnels aux organismes de soutien aux groupes vulnérables. Il y aurait, pense-t-on, une corrélation entre l’implantation, dans le quartier, des organismes de soutien et la concentration de problèmes sociaux, notamment, ceux qui sont reliés à la marginalité. Les propos qui suivent ne sont pas le produit d’une démarche scientifique. C’est l’expression de points de vue d’un simple citoyen qui observe son milieu et participe à la vie communautaire de son quartier. Je voudrais d’abord relever quelques perceptions concernant notre sujet, puis décrire certains enjeux que pose le lien entre les organisations communautaires de soutien aux groupes vulnérables et la collectivité dans son ensemble. Enfin, je soumets une interrogation sur l’ancrage des organismes dans la communauté. Le rapport à la marginalité dans ses multiples expressions n’est certainement pas le même, selon que l’on est intervenant ou intervenante communautaire, résidant ou résidante d’un quartier de centre-ville, propriétaire d’un commerce sur la rue Sainte-Catherine ou simple visiteur. Les perceptions diffèrent. On entend souvent le point de vue selon lequel l’offre de services auprès des personnes marginalisées contribue à retenir celles-ci dans le voisinage de ces lieux de service. La concentration de l’itinérance ne serait-elle pas le fait d’une concentration de quatre maisons d’accueil dans le faubourg Saint-Laurent ou à sa périphérie : la Maison du Père, La Mission Old Brewery, L’Accueil Bonneau, La Maison Saint-Michel ? « Allez au centre-ville, suggère-t-on, vous trouverez là le Bon Dieu dans la rue, l’Anonyme et autres Oeuvres Saint-Jacques qui vont vous offrir la bouffe et toutes sortes de services. » Des citoyens et des citoyennes pensent que la concentration des services dans cette partie du centre-ville est découle d’une politique non avouée de la santé publique : concentrer les ressources pour mieux circonscrire les problèmes, agir avec plus d’efficacité et limiter territorialement les méfaits sociaux d’une certaine marginalité. Dans le monde des organismes communautaires, on a une perception tout autre. C’est plutôt le pouvoir attractif du centre-ville qui explique la présence de la population dite marginale. Et ce phénomène ne date pas d’hier, croit-on : la présence d’itinérants et de groupes marginaux dans le faubourg Saint-Laurent, par exemple, est un phénomène ancien étroitement lié à l’histoire du quartier. D’autres font l’analyse suivante : l’approche de « réduction des méfaits », plutôt que l’adoption de mesures efficaces pour « sortir » les gens de la rue, contribue à renforcer leur ancrage dans le centre-ville est. L’effet induit est de consacrer le faubourg Saint-Laurent et ses environs, lieu d’appartenance des marginalités : les sans-abri, les jeunes de la rue, les commerçants de drogue, les travailleuses et travailleurs du sexe, etc. Le débat sur les impacts de la présence des ressources communautaires sur la concentration des problèmes sociaux devrait être mieux documenté par des recherches et des analyses plus pointues. Il faudrait d’abord établir la carte d’implantation de ces ressources et se demander s’il y a …