Échos et débats

Renouveler l’État social Les enjeux de l’action communautaire au Québec[Notice]

  • René Lachapelle

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  • René Lachapelle
    Organisateur communautaire
    CSSS de Sorel-Tracy

Au Québec, le défi commun aux mouvements communautaires et à l’organisation communautaire en CSSS-CLSC, c’est de contribuer au renouvellement de la démocratie et de l’État social en contexte de mondialisation néolibérale. Cela exige d’allier protestation et proposition, résistance et construction. Si la Révolution tranquille a permis de mettre sur pied un ensemble de services publics, elle nous a aussi donné les moyens d’une affirmation individuelle beaucoup plus poussée, aux dépens souvent des solidarités qui nous avaient permis de bâtir cet État social. Tout en reconnaissant que le Québec se distingue par l’importance de ses politiques sociales, il faut reconnaître que la société québécoise est marquée par l’idéologie libérale qui valorise les gagnants et le « chacun pour soi » pour tirer son épingle du jeu de la mondialisation. La guignolée du temps des Fêtes occupe plus de place dans les médias que la mise en oeuvre – d’ailleurs encore à faire ! – de la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l’exclusion sociale. Ceux et celles qui croient qu’un autre monde est possible, où le don sera reconnu à sa juste valeur et la solidarité occupera une place de choix, doivent s’imposer une réflexion collective sur le renouvellement de la démocratie et de l’État social au Québec. Les groupes populaires et la première génération des CLSC sont nés en pleine turbulence de mouvements citoyens revendicateurs et de collectivités locales en rapide transformation. Récupération par l’État des cliniques populaires, les CLSC ont permis que, dès le milieu des années 1980, le territoire québécois soit desservi en entier par 148 établissements dispensant des services de santé, des services sociaux et des services communautaires dispensés, dans la quasi-totalité, par des professionnels de l’organisation communautaire. Pratique de travail social en dehors des cadres de la profession, l’organisation communautaire en CLSC a recruté ses premiers artisans et artisanes dans les rangs communautaires. Formés dans diverses disciplines, ils étaient enracinés dans leur milieu et préoccupés de faire participer les populations à la définition des services sociaux et de santé. Les rapports entre établissements publics et groupes communautaires sont loin d’avoir partout la même profondeur et les mêmes complicités, mais il est clair que l’État québécois a assumé ses responsabilités sociales en « s’inspirant du mouvement communautaire […] Ce qui, d’un point de vue, est une “appropriation” du mouvement communautaire par l’État peut être perçu, d’un autre point de vue, comme l’influence du mouvement communautaire sur l’État » (White, 2001 : 36-37). Les services d’organisation communautaire des CLSC ont constitué une forme de soutien de l’État québécois à la consolidation d’un mouvement communautaire autonome. Les organisations volontaires d’éducation populaire et les groupes populaires issus des années 1960 et 1970 ont revendiqué, dès les années 1980, leur reconnaissance comme organismes communautaires. En 1988, la Coalition des organismes communautaires du Québec (COCQ), dénonçant l’absence « de politique claire, exige la reconnaissance effective de l’action communautaire autonome et, par voie de conséquence, […] le soutien financier qui s’ensuit » (COCQ, 1988 : 15). Ces revendications arrivent au moment où la crise des finances publiques ébranle les assises d’un État social reposant essentiellement sur les services publics. Les gouvernements se tournent vers des modes d’intervention collective de type communautaire misant sur les réseaux naturels de solidarité. Au même moment, les mouvements sociaux cherchent des alternatives à une solidarité gommée par la bureaucratisation. La CSN organise le congrès d’orientation « Avec le monde » (1983), la FTQ lance le Fonds de solidarité (1983) et les groupes communautaires se retrouvent à Victoriaville au colloque « Fais-moi signe de changement » (1986). Moment clé pour l’action communautaire, ce colloque a …

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