Comptes rendus

Christine Corbeil et Isabelle Marchand (dir.), L’intervention féministe d’hier à aujourd’hui : portrait d’une pratique sociale diversifiée, Montréal, Éditions du Remue-ménage, 2010, 253 p.[Notice]

  • Catherine Flynn

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  • Catherine Flynn
    Doctorante en service social, Université de Montréal/Université McGill

L’intervention féministe a émergé en Amérique du Nord et au Québec au cours des années 1970, dans la foulée des différents mouvements sociaux émergents comme le féminisme, le pacifisme et l’antiracisme. Cette pratique repose sur des valeurs d’égalité, de justice sociale et de solidarité, se traduisant dans l’intervention par la reconnaissance du potentiel des femmes, la reprise du pouvoir sur leur vie et l’instauration de rapport égalitaire entre l’aidante et l’aidée. Dans les années 1980, l’intervention féministe au Québec s’appuie sur les écrits de féministes américaines qui seront vivement critiqués, au cours de la décennie suivante, par les féministes afro-américaines, hispano-américaines et indiennes. Les critiques visent principalement la tendance des féministes occidentales à homogénéiser les différents statuts sociaux et à centrer l’analyse féministe sur les rapports de genre, ce qui contribue à occulter d’autres formes de subordination comme celles liées à la race, à l’orientation sexuelle, à la classe sociale, etc. En réponse à ces critiques, le mouvement des femmes au Québec s’ouvre sur les femmes issues de la diversité et les féministes, tant du milieu de la recherche que de la pratique, ont renouvelé et bonifié l’intervention auprès des femmes en difficulté, s’intéressant à des réalités plurielles et diversifiées. En raison du chemin parcouru depuis les années 1970, ce livre s’articule autour de la question suivante : « Où en est l’intervention féministe en ce début de xxie siècle ? » (p. 11). Cette question sous-tend une réflexion sur la façon dont l’intervention féministe s’est transformée au fil des ans et quels ont été les déterminants de cette transformation et sa réponse aux réalités et aux problématiques vécues par les femmes, dans une société faisant la promotion des libertés individuelles. La résilience de l’intervention féministe et sa capacité de renouvellement dans un contexte sociopolitique de droite, rétrograde en matière d’égalité des chances pour tous, et où de nombreux messages antiféministes sont véhiculés est également questionnée dans cet ouvrage. Sans prétendre faire le portrait exhaustif de l’intervention féministe au Québec, ce livre est une démarche d’actualisation des connaissances mettant en lumière des pratiques novatrices ayant émergé au sein des organismes féministes ou par le biais de collaborations entre chercheurs et intervenants. Il s’agit également de poser un regard critique sur les discours et les pratiques féministes au Québec. Pour ce faire, tant le point de vue de l’intervention que celui de la recherche ont été rassemblés dans cet ouvrage afin de constituer une mémoire écrite des connaissances québécoises en matière d’intervention féministe, un champ où les savoirs sont reconnus pour être transmis de façon orale. Cet ouvrage est séparé en quatre parties dont les thématiques donnent un aperçu assez juste des problématiques, des enjeux, des défis et des débats qui, à l’heure actuelle, caractérisent l’intervention féministe au Québec. La première partie, « Fondements et principes de l’intervention féministe », comprend un seul texte, soit celui de Corbeil et Marchand intitulé « L’intervention féministe : un modèle et des pratiques au coeur du mouvement des femmes québécois ». Il présente les résultats d’une étude en deux volets menée par Descarries et Corbeil, Discours et pratiques féministes : un inventaire des lieux, dont l’objectif était de « faire le point sur l’évolution récente de ce modèle d’intervention, tant en regard de ses assises théoriques que sur sa mise en oeuvre dans différent domaine de pratique » (p. 23-24). Dans un premier temps, une analyse documentaire réaffirme le postulat voulant que le privé soit politique, car « il importe de faire le lien entre les difficultés vécues par les femmes et les structures sociales opprimantes » (p. 26). Ce faisant, « …

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