Les comptes rendus

L’imposture de la maladie mentale : critique du discours psychiatrique, Alain Bachand, Montréal, Les éditions Liber, 2012, 170 p.[Notice]

  • Emmanuelle Khoury

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  • Emmanuelle Khoury
    Étudiante de 3e cycle, École de service social, Université de Montréal

Alain Bachand est un fonctionnaire de la ville de Montréal qui possède une formation en philosophie. Son essai intitulé « L’imposture de la maladie mentale : critique du discours psychiatrique » vise à déconstruire le discours psychiatrique traditionnel. Rédigé sous forme de critiques, à la fois concises et étayées, à l’endos de la jaquette du livre on lit que ce deuxième ouvrage de Bachand a pour objectif de « […] montrer en quoi consiste le mensonge de la maladie mentale et de la psychiatrie ». Les arguments avancés contre la psychiatrie sont fondés sur une perspective critique visant à remettre en question la légitimité du pouvoir exercé par la psychiatrie, notamment l’omnipotence du modèle psychiatrique. Ce livre n’est ni un guide clinique ou thérapeutique ni un manuel universitaire, ce qui le rend accessible aux non-spécialistes. La réflexion de Bachand puise sa force dans sa capacité à contester de manière systématique et concise les fondements et les pratiques de la psychiatrie traditionnelle. À cet égard, Bachand identifie les failles méthodologiques de la recherche scientifique en psychiatrie et affirme que des liens de causalité erronés ont mené à l’élaboration de théories biochimiques qu’il juge trompeuses. Ces mêmes théories, ont servi à jeter les fondations de la psychiatrie traditionnelle, les rendant conséquemment tout aussi biaisées. Tout au long de son essai, il réitère l’argument suivant : la maladie mentale ne peut être considérée comme une véritable maladie puisqu’aucune preuve fiable ne démontre un quelconque trouble ou dysfonctionnement biologique causant cette dite maladie. Pour l’auteur, la maladie mentale est en réalité une construction sociale basée sur des pratiques discursives désignant des comportements et des pratiques socialement déviantes. Dans son introduction, Bachand se donne l’objectif de démontrer que la psychiatrie n’est pas une véritable discipline scientifique, mais plutôt une discipline morale. Il poursuit en soutenant que la maladie mentale est une construction arbitraire du monde médical et tributaire de jugements moraux et de valeur de spécialistes en position de pouvoir. Selon lui, la maladie mentale s’explique davantage par des arguments d’ordre psychosocial, mais ceux-ci sont oblitérés par le pouvoir du jargon médical qui ne sert qu’à fournir de nouveaux termes pour décrire la déviance sociale. L’ouvrage comporte dix chapitres. Les six premiers passent en revue quelques-unes des maladies mentales les plus importantes, notamment la schizophrénie, la dépression, l’alcoolisme, la déviance sexuelle, le trouble de la personnalité antisociale, le trouble déficitaire de l’attention et l’hyperactivité. On remarque l’exclusion notable d’autres pathologies bien connues, comme le trouble bipolaire et un éventail de troubles liés à l’anxiété. L’auteur ne justifie pas les raisons qui l’ont amené à évoquer ou à omettre certains troubles mentaux dans son ouvrage. Ces six chapitres exposent diverses lacunes observées dans des études empiriques qui prétendent faire la démonstration d’un lien causal d’ordre biochimique avec la maladie mentale. Plus précisément, le premier chapitre se penche sur la schizophrénie qu’il présente, sans explication, comme étant la maladie emblématique et symbolique pour la psychiatrie. Il critique le fait que la psychiatrie traditionnelle continue d’aller de l’avant dans la recherche fondamentale en ayant comme certitude scientifique que la schizophrénie est une maladie cérébrale. Au chapitre deux, Bachand amorce une discussion sur la dépression. Il analyse en détail des théories biologiques portant sur la dépression, qu’il dépeint comme étant peu concluantes, voire même trompeuses. Pour étayer son argument selon lequel la dépression provient de causes diverses, il utilise les champs disciplinaires de l’anthropologie médicale et la psychiatrie transculturelle. Il précise que partout dans le monde des individus sont tristes et démoralisés et qu’il existe ainsi différentes manifestations interculturelles de la dépression. L’auteur aborde également d’autres thèmes transversaux à …