Disputatio

Réponses à mes critiques : La madeleine, entre procession et mathématisationQuelques réponses à D. Corfield A. Lebel, et P. Cassou-Noguès[Notice]

  • Emmanuel Barot

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  • Emmanuel Barot
    Université Toulouse-II Le Mirail

J’exprime d’abord ici ma gratitude à MM. Corfield, Cassou-Noguès et Lebel pour les lectures et les questionnements attentifs dont ils témoignent ici, et à J.-P. Marquis qui a suscité cet échange. L’écriture de ce livre a été soumise à une difficulté majeure : il est à notre connaissance le premier sur la philosophie mathématique de Lautman, et a trouvé place dans une collection qui ne s’adresse pas à des spécialistes. Déterminations harmonieuses, mais qui impliquent que le livre soit une introduction aux grandes thèses de Lautman : destiné à susciter un intérêt au-delà de cercles plus ou moins étroits, la contrepartie fut la nécessité de le limiter, justement, à ces grandes lignes. D’où la réduction à la portion congrue d’une masse de questionnements et d’approfondissements auxquels je souhaitais initialement procéder, par exemple autour de certains débats contemporains sur les « fondements » des mathématiques ou centrés sur des questions de filiation. Que ce soit sur le néo-platonisme (A. Lebel), le débat central vérité/nécessité au croisement des aires continentales et anglo-saxonnes ou le rôle de Deleuze (P. Cassou-Noguès), ou la traductibilité « transcendantale » revue et corrigée de la dialectique des Idées et leur extériorité-intériorité au territoire mathématique (D. Corfield), le livre est ainsi au mieux laconique, sinon silencieux. Je me réjouis de la variété de ces remarques, parce que le but était que ces limites de l’ouvrage soient ainsi levées, mais surtout parce qu’elle confirment bien que c’est dans la totalité des champs, philosophique, historique, scientifique, et plus encore, que Lautman peut et doit constituer un puissant inspirateur. Partons des questions d’A. Lebel, qui se présente comme philosophiquement « naïf » alors que sa contribution au sujet de l’architecture néo-platonicienne et plotinienne du dispositif de Lautman est remarquablement instruite. Sur les actes intérieur/extérieur, la perfection/production et l’incomplétude des Idées, ses rapprochements sont indéniables. Il a soin de les faire relever non pas tant d’une orthodoxie plus qu’improbable (dont l’affirmation serait effectivement « ridicule », l’hétérodoxie étant le trait le plus frappant de tous les usages lautmaniens) ou de lectures stylo en main des néoplatoniciens. Qu’il soit question d’un « flirt » néoplatonisant de Léon Robin dont on sait qu’il fut un passeur majeur de Platon vers Lautman, ou d’une « redécouverte » immanente à la logique de questionnement dont ce dernier fit preuve (idée probante mais difficile à étayer, sinon indirectement — ce qui ne peut suffire — par l’absence de références explicites), je souscris à son argument. A. Lebel propose donc une substitution intéressante à la question « qu’y a-t-il d’hégélien chez Lautman ? », de la question « qu’y a-t-il de néoplatonicien chez Hegel ? », ce qui est effectivement à la fois consonnant avec les Leçons sur Platon de 1825-1826, et les affinités spéculatives dont il rappelle les plus établies. Sur deux points cependant je m’écarte de sa lecture. D’une part l’idée que la cooriginarité de l’Un et de la dyade indéfinie « ne joue pas un très grand rôle » pour Lautman. C’est pourtant cette cooriginarité qui gouverne toute l’esquisse de la « physique » de ses textes posthumes, en la forme de celle entre le Même et l’Autre, et d’autre part qui innerve aussi sa reprise polymorphe de la méthode platonicienne de « division » destinée à rendre raison d’un des processus majeurs de la « découverte » mathématique. D’autre part et corrélativement, et c’est le plus important à mes yeux, A. Lebel tire de la substitution ci-dessus, l’absence de références à Hegel à l’appui, que « la référence à Hegel est inutile ». Littéralement parlant, en termes philologiques, c’est tout à fait vrai. …

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