Résumés
Résumé
Les timbres-poste de la Grèce moderne s’appuient souvent sur un système complexe d’images qui participe pleinement à la définition de l’idée de nation. Envisagés comme un système cohérent, ces timbres transmettent leurs sens non seulement par ce qui est signifié ouvertement, mais aussi par leurs silences : la décision de ne pas utiliser certaines des images disponibles devient elle-même une forme de signification. Pour les timbres grecs de la période de 1924 à 1982, l’idée de nation est visiblement un problème complexe. Deux courants sont impliqués : l’un est inspiré par le monde de la Grèce antique et de l’Empire byzantin, et l’autre par le nationalisme politique moderne qui inclut des éléments à la fois démocratiques, antidémocratiques et monarchistes, depuis l’établissement d’une Grèce indépendante en 1832. En posant la question « quelle Grèce ? » et « la Grèce de qui ? », le timbre-poste grec propose des réponses qui ne sont ouvertement politiques que dans de rares cas, mais qui n’en révèlent pas moins l’évolution des réponses possibles qui sont caractéristiques de la société grecque moderne.
Abstract
The postage stamps of modern Greece often rely on a complex system of imagery, which is indexical of nationhood. Taken as a coherent system, these stamps convey meaning not only by what is signified overtly, but by silences in which the decision not to use available imagery becomes in itself a form of signification. For the Greek stamp of the years between 1924 and 1982, the problem of nationhood is visibly complex. Two elements are involved : inspiration derived from the ancient Greek world and the Byzantine Empire, and modern political nationalism which has included democratic, anti-democratic, and monarchist elements since the establishment of an independent Greece in 1832. In posing the question, “ which Greece ? ” and “ whose Greece ? ”, the Greek postage stamp supplies answers which are rarely overtly political, but which nonetheless show the changing set of possible answers characteristic of modern Greek society.
Corps de l’article
Introduction
En examinant la relation entre les signes et la société, Bakhtine/Volochinov (1977 : 27) a fait la remarque suivante : « Chaque signe idéologique est non seulement un reflet, une ombre de la réalité, mais aussi un fragment matériel de cette réalité ». Peu de médias expressifs illustrent ce principe aussi bien que le timbre-poste. Même des thèmes aussi banals que la nature, les transports et le sport, qui semblent idéologiquement neutres, sont souvent représentatifs d’autres valeurs nationales qui peuvent se révéler être d’un grand poids culturel et idéologique. En vertu même de sa banalité et de sa production de masse, le timbre-poste entre également de plain-pied dans la vie matérielle de la société. Considérant la richesse de représentation sémiotique des timbres-poste et leur participation aux rythmes de la vie quotidienne partout dans le monde moderne, il est surprenant de constater que ce sujet n’ait pas encore été traité en plus grand détail du point de vue de la sémiotique (consulter Deledalle, 1979 : 96-100 ; Scott, 1995 ; 1999).
En termes sémiotiques, tels que ceux développés par C. S. Peirce, le timbre-poste peut être considéré comme un signe à plusieurs niveaux différents. Au niveau fondamental, le timbre-poste est composé d’un dessin unique (le dessin représenté sur le timbre même) qui indique un objet sémiotique et une interprétation du signe, qui sont des traits essentiels de la sémiotique de Peirce (voir Deledalle, 1979 ; Greenlee, 1973 ; Merrell, 2001). Mais ce niveau initial se révèle être aussi simple que trompeur, car le signe qui figure sur le timbre-poste est relié à d’autres signes contenus dans la représentation postale. Une série de timbres, par exemple, peut utiliser un dessin unique avec différentes couleurs (ainsi qu’une inscription numérique différente) pour représenter différentes valeurs monétaires. Dans ce cas, le timbre se réfère non seulement à son objet sémiotique primaire, mais aussi à tous les autres timbres de la même série. Dans les séries commémoratives, un dessin de base se retrouve sur chaque timbre de la même série, bien que chacun ait son image unique qui représente à la fois son objet sémiotique primaire et sa valeur monétaire dans la série.
Dans ce domaine, les timbres-poste présentent des relations syntagmatiques et paradigmatiques, dans le sens de la sémiotique de Saussure. Tout comme un mot dans le langage représente un élément contrastif dans le système linguistique, qui regroupe ses variations inflectionnelles dans un paradigme linguistique (voir Saussure, 1980 : 174-175), une série de timbres représente une unité contrastive dans le système de représentation postale, qui peut être subdivisé en différentes dénominations monétaires et thèmes graphiques qui correspondent aux variations inflectionnelles du paradigme linguistique. Cependant, à la différence du paradigme linguistique, les éléments spécifiques contenus dans une émission postale sont ordonnés syntagmatiquement avec des rôles différents pour les valeurs des timbres ordinaires et ceux d’usage moins courant.
Par extension, le timbre-poste n’implique pas simplement un signe, un objet sémiotique, et une interprétation comme le prévoit la théorie de Peirce, car il y aura toujours un minimum de deux ensembles d’interprétations – une interprétation intérieure, développée dans le pays d’origine, et une interprétation extérieure dans les autres pays. Les timbres de haute valeur (particulièrement les timbres commémoratifs) et les timbres « par avion » reçoivent fréquemment des interprétations spéciales en considération de leur direction et réception probables à l’étranger, alors que les timbres de moindre valeur ont plus de chance d’être interprétés dans un contexte national. La dualité intrinsèque des interprétations mène donc à la possibilité de messages contradictoires ou ambigus.
Cet article se concentre sur les différentes manières dont les timbres grecs, plus particulièrement de 1924 à 1982, illustrent la complexité sémiotique de la représentation postale, à la fois du point de vue du dessin et (à un degré moindre) des conditions d’utilisation des timbres. Ces principes sémiotiques sont peut-être mieux illustrés quand on considère la représentation des idées de nation ou d’identité nationale dans les émissions de timbres-poste. Je considérerai en particulier quatre stratégies de représentation particulièrement évidentes pendant cette période : (1) le nom utilisé pour désigner l’État grec moderne ; (2) la représentation de la Grèce par l’usage d’objets culturels ; (3) l’usage de la monarchie comme faisant partie d’un système de référence ; et (4) ce que j’ai intitulé « l’héritage de l’après-guerre », y compris une référence à la résistance grecque pendant la Deuxième Guerre mondiale, à la guerre civile entre les forces procommunistes et anticommunistes après la fin de la guerre, à la junte militaire de droite qui a gouverné le pays de 1967 à 1974. Cette étude sera développée en majeure partie à partir du concept fondamental du signe, selon Peirce, en tant que forme concrète intermédiaire entre les objets sémiotiques et leurs interprétations ; cependant, elle cherchera aussi à élaborer ce concept sémiotique en référence spéciale au rôle joué par le silence en tant que principe sémiotique (voir Jaworski, 1993). Comme nous allons le voir, la non-utilisation de l’image dans un contexte particulier peut se révéler être une partie aussi puissante et essentielle du système sémiotique que son utilisation véritable.
Le nom de la Grèce
L’usage d’un titre national sur un timbre repose sur le langage, un système arbitraire qui relie les signes à leurs objets sémiotiques, pour exprimer le fait que le timbre est un produit légitime d’un État dont les émissions postales sont internationalement reconnues. La désignation nationale (même quand elle se fait en silence – sans mots – comme dans le cas des timbres du Royaume-Uni) est révélatrice du domaine dans lequel le timbre est valable. Les désignations nationales peuvent être considérées comme acquises, cependant elles ne sont pas prédéterminées. Un choix conscient doit être fait concernant la langue ou les langues, les caractères et les mots à utiliser pour désigner le timbre comme émission d’un pays spécifique, et, ce faisant, désigner le pays même en tant que référent. Les moyens par lesquels un pays se réfère à lui-même peuvent être utilisés non seulement pour désigner ce pays en tant qu’agence postale, mais, de manière plus importante, pour désigner le concept et l’identité de la nation même.
Le label de base de la Grèce, le label neutre, est le nom ΕΛΛΑΣ « Hellas » imprimé en lettres majuscules grecques. Bien qu’abrégé en ΕΛΛ· dans les premières émissions de 1861 à 1886, le nom apparaît au long en 1888 et continue d’être utilisé plus ou moins régulièrement jusqu’au début de la période qui nous intéresse. Même si les premiers timbres grecs ont été basés presque entièrement sur des images de la mythologie grecque antique – en particulier sur l’image d’Hermès –, l’illustration 1 signale un écart à cette tendance par l’utilisation, pour la première fois, de l’alphabet romain, afin de commémorer le décès de Lord Byron pendant un voyage philhellénique en 1824. Le tableau qui décore le timbre est iconique, selon la terminologie de Peirce, car il ressemble au tableau original de Théodoros Vryzakis : cette peinture était elle-même iconique car elle représentait (de manière idéalisée) l’arrivée de Byron à Missolonghi. La signification indiciaire de l’icône est bien plus importante, bien que, se référant directement au soutien de Lord Byron à la cause du nationalisme grec, elle soit en partie inspirée par les mouvements nationalistes romantiques qui se sont développés dans toute l’Europe à cette époque. L’usage de l’alphabet romain et de la référence à l’engagement d’un Anglais célèbre souligne ainsi une idée de la nation grecque qui participe aux mouvements politiques et nationaux du monde européen en général, plutôt que de relever d’une définition intérieure dans les termes de l’héritage hellénique et byzantin. Dans le contexte de la croissance des États européens modernes, la Grèce y comprise, il est particulièrement révélateur que l’illustration 1, qui était accompagnée d’un timbre plus petit et de valeur moindre représentant le portait de Byron, ait été la première émission de la Première République grecque moderne, fondée à cette époque sur une nouvelle constitution démocratique.
Bien que des émissions ultérieures de la Première République aient reposé surtout sur la simple dénomination ΕΛΛΑΣ sans aucune référence internationale (comme dans la représentation du temple de Thésée à Athènes – voir ill. 2 – en 1927), cette période est aussi remarquable par son usage avant-gardiste de la dénomination ΕΛΛΗΝΙΚΗ ΔΗΜΟΚΡΑΤΙΑ,« Démocratie grecque », qui apparaît sur le dessin de 1927 (ill. 3). L’interprétation primaire du timbre est historique, nationaliste et internationaliste : elle se réfère à la victoire du général français Flavier pendant la guerre de l’Indépendance de la Grèce, qui s’est soldée par la libération d’Athènes de la domination turque en 1826. Le choix de ΕΛΛΗΝΙΚΗ ΔΗΜΟΚΡΑΤΙΑ (qui est apparu préalablement en surimpression sur plusieurs timbres de la République en 1924) est significatif en tant que référence indiciaire aux structures politiques et démocratiques de l’époque. Bien que ΕΛΛΑΣ ait continué d’être utilisé comme dénomination nationale pendant les dernières années de la République, cette expression a assumé une nouvelle signification quelques années plus tard, comme nous le verrons plus loin.
La désignation ΕΛΛΑΣ a été la seule employée après la fin de la Première République, la ré-institution de la monarchie en 1935, l’ascension de la dictature militaire de droite sous le général Ioannis Metaxas en 1936, l’occupation allemande et italienne pendant la Deuxième Guerre mondiale, et la restauration de la monarchie constitutionnelle en 1947. Après une période de stabilité relative, de croissance économique et d’engagement international, le gouvernement grec a lancé une série de quatre timbres célébrant le 125e anniversaire de la Banque Nationale Grecque : deux timbres de grande valeur (ill. 4 et 5) comprennent, pour la première fois, une translittération romaine de ΕΛΛΑΣ, qui donne la double désignation ΕΛΛΑΣ-HELLAS. Ce label a continué d’exister pendant les années suivantes, sous le régime militaire des colonels (1967-1974) et la restauration de la démocratie sous le contrôle de Konstantinos Karamanlis jusqu’en 1980. L’utilisation initiale de ce label sur ces timbres commémoratifs a une double signification : la banque elle-même est représentative de l’indépendance nationale grecque et du développement économique, tandis que l’utilisation du label ΕΛΛΑΣ-HELLAS (spécialement sur les timbres utilisés à destination des pays étrangers) traduit la volonté de représentation nationale aux personnes qui lisent l’anglais, le français et les autres langues de l’alphabet romain.
La restauration de la démocratie en 1974 s’est produite dans une Grèce fortement polarisée et menacée d’instabilité à l’intérieur de ses frontières. L’absence de changement dans la dénomination nationale sous Karamanlis représente ainsi une utilisation significative du silence : bien que certains timbres lancés en 1977 aient commémoré des événements spécifiques de la résistance au régime des colonels, l’absence de changement dans la dénomination nationale met l’accent sur la stabilité dont le pays avait grandement besoin à l’époque. Il n’est fait référence ni à l’abolition de la monarchie en 1974 ni à aucun autre changement dans la vie politique grecque jusqu’à l’arrivée au pouvoir en 1981 du gouvernement de centre-gauche mené par Andréas Papandréou. La désignation ΕΛΛΗΝΙΚΗ ΔΗΜΟΚΡΑΤΙΑ a été ressuscitée en 1982 et, ce faisant, la désignation HELLAS a largement rétréci (voir ill. 6). On interpréterait à tort le rétrécissement de HELLAS comme un rejet de la part de la Grèce de s’orienter vers l’extérieur – en considérant, par exemple, l’accession de la Grèce au Marché commun européen en 1981 –; il est plus vrai de considérer la nouvelle dénomination comme faisant référence à la valeur d’une démocratie stable. Cette désignation existe encore à présent, sans aucune considération de l’orientation politique des divers partis au gouvernement.
Quelle Grèce ?
L’ascension de l’État grec moderne dans la première moitié du xixe siècle a laissé sans réponse bon nombre de questions concernant son identité. La Convention de Londres a été signée en 1832 par les « Puissances Protectrices » : la Grande-Bretagne, la France, la Bavière et la Russie. Elle garantissait – dans certains domaines – l’indépendance du Royaume de Grèce, gouverné par un roi choisi par les Puissances Protectrices. Le prince Otto, fils de Ludwig Ier de Bavière, est devenu le roi Otto ou, dans le style hellénique, Otho de Grèce. Le nouvel État comprenait seulement une fraction du territoire et de la population que l’on pouvait considérer comme grecs : comme l’indique Van der Kiste (1994 : 1), l’État, à l’origine, ne comprenait que 800 000 habitants, alors que trois millions de Grecs vivaient dans le reste de l’Empire ottoman, et 200 000 autres dans les Îles Ioniennes sous contrôle britannique. Même si l’État moderne avait accueilli une large proportion de ces populations, il n’aurait pas eu l’importance géographique et culturelle dont il jouissait à l’époque de l’Empire byzantin et de la civilisation grecque antique. Bien qu’on puisse considérer l’indépendance comme une première étape dans la reconnaissance de l’identité grecque, les limitations géographiques et l’institution d’une monarchie dont le roi n’était même pas grec ont peu contribué à la création d’une vision commune de la nation. Exprimant ce désir d’identité nationale, la politique grecque et les relations étrangères se concentraient sur ce que le politicien Ioannis Kolettis a nommé, au xixe siècle, la Megali Idea ou la « Grande Idée », qui réclamait une vision élargie de la Grèce dans laquelle, comme le dit Kolettis,
[...] un Grec n’est pas seulement une personne qui vit dans ce Royaume, mais aussi une personne qui vit dans [...] n’importe quel pays associé à l’histoire grecque et à la race grecque.
Clogg, 1992 : 48
Reflet de ces tensions, les timbres grecs ont été conçus en majeure partie selon trois portraits différents de la Grèce : la Grèce antique, la civilisation et l’Empire byzantins et certaines visions discordantes de la Grèce dans le monde moderne, particulièrement après la Deuxième Guerre mondiale.
Représentant la gloire de la Grèce antique, les timbres-poste des premières émissions ont été surtout inspirés par des thèmes classiques : la tête d’Hermès a dominé dans les dessins de 1861 à 1896, et a continué de rester populaire (voir ill. 7 qui commémore cent années de timbres grecs). Les références mythologiques, présentées dans les émissions « par avion » de 1935 et 1939, représentent le Chariot du Soleil (ill. 8) et Dédale et Icare (ill. 9) : elles mettent en association directe la poste aérienne moderne et la civilisation grecque antique.
Les timbres tels que ceux des illustrations 8 et 9 ou, de manière plus frappante, celui de l’illustration 10 émis en 1937-38, et qui représente le Chariot Panathénaïque, forment une association entre l’objet sémiotique et l’observateur, non seulement en vertu de ce qu’ils représentent, mais de par l’intégration du dessin à l’image principale du timbre. Cette stratégie graphique peut être mise en contraste avec d’autres émissions modernes qui objectivent l’image centrale. Remarquons en contraste la série de timbres sur l’art grec antique, lancée en 1954 et poursuivie en 1955-60 (ill. 11 de 1958), la série de pièces de monnaie, lancée en 1959 et poursuivie en 1963 (ill. 12 de 1963), et le timbre commémoratif des Jeux olympiques représentant la Coupe du Marathon des olympiades de 1896 (ill. 13 de 1967). Dans les illustrations 11-13, tandis que la relation iconique fondamentale est similaire à celle des illustrations 8-10, du fait que les principaux objets des dessins ressemblent à leurs objets sémiotiques, la relation indiciaire entre le signe et l’interprétation (selon Peirce, l’indexicalité indique une relation contiguë entre le signe et son objet) a changé. Dans le premier groupe, les signes principaux représentent des mythes spécifiques ou des figures mythologiques : leurs images sont icônes, non pas d’autres représentations artistiques, mais des personnages mythologiques eux-mêmes. Dans le second groupe, cependant, l’imagerie iconique du timbre est indice de l’objet physique – buste, pièce, coupe –, qui, à son tour, est icône d’un élément du monde réel ou mythologique. Certaines caractéristiques du dessin renforcent ce changement d’accent. Il est à remarquer que dans les illustrations 8-10, les signes principaux ne sont pas présentés sur fond neutre, et il existe très peu d’espace entre le dessin même et la bande extérieure : sur l’illustration 10, même la bordure du dessin est en motifs grecs plutôt qu’en lignes droites et neutres. Dans le second groupe, tous les objets se détachent sur fond neutre, et aucun effort n’a été fait pour intégrer certaines caractéristiques du dessin à l’ensemble du timbre. De manière subtile, ces différents aspects du dessin signalent un changement d’accent : on passe de la capacité du signe à représenter directement la culture à son pouvoir de représenter des objets qui ne symbolisent cette culture qu’indirectement.
L’utilisation d’images de la civilisation grecque antique n’est pas unique aux seuls timbres-poste grecs, et il n’est pas absolument certain que l’utilisation de signes grecs représente uniquement la culture grecque. Ce qui semble être une stratégie de représentation uniquement grecque est une juxtaposition ou un parallélisme particuliers entre les images antiques et modernes – ce que nous pourrions nommer « l’ancien dans le nouveau ». Les illustrations 14 et 15 (1951) font partie d’une série de six timbres commémorant la reconstruction de la Grèce après la Deuxième Guerre mondiale. L’illustration 14 présente un équipage de pêche moderne associé au trident de Poséidon, le dieu grec antique de la mer, alors que l’illustration 15 symbolise l’agriculture, non seulement par la présentation iconique d’un champ, mais aussi par l’usage symbolique (la représentation iconique) de Demeter, la déesse de l’agriculture. L’illustration 16 (1960) représente à la fois le mouvement scout international moderne avec un personnage au premier plan qui prête serment et le serment antique des collèges d’Ephèbe avec la statue en arrière-plan. L’illustration 17 (1966) est encore plus frappante : elle commémore l’inauguration du service transatlantique des lignes aériennes grecques. La colonne antique grecque de droite suffit à symboliser la Grèce antique : les gratte-ciel de gauche symbolisent le Nouveau-Monde, à la fois géographiquement (l’orientation du dessin de droite à gauche est la représentation d’une carte conventionnelle) et aussi culturellement. Ce sont maintenant les lignes aériennes grecques qui font la liaison entre ces deux mondes. Semblablement, l’illustration 18 juxtapose la marine moderne (qui était commémorée dans l’émission de 1967 d’où provient cet échantillon) à une statue de conception antique. Ces usages de codes culturels, qui associent les figures grecques antiques au développement économique moderne, affirment à la fois la définition de la Grèce en termes de son héritage antique et de sa position dans le monde moderne.
La création de nouveaux codes de représentation par la disposition syntagmatique des timbres dans une série se voit nettement dans les illustrations 19-25. À la différence de nombreuses émissions commémoratives, ces timbres ne sont pas produits selon un dessin commun qui les présenterait comme faisant partie d’un système unique. Cependant, quand ces timbres étaient émis pour l’exposition « Essor de la civilisation hellénique » à Athènes en 1968, leur parution, dans les premières émissions du jeune régime des colonels en Grèce, se révèle être d’une grande signification. Un regard d’ensemble sur la civilisation athénienne (« Alkyonéos battu par Athéna », ill. 19 ; « Athéna équipée pour la guerre », ill. 20), Byzance, représentée par les illustrations 21 (une mosaïque byzantine des empereurs Constantin et Justinien) et 22 (le dernier empereur byzantin, Constantin Paléologos, dont la mort pendant la défaite de Constantinople par les forces turques en 1453 est devenue un puissant symbole national) et la vision romantique de la lutte de la Grèce moderne pour son indépendance, représentée par « La Grèce à Missolonghi » de Delacroix (ill. 23), trouve son apothéose dans le portait d’un soldat grec de la guerre de l’Indépendance dans le tableau de G.B. Scott « Evzone » (ill. 24). (La statue antique de la Victoire de Samothrace qui termine la série n’est pas représentée ici : ce chef-d’œuvre de l’art antique grec peut sembler de prime abord hors de la séquence historique, mais si l’on considère sa présence bien connue au Musée du Louvre à Paris, elle représente non seulement la Grèce antique, mais l’appréciation de la civilisation grecque dans le monde moderne.)
On trouve dans cette série bien plus que des références historiques. Le rôle joué par les militaires dans « l’essor de la civilisation hellénique » est représenté, non seulement par le tableau d’un soldat du combat pour l’indépendance au xixe siècle, mais aussi par le symbolisme conventionnel des dates inscrites en arrière-plan sur le tableau. Ces dates ne mentionnent pas explicitement des exploits militaires, mais indiquent plutôt des événements de 1912-1913 (la première guerre des Balkans), de 1917-1922 (lorsque les Grecs ont essayé de conquérir les territoires d’Asie Mineure occupés – une concrétisation de la Megali Idea qui s’est soldée par une défaite en 1922 et qui a mené à l’expulsion de milliers de réfugiés grecs), de 1940-1943 (la résistance grecque à l’occupation allemande et italienne), de 1945-1950 (la guerre civile entre les forces procommunistes et anticommunistes, qui a mené à la défaite de l’Armée démocratique procommuniste en 1949) et de 1950-1952 (une période d’instabilité en Grèce qui a culminé dans la centralisation du pouvoir en 1952 sous le Maréchal Papagos, qui avait commandé les forces anticommunistes pendant la guerre civile). Considérées indépendamment les unes des autres, les illustrations 19-23 sont principalement des icônes culturelles et historiques qui ressemblent à des œuvres d’art existant déjà, et de ce fait ces icônes évoquent différentes périodes de l’histoire grecque. Prises dans leur ensemble avec l’illustration 24, un syntagme est créé qui souligne le rôle de l’armée dans son combat pour atteindre les objectifs propres au xxe siècle (la Megali Idea, l’indépendance et l’anticommunisme) et, de ce fait, protéger à l’époque contemporaine un héritage qui remonte à Athènes dans l’Antiquité.
La famille royale
Comme nous l’avons remarqué plus haut, l’institution d’une monarchie dans la Grèce moderne implique une ambiguïté inévitable. La monarchie pouvait signifier la stabilité et la reconnaissance internationale (l’objectif du Protocole de Londres), mais comme les deux rois Otho et Georges Ier, « Roi des Hellènes » (qui a régné de 1863 à 1913 et fondé une lignée royale qui s’est prolongée jusqu’en 1974), étaient issus de familles royales européennes et non grecques au sens propre, ils n’ont jamais pu personnifier l’idée de la nation grecque à la manière des monarchies constitutionnelles de l’Europe moderne. Cette ambiguïté est reflétée dans les timbres, non par ce qu’ils montrent, mais par ce qu’ils ne montrent pas. Il est un fait remarquable, par exemple, que les rois Otho (qui a régné jusqu’en 1862), Georges Ier, Constantin Ier (1913-1917 et 1920-1922) et Alexandre (1917-1920) n’apparaissent sur aucun timbre grec de leur vivant. La première référence à la monarchie grecque dans les émissions postales ne se trouve pas sur le dessin d’un timbre, mais en surimpression (dont je n’ai malheureusement aucun échantillon), marquant la révolution de 1922 et la restauration de la monarchie sous Georges II. Cette restauration a été de courte durée et a mené à la Première République (mentionnée ci-dessus). Quand la monarchie a été restaurée en 1935, la restauration n’a été marquée que par une surimpression dans les émissions postales ordinaires. Une partie de la sémiotique postale sous Georges II contient une référence à la monarchie, non par la représentation de Georges II lui-même, mais par référence au statut historique de la monarchie. Ainsi, un portrait émis en 1936 marque le ré-enterrement du roi Constantin et de la reine Sophia, alors qu’une statue équestre de 1938 (ill. 25) représente le roi Constantin déjà décédé. Georges II, cependant, a été le premier roi grec à apparaître sur un timbre de son vivant, et un seul dessin (plutôt que trois timbres distincts, ce qui aurait été possible) représente trois périodes de son règne. L’illustration 26 est une simple représentation iconique, datant de 1937, de la Grèce et de la monarchie. À la suite du départ du roi et de son entourage pour la Crète en 1941, et ultérieurement pour l’Angleterre, un plébiscite du 1er septembre 1946 a restauré la monarchie : cette restauration est marquée par un sous-entendu dramatique – presque un silence – par la surimpression (ill. 27). Cette combinaison de la précédente émission représentant le roi Georges II et de la surimpression juxtapose deux images (une icône et un symbole) qui, pris ensemble, signifient la continuité dans le changement. La date indique le plébiscite, mais l’utilisation d’un dessin de timbre de l’avant-guerre signifie la continuité du roi en tant qu’individu et de l’institution monarchique. Le symbolisme conventionnel du noir pour dénoter le deuil renvoie au décès de Georges II, comme le montre l’illustration 28 (1947).
Le roi Paul Ier a régné de 1947 à 1964, période pendant laquelle la Grèce a joui d’une relative stabilité et d’une prospérité croissante : c’est aussi la seule période pendant laquelle la monarchie est ouvertement célébrée par une émission postale. Une série de 1956, de nouveau émise en 1957, présente plusieurs portraits de la famille royale dans une variété de styles : un motif qui intègre un tableau au dessin global du timbre représente la famille royale avant Georges Ier (portrait de la reine Amalia, ill. 29), ou une approche plus objective d’une simple ressemblance iconique sur fond encadré pour la famille royale fondée par Georges Ier (portrait de la Reine Frédérica, ill. 30). La continuité du présent (sous le roi Paul Ier) et du passé (jusqu’à l’époque du roi Georges Ier, mais sans mentionner le Roi Otho) est représentée par une émission commémorative en 1963 (ill. 31).
La monarchie grecque a connu une fin abrupte peu de temps après cette phase de commémorations. Tout comme Constantin 1er avait été commémoré par Georges II avant qu’un portait de Georges n’apparaisse sur un timbre, une émission représentant un simple portrait du roi Paul Ier a été lancée deux mois après sa mort en 1964 (ill. 32). Un timbre tel que celui de l’illustration 33, émis en 1966 et représentant la princesse Alexia et ses parents, est lourd de signification : à la différence de la tradition des « rois décédés » des illustrations 25 et 32, l’illustration 33 comprend une représentation iconique d’une princesse à l’âge d’un an et qui, à son tour, symbolise la continuité de la monarchie dans l’avenir à travers celle de la famille royale. Cependant, il est ironique de constater que cette nouvelle approche dans la représentation de la royauté a été bien vite dépassée par l’arrivée au pouvoir de la junte militaire et l’abolition de la monarchie en 1974 : l’ancienne famille royale grecque n’est jamais reparue sur les timbres après cette date.
L’héritage de l’après-guerre
Le premier ministre choisi par Georges II en 1936, à la suite d’une période d’instabilité politique qui a vu la chute de la Première République – ses chefs sont partis en exil, et Georges lui-même est revenu en Grèce –, était un général royaliste de tendance fasciste, Ioannis Metaxas. Bien que Metaxas ait institué une période de loi martiale qui a duré jusqu’à sa mort en 1941, il n’a jamais collaboré avec les Puissances de l’Axe. L’armée grecque était incapable d’offrir une résistance efficace à l’invasion allemande d’avril 1941 et le pays a été par la suite divisé entre les forces d’occupation allemandes, italiennes et bulgares. Cependant, la position provocante adoptée par Metaxas avant sa mort et le départ de Georges II en 1941 ont permis, après la guerre, aux éléments de droite et de gauche de se prétendre héritiers légitimes de la résistance grecque. Pour la droite, la lutte contre l’invasion par les Puissances de l’Axe a naturellement débouché sur la guerre civile anticommuniste qui a suivi la Deuxième Guerre mondiale : les forces anticommunistes ont émergé victorieuses de cette guerre civile en 1950. Pour la gauche, le sens d’une trahison par une royauté ressentie comme insuffisamment dévouée à la démocratie, ainsi que le ressentiment engendré par l’aide britannique et américaine aux éléments anticommunistes (dont certains n’étaient pas suffisamment différenciés des éléments collaborateurs pendant la Deuxième Guerre mondiale) ont donné lieu à différentes interprétations de la période d’après-guerre. Certains échos de ces différentes opinions sur l’histoire se retrouvent dans le dessin des timbres postaux.
L’illustration 34 (émise en décembre 1945) représente l’association de la Grèce aux Puissances Alliées, à la fois par l’utilisation iconique du portait du président américain Roosevelt et par le symbolisme du cadre noir de deuil qui, dans ce cas, n’est pas en surimpression mais fait partie du dessin original. « La Victoire » émise en 1946 – et conservée au cours des années suivantes – commémore les campagnes militaires contre les Puissances de l’Axe dans un style qui rappelle fortement les émissions d’avant-guerre (voir ill. 35 représentant la résistance en Crète). Pendant la période chaotique de l’après-guerre, les dessins tels que ceux donnés en exemple dans l’illustration 36 (1949) apparaissent comme représentatifs des réfugiés et des orphelins, inévitables victimes de la guerre. Une référence spécifique – indiquée uniquement par le silence mais compréhensible dans le contexte de son époque – est faite à la menace d’enlèvement des orphelins grecs et d’autres enfants au-delà des frontières vers des pays communistes, afin de les endoctriner. Certains efforts pour enrayer cette menace étaient étroitement liés à la Reine Frédérica, qui a apporté une aide évidente au Fond de Bien-Être des Provinces du Nord, une charité dont « les principaux bénéficiaires étaient les orphelins et les familles menacés d’enlèvement » (Van der Kiste, 1994 : 177). La juxtaposition d’images montrant le regard d’enfants grecs tourné vers un paysage dévasté par la guerre et se perdant au loin sur une carte de la Grèce permet la représentation de propositions différentes. Si les enfants se trouvent hors de Grèce, leur regard tourné vers la carte symbolise un désir de retour au pays et représente la tragédie de la perte et de la séparation ; si les enfants se trouvent à l’intérieur de la Grèce, leur regard s’intègre à l’iconicité de la carte (qui ressemble à la Grèce) pour représenter l’État grec en tant que territoire d’origine et, par extension, en tant que force capable de maintenir la cohésion du peuple grec face à la diaspora involontaire. Ces interprétations ne font aucune référence à la menace communiste, mais en signifiant un concept de nation plus vaste et qui repousse le communisme au-delà de ses frontières, la proposition globale de cette série délimite une interprétation supplémentaire qui exclut le communisme du concept de la nation.
On retrouve des définitions nationales analogues dans l’illustration 37. La commémoration de la « Victoire » (en grec ΝΙΚΗ) contient des icônes représentant des soldats de différentes périodes ainsi qu’une figure symbolisant la victoire. Des symboles arbitraires sont utilisés pour dénoter le mot ΝΙΚΗ, ainsi qu’une date, pour laquelle aucune explication n’est donnée par le signe visuel. Cette date, cependant, marque un événement tout à fait spécifique : la fin de la guerre civile et la victoire des forces anticommunistes. En établissant une relation contextuelle entre cet événement et les soldats grecs à travers les âges, sur fond de représentation abstraite de la « Victoire », le concept national de combat est proposé de manière à exclure encore les éléments communistes grecs.
L’utilisation d’images de la période classique, en relation avec des images du présent qui représente une conception particulière de la Grèce, trouve un développement éclatant dans l’illustration 38, émise peu après l’arrivée au pouvoir du régime militaire en 1967. Le Phénix, symbole de renaissance dans la mythologie grecque, constitue le fond sur lequel apparaît la silhouette d’un soldat grec moderne. La date (21 avril) fait allusion à la prise du pouvoir par les colonels. Le timbre suggère que ce régime militaire représente la renaissance du pays.
Bien que la signification de la « renaissance » symbolisée par le Phénix ne soit jamais pleinement expliquée, sa représentation, par l’utilisation du symbolisme visuel de l’illustration 38, se trouve renforcée à un autre niveau de représentation, jusqu’ici peu souvent considéré en sémiotique postale : l’annulation postale. L’illustration 39, une lettre à destination d’outre-mer annulée le 2 janvier 1968, présente deux timbres ordinaires de l’époque : un timbre de la série « Art populaire » émis en 1966 et le portrait du roi Paul Ier émis en 1964, que nous connaissons déjà (ill. 32). Le choix de ces timbres appartenait jusqu’à un certain point à l’expéditeur de la lettre. L’annulation « avril 21, 1967 rebirth of the country » a été littéralement imprimée sur les images choisies par l’expéditeur. L’utilisation de l’anglais sur une lettre expédiée aux États-Unis indique clairement que le message s’adresse à un public international. L’association du dessin des timbres choisis par l’expéditeur et du message du gouvernement de l’époque soulève aussi une nouvelle interprétation : le gouvernement militaire (représenté par la « renaissance ») a remplacé toutes les administrations précédentes. La création de niveaux complexes dans l’imagerie par l’utilisation d’annulations postales – comme le montre l’illustration 39 – suggère un nouveau champ de recherches qui, malheureusement, dépasse les limites de cet article.
Notre dernier regard sur l’héritage de la période d’après-guerre met en contraste deux aspects de la Résistance grecque. Les illustrations 40-42 commémorent la libération de la Grèce en 1944, utilisant des images classiques (ill. 40 et 41) ainsi qu’une carte parsemée d’icônes et d’inscriptions verbales qui indiquent des batailles de la Deuxième Guerre mondiale (ill. 42). La période représentée par l’inscription va de 1944 (date de la Libération) jusqu’à l’émission du timbre. Ces timbres juxtaposent ainsi trois types de référence sémiotique : référence à l’Antiquité, aux événements de la Libération et à la période récente du gouvernement militaire. Bien que la Libération soit l’objet sémiotique primaire de cette émission, la méthode de présentation et l’utilisation d’un cadre temporel explicite produisent un système de référence plus complexe que celui indiqué par la référence évidente indiquée par le timbre. Le style de représentation sous le gouvernement Papandréou (de tendance gauchiste) se trouve en contraste direct, comme on peut le voir sur les illustrations 43-45, qui font partie d’une série de huit timbres. Les images classiques si souvent utilisées pendant le régime des colonels ont disparu, de même que toute référence à la guerre civile ou à la période allant de la Libération à nos jours. À leur place, le dessin se concentre plutôt sur le combat pour la Libération, et l’imagerie, tout en noir et blanc, est souvent plus violente et austère que celle trouvée dans les émissions de la « Victoire » qui sont sorties immédiatement après la guerre. Dans un sens, cette série rend la Libération aux libérateurs. Le présent est suffisamment indiqué par l’expression ΕΛΛΗΝΙΚΗ ΔΗΜΟΚΡΑΤΙΑ et par l’inscription conventionnelle de la date, tandis qu’il n’est fait aucune référence à l’Antiquité. Privée des associations complexes trouvées dans la série de 1969, l’émission commémorative de 1982 se concentre plus intensément sur son objet sémiotique primaire : on ne peut que se demander si ce choix de stratégies était en fait destiné à servir de réplique directe aux émissions lancées par le régime militaire.
Conclusion
Notre analyse se limite naturellement au traitement du timbre postal grec. Il existe de nombreux autres niveaux de semiosis que nous n’avons pas considérés : il y a beaucoup à dire au sujet des surimpressions et des annulations, au sujet des dessinateurs de timbres et des commissions qu’ils ont reçues, au sujet des conditions d’utilisation de certains timbres (par exemple, le contraste entre les timbres de haute valeur et ceux de valeur moindre), et au sujet d’autres thèmes qui n’ont pas été explorés dans cet article. Toutefois, cette étude a montré que l’usage systématique d’icônes, de représentations et de symboles en philatélie, associés à l’absence tout aussi significative d’autres images potentielles – ce que nous avons appelé « le silence dans l’image postale » –, constitue un code peircien capable d’exprimer les idées d’identité et de définition nationale avec une grande subtilité. À travers cette analyse, on constate que la représentation graphique du timbre-poste, utilisé par le public, envoyé à l’étranger et manipulé par un système postal administré par des agences contrôlées par l’État, devient non seulement un moyen de véhiculer des concepts idéologiques, mais aussi un moyen de contribuer à la réalité matérielle de la société dont il est issu. À travers des recherches semblables, il devient possible d’apprécier le timbre-poste en tant que partie intégrale de la semiosis contemporaine.
Parties annexes
Remerciements
L’auteur tient à remercier Claire Laudet, Manolis Sisamakis, Orla Lowry et Arthur et Vivian Kallen pour leurs précieuses informations. Il remercie également madame Théano Papazoglou Margaris, pour qui l’appréciation des timbres grecs faisait partie intégrale de l’amour de tout ce qui est grec.
Note biographique
Jeffrey L. Kallen
Jeffrey L. Kallen est professeur de linguistique et de phonétique à l’Université de Dublin, Trinity College. Il a une licence en Études folkloriques de l’Université de Western Washington (Fairhaven College) et une maîtrise en linguistique de l’Université de Washington. Sa recherche doctorale était fondée sur l’étude de la langue anglaise en Irlande (« Hiberno-English »), champ dans lequel il a dès lors beaucoup publié. Autrement, son enseignement et sa recherche traitent des domaines tels que la langue et l’ethnicité, l’acquisition de la langue, la sociologie des langues (surtout de l’irlandais), la dialectologie et l’analyse du discours qui comprend un rapport particulier avec les genres folkloriques.
Références bibliographiques
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