Recensions

L’intervention et le retrait de l’État. L’impact sur l’organisation gouvernementale d’André Gélinas, Sainte-Foy, Presses de l’Université Laval, 2002, 427 p.[Notice]

  • Carolle Simard

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  • Carolle Simard
    Université du Québec à Montréal

Dans L’intervention et le retrait de l’État, bientôt suivi d’un autre ouvrage intitulé L’administration centrale, et plus de 25 ans après la parution d’Organismes autonomes et centraux, André Gélinas dresse un portrait de l’évolution de l’appareil administratif dans les États modernes. Pour ce faire, il examine de manière détaillée les processus par lesquels les gouvernements ont transformé l’organisation gouvernementale. L’auteur prend prétexte de l’expansion et de la contraction de l’appareil étatique pour tenter de répondre à cette question : existe-t-il « un lien entre l’accroissement de l’intervention (et le retrait) de l’État et l’organisation de l’appareil administratif » ? (p. 57). Il s’intéresse plus particulièrement aux instances que sont les ministères, les appareils centraux et les organismes autonomes. L’ouvrage d’A. Gélinas est divisé en deux parties et comprend neuf chapitres ; les quatre premiers traitent de l’intervention étatique tandis que les cinq suivants abordent le retrait de l’État. On y trouve également 27 tableaux et 5 figures auxquels s’ajoute une bibliographie thématique. De manière à analyser l’ampleur du double phénomène étudié, l’auteur a recours à divers indicateurs, surtout d’ordre quantitatif. Commun aux deux parties du livre, le cadre d’analyse repose sur une série de justifications censées expliquer les fondements des interventions des États. Deux types de justification sont proposés, à savoir celles qui relèvent de l’environnement sociologique, politique et économique, et celles qui concernent plus particulièrement la logique étatique et administrative. Ainsi, lorsque les États décident de créer de nouvelles structures administratives ou encore consentent à les abolir, ils usent, nous dit l’auteur, de justifications générales, de justifications de finalité, de justifications instrumentales et de justifications stratégiques. Tout au long de l’ouvrage, sont étudiées tant les instances centrales (le Conseil des ministres) et les instances décentralisées (les ministères ou les organismes autonomes) que les instances déconcentrées (les bureaux locaux des ministères ou encore leurs directions et leurs services). Dans son examen, l’auteur porte un intérêt particulier à la situation du Québec tout en fournissant, ça et là, des données longitudinales sur d’autres États, notamment le Canada, le Royaume-Uni, les États-Unis et la France. Les périodes étudiées sont les suivantes : 1867-1959, 1960-1985, 1985-2000. Elles sont qualifiées respectivement de « période de non-interventionnisme étatique », de « période de l’intervention de l’État » et de « période du retrait de l’État » (p. 62). Sa démarche, qu’il veut la plus concrète possible, fait souvent appel à des données chiffrées dans le but d’illustrer l’évolution de l’organisation gouvernementale. D’inégale valeur, elles doivent parfois être considérées avec une certaine réserve. Elles présentent néanmoins un intérêt certain dans la mesure où, mises ensemble, ces données sont utiles pour qui veut dégager des tendances ou encore brosser un portrait évolutif de l’intervention gouvernementale. Très conscient des failles de sa démonstration, A. Gélinas met en cause les administrations publiques : il ne se gêne pas pour dénoncer le recours abusif de ces dernières au secret et aux zones d’opacité. Il critique également le peu de ressources investies par les différents gouvernements dans la collecte de données aussi essentielles que le nombre de personnes travaillant dans le secteur public au Québec. Il s’insurge enfin contre les typologies trop souvent boiteuses utilisées par Québec, entre autres en ce qui concerne le concept du Québec inc. L’auteur avoue même avoir dû compiler certaines des données répertoriées sur les directions centrales et les bureaux territoriaux des ministères du Québec à partir du bottin téléphonique : « C’est la seule source qui nous était accessible », précise-t-il (p. 395). L’ouvrage d’A. Gélinas sur l’organisation gouvernementale dépasse les cadres étroits de ce qu’il est maintenant convenu d’appeler la …