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Le projet de modification de la Loi sur les Indiens : l’éviction du vrai débat ?[Notice]

  • Sakina Masmoudi

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  • Sakina Masmoudi
    Maîtrise en droit international – politique internationale,
    Université du Québec à Montréal

La Loi sur les Indiens doit être modifiée. Telle est la conclusion du jugement rendu le 6 avril 2009 par la Cour d’appel de la Colombie-Britannique (CACB) dans l’affaire McIvor. Le jugement maintient que certaines dispositions de la Loi sur les Indiens sont inconstitutionnelles et qu’elles contreviennent au principe d’égalité énoncé par la Charte des droits et libertés parce la loi traite différemment les descendants de femmes autochtones ayant épousé des hommes non autochtones et les descendants d’hommes autochtones ayant épousé des femmes non autochtones. Le 2 juin 2009, le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien (MAINC) confirmait que le gouvernement fédéral ne porterait pas en appel cette décision et qu’en conformité avec l’ordre de la Cour il apportera les modifications législatives nécessaires à la Loi sur les Indiens (MAINC 2009). Le gouvernement du Canada propose une modification de l’article 6 de la Loi sur les Indiens qui accorderait le droit d’inscription à tout petit-enfant d’une Indienne : Cette modification aura des répercussions importantes sur les premières nations. Sur le plan démographique, les premières estimations du MAINC chiffrent entre 20 000 et 40 000 le total des nouvelles inscriptions qui en résulteraient, ce qui représente une augmentation entre 3 % à 5 % de la population indienne inscrite (MAINC 2009). Ces estimations ne tiennent pas compte des inscriptions supplémentaires que la modification engendrera à l’avenir, ni de la répartition des nouveaux inscrits vivant dans les réserves ou non, ni de l’impact sur l’appartenance aux bandes. Le gouvernement présuppose qu’étant donné que la majorité des futurs nouveaux inscrits vit à l’extérieur des réserves, l’impact direct sur les bandes sera limité en termes de demande en logements et en services. Comme le souligne l’organisme Femmes autochtones du Québec (FAQ), cette présomption rappelle celle que le gouvernement avait mise en oeuvre lors du projet de loi C-31 en 1985. Cette loi, qui venait modifier certaines dispositions discriminatoires de la Loi sur les Indiens, avait sous-estimé le nombre de nouveaux inscrits désirant vivre dans les réserves (FAQ 2009 : 5). Pour FAQ, le gouvernement doit reconnaître que les nouveaux inscrits en vertu de la Loi C-31 ont vécu à l’extérieur des réserves, non par choix, mais en raison de la limitation de leur droit de vivre dans la réserve à cause du manque de financement, du manque d’espace habitable et des règles parfois discriminatoires imposées par les collectivités en ce qui a trait à l’appartenance à la bande (FAQ 2009 : 6). Quant à l’impact sur les listes électorales, le gouvernement entrevoit qu’il sera sans doute plus important qu’en 1985, puisque les membres des premières nations vivant hors réserve ont désormais généralement le droit de vote lors des élections au conseil de bande (MAINC 2009). Bien que ces concepts soient distincts sur le plan de la définition juridique, la question de l’inscription des Indiens est étroitement liée aux critères d’admissibilité de l’appartenance à une bande établis par la Loi sur les Indiens, que ce soit pour les bandes dont les critères sont définis en vertu des règles de l’article 11 ou pour celles qui adoptent leur propre code d’appartenance en vertu de l’article 10 (Clatworthy 2006 : 7). En juillet 2006, l’APN estimait à 350 le nombre de bandes régies par les règles en vertu de l’article 11, et à 240 le nombre de bandes ayant établi leur propre code d’appartenance conformément à l’article 10 de la Loi sur les Indiens (APN 2008 : 28). Cependant, la modification à la loi proposée par le MAINC ne traite pas la problématique que soulève le refus potentiel des bandes d’intégrer ou de …

Parties annexes