Dossier « Kanesatake/Oka : vingt ans après »

Près de trois siècles de revendications territoriales[Notice]

  • Éric Chalifoux

Il était difficile de passer sous silence le vingtième anniversaire de ce que la grande majorité de la population du Québec connaît comme étant la « crise d’Oka » de 1990. Encore aujourd’hui, beaucoup s’interrogent sur l’origine des revendications des Mohawks de Kanesatake (toponyme officiellement adopté depuis 1986). Ensuite, Pierre Trudel fait un retour sur ce qui est survenu le 11 juillet 1990, jour où le caporal Marcel Lemay a perdu tragiquement la vie dans l’affrontement entre les insurgés autochtones et la Sûreté du Québec. À la lumière du rapport d’enquête du coroner Guy Gilbert, il propose un regard neuf sur ces événements. Dans le texte suivant, Josiane Loiselle-Boudreau présente un projet de mine de niobium qui est contesté, car il est situé sur des terres revendiquées par les Mohawks de Kanesatake. Cette contestation s’appuie sur des jugements récents qui spécifient l’obligation de consulter et d’accommoder les peuples autochtones lorsque des projets d’exploitation des ressources naturelles visent sur des terres qu’ils revendiquent. L’article d’Isabelle St-Amand nous présente la crise d’Oka à travers les récits de deux personnalités publiques et artistiques, l’une autochtone et l’autre non : Myra Cree et Yves Boisvert. L’auteure s’intéresse aux représentations de la crise véhiculées à partir de deux positions différentes. Nous terminons ce dossier en suggérant quelques pistes pour les personnes qui désirent approfondir leur connaissance de la crise d’Oka. Les ouvrages et documents audiovisuels proposés ici ont été publiés et produits entre 1990 et 2010. Il s’agit plutôt de titres choisis que d’une revue complète de la littérature sur la question. Selon toute vraisemblance, la crise d’Oka est de ces événements qui marquent l’imaginaire collectif : la plupart des gens se souviennent de leurs faits et gestes durant cette période. Durant le mois de juillet 1990, je participais à des fouilles archéologiques dans la région du cap Tourmente (près de Québec) avec une équipe du département d’anthropologie de l’Université de Montréal. Alors que s’élevaient les barricades et que des coups de feu s’échangeaient, nous étions en train de fouiller un village iroquoien. Issus de la grande famille linguistique iroquoienne – tout comme les Agniers (Mohawks) –, les Iroquoiens du Saint-Laurent étaient des agriculteurs qui occupaient et exploitaient les ressources des basses terres de la vallée du Saint-Laurent au début du xvie siècle. Rencontrés par Jacques Cartier en octobre 1535 dans le village d’Hochelaga sur l’île de Montréal, ils disparaîtront assez rapidement par la suite ou se fondront dans d’autres groupes, laissant ainsi à d’autres la possibilité d’occuper leurs anciens territoires. Contrairement aux Iroquoiens du Saint-Laurent, les Mohawks de Kanesatake sont toujours là pour faire valoir leurs droits. Création, par les Sulpiciens, de la mission de La Montagne située au pied du mont Royal (apparemment à peu près à l’angle des rues Sherbrooke et Atwater). Elle regroupe des Iroquois, des Hurons, des Algonquins et des membres de plusieurs autres nations, dont un certain nombre déjà installés sur place. En 1694, on comptait dans le village palissadé de La Montagne une cinquantaine de maisons amérindiennes et une quinzaine de maisons françaises. Afin d’éloigner les Amérindiens et de permettre ainsi à des colons français de cultiver les terres sur lesquelles ils sont établis, fermeture de la mission de La Montagne par les Sulpiciens et, pour la remplacer, ouverture de la mission du Sault-au-Récollet, sur le bord de la rivière des Prairies. En conséquence, les Amérindiens qui cultivaient des terres au pied du mont Royal déménagent, contre leur gré, au nord de l’île de Montréal (1696-1704). Concession de la seigneurie du Lac-des Deux-Montagnes aux Sulpiciens du Séminaire de Saint-Sulpice (Paris), par le Roi de France. Fermeture de …

Parties annexes