Comptes rendus

Metis and the Medecine Line. Creating a Border and Dividing a People, Michel Hogue. University of Regina Press, Régina, 2015, 328 pages[Notice]

  • Louis-Pascal Rousseau

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  • Louis-Pascal Rousseau
    Historien consultant, École nationale d’administration publique à Québec

Cet ouvrage porte sur l’histoire des communautés métisses des Plaines de l’Ouest, alors qu’est instaurée dans cette zone du continent la frontière canado-américaine et que s’accroissent les effets contraignants de cette dernière sur les populations locales au fil du xixe siècle et au début du xxe. Si elle n’est que théorique au départ, la frontière devient, au cours de cette période, une réalité administrative concrète qui amène ces populations à reconfigurer leur usage du territoire et même à modifier leurs appartenances identitaires dans de nouveaux cadres sociopolitiques. Comme l’auteur le rappelle en introduction, l’expression « Medecine Line » est utilisée par les groupes autochtones de l’époque pour désigner cette frontière et son pouvoir d’influence dans leur quotidien. Cet ouvrage propose ainsi une démarche en histoire ethnoculturelle, plaçant les communautés métisses – son objet d’étude – au confluent d’une analyse sur leur relation au territoire et sur leur manière de s’adapter aux cadres taxonomiques qui leur sont imposés par les gouvernements canadien et étasunien. Le spectre géographique de l’analyse s’articule sur la zone territoriale des Plaines qui chevauche le 49e parallèle, depuis la vallée de la rivière Rouge jusqu’aux Rocheuses. Le continuum temporel exploré dans cette étude, quant à lui, débute au tournant du xixe siècle – moment où la frontière est établie – pour se terminer vers 1920. L’ouvrage de Michel Hogue fait partie de ce courant historiographique qui cherche à apporter un éclairage sur le cheminement identitaire des groupes autochtones, en particulier celui des communautés métisses. Il se penche à la fois sur le processus de formation historique de ces communautés et sur la manière dont celles-ci sont catégorisées officiellement – ou non – par les instances gouvernementales à la fin du xixe siècle et au début du xxe. Au centre de la démonstration se situe l’idée que les Métis demeurent résilients en conservant leur cohésion, malgré l’imposition à leur endroit d’un cadre taxonomique qui ne leur est pas adapté. L’analyse se déroule en cinq chapitres. Le premier chapitre se penche sur la période allant du tournant du xixe siècle jusqu’au milieu de la décennie 1860, soit l’époque de la formation et de la croissance dans les Plaines des communautés métisses, lesquelles se concentrent principalement dans la vallée de la rivière Rouge et dans la région de Pembina, en plus de graviter dans les prairies adjacentes. Outre la matière contextuelle, ce chapitre revisite les jalons communs de l’historiographie sur les Métis. Il rappelle que les communautés métisses se développent le long de la frontière entre les États-Unis et la terre de Rupert, étant ainsi positionnées de manière avantageuse dans le jeu de concurrence entre les compagnies de fourrures des deux juridictions. À cette époque, est-il souligné, la frontière demeure fortement perméable et les communautés métisses tissent d’étroits réseaux de parenté de part et d’autre de celle-ci. Le deuxième chapitre explore la période de la fin de la décennie 1860 jusqu’au tout début de la décennie 1870, qui correspond à la fin de l’hégémonie de la traite des fourrures dans cette région du continent. À cette époque, les agents frontaliers tentent de rendre plus étanche la frontière entre les deux pays. Leurs tentatives de contrôle ont des effets toutefois limités, en raison des moyens de coercition encore modestes déployés par les gouvernements auprès des populations locales. Les communautés métisses conservent ainsi une grande mobilité transfrontalière, étant d’ailleurs encouragées dans leurs déplacements par les compagnies de fourrures. Le troisième chapitre se penche pour sa part sur le coeur de la décennie 1870, alors que les vastes troupeaux de bisons déclinent fortement et …