Éditorial

LA LITTÉRATIE COMMUNAUTAIRE : EXPLORER LES PRATIQUES DES ACTEURS INSTITUTIONNELS AU SEIN DES COMMUNAUTÉS ÉDUCATIVES[Notice]

  • Jean-Pierre Mercier et
  • Marie D. Martel

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  • Jean-Pierre Mercier
    Université du Québec à Montréal

  • Marie D. Martel
    Université de Montréal

Ce numéro thématique présente des travaux associés à la littératie communautaire, soit une forme de littératie qui est de plus en plus explorée et documentée. Plus de la moitié des articles réunis dans ce numéro, soit trois des cinq articles qui le composent, découlent d’un travail de recension de recherches empiriques. Les deux autres articles sont issus d’une enquête de terrain, soit une étude de cas et une recherche diagnostique et développement. Les personnes autrices réunies dans ce numéro ont pour but d’éclairer la littératie communautaire en contexte médiatique multimodal. La littératie est souvent conçue aujourd’hui comme une capacité qui intègre des dimensions informationnelle, médiatique, numérique, multimodale et sociale. C’est « la capacité d’une personne, d’un milieu et d’une collectivité à comprendre et à communiquer de l’information par le langage sur différents supports pour participer activement à la société dans différents contextes » (Lacelle et al., 2016). L’idée de capacité est ici comprise dans son acception éthique et se réfère aux possibilités et aux opportunités permettant à une personne ou à une collectivité de se développer. En ce sens, la littératie rejoint la perspective large du développement humain et de l’éducation tout au long de la vie, telle que promue par l’UNESCO (1997). Ainsi, la littératie dépasse les compétences individuelles de maîtrise du code écrit normé et du traitement de l’information. Elle inclut de telles compétences et, plus largement, elle peut être considérée comme faisant partie des pratiques sociales inséparables des contextes sociaux et culturels d’usage de l’écrit. On peut alors parler de littératie au pluriel, des pratiques de l’écrit (literacy practices) ou des littératies (literacies) (Barton et Hamilton, 1998; Bélisle, 2012; Papen, 2005; Street, 2003), mais aussi de la pluralité du rapport à l’écrit (Bélisle, 2006; Thériault et Bélisle, 2020). De surcroît, les littératies font désormais appel à des combinaisons de médias, notamment numériques, et de modalités. Elles font intervenir l’entourage, soit quelques personnes, soit un grand nombre de personnes. Elles impliquent des interactions sociales entre les personnes ou groupes et avec des instances. Elles engagent donc aussi des questions d’identité, de relations de pouvoir, d’accès aux ressources, et de rapports à (attitudes, habitudes, dispositions). Ces dimensions des littératies diffèrent et varient dans le temps d’une littératie à l’autre et d’une personne à l’autre, d’un groupe à l’autre, d’un contexte ou univers social à l’autre. Si les apprentissages associés à la littératie ont initialement été abordés comme une question individuelle, ceux-ci sont également envisagés aujourd’hui comme des enjeux de communauté à partir d’un nouvel objet d’étude : la littératie communautaire (Alvermann et Wilson, 2007; Gee, 2015; Pahl et Burnett, 2013; Ross et al., 2006; Rowsell et Pahl, 2015). Comme toute littératie, la littératie communautaire est définie comme une capacité. Dans plusieurs écrits et politiques publiques récentes, la littératie communautaire est entendue comme la capacité d’une collectivité à mobiliser une diversité d’intervenants, en un système éducatif collaboratif, autour de la personne apprenante (Beauregard et al., 2011; Larivée et Poncelet, 2014; Ross et al., 2006). La vision de la Politique de la réussite éducative, portée par les préoccupations de l’État québécois tant pour les jeunes que pour les adultes, rejoint l’approche de littératie communautaire, au sens où elle promeut des « milieux éducatifs inclusifs, centrés sur la réussite de toutes et de tous, soutenus par leur communauté, qui, ensemble, forment des citoyennes et des citoyens compétents, créatifs, responsables, ouverts à la diversité et pleinement engagés dans la vie sociale, culturelle et économique du Québec » (Ministère de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur [MEES], 2017, p. 23). Aussi, cette politique mise sur la …

Parties annexes