Dossier – Démocratie économique : un enjeu pour les entreprises… et pour les sciences socialesSpecial Feature – Economic democracy: A challenge for both firms and the social sciences

Démocratie économique : un enjeu pour les entreprises… et pour les sciences socialesIntroduction[Notice]

  • Thomas Lamarche et
  • Petia Koleva

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A l’occasion de deux journées d’étude en septembre et novembre 2012, les laboratoires Ladyss et ICT de l’université Paris-Diderot ont proposé quelques éléments d’une mise en perceptive pluridisciplinaire sur le thème « L’évolution du rôle sociétal de l’entreprise en Europe du xixe au xxie siècle » . Ces deux moments de travail se sont articulés l’un à partir de l’ESS, l’autre à propos de la responsabilité sociale de l’entreprise (RSE), de façon à mettre en discussion des voies tout à fait singulières, et de fait en rivalité, quant à leur légitimité et à leur capacité à traiter de « responsabilité globale » des entreprises dans la société, voire de démocratie dans les rapports de production. Plusieurs articles de ce court dossier en sont issus ; d’autres publications suivront. Ces manifestations se sont inscrites dans un programme de travail en économie visant à approfondir les réflexions sur les nouveaux modèles de développement qui caractérisent le capitalisme actuel afin d’en saisir des trajectoires de sortie de crise, donnant ainsi des outils pour comprendre les ruptures et essayant de penser à des modes alternatifs de développement qui allient démocratie et durabilité. D’un certain point de vue, cela rejoint les chantiers conceptuels que nombre d’acteurs chercheurs de l’économie sociale appellent de leurs voeux. Il s’agit de répondre à la communauté de chercheurs en sciences humaines et sociales, voire de la mobiliser. C’est ce que l’on retrouve au coeur de l’ouvrage de Jean-François Draperi, lorsqu’il pose des bases d’une théorie générale de l’ESS en réponse à la crise du capitalisme (Draperi, 2012) . Plus récemment encore, c’est ce qui est au centre du dossier coordonné par Danièle Demoustier pour la Recma (n° 325, juillet 2012) qui propose une nouvelle étape, en passant d’« une approche entrepreneuriale à une perspective institutionnaliste ». Ce qui est en jeu est conjointement le processus d’institutionnalisation, voire de réinstitutionnalisation de l’entreprise, et le traitement conjugué des dispositifs institutionnels (les règles) et de la production (i.e. notamment de nouveaux rapports de production et de consommation). On note d’ailleurs avec intérêt que ce programme converge avec nombre de travaux partant des questions posées par la RSE. C’est ce que l’on trouve dans les propositions portées par Olivier Favereau et Roger Baudouin (2012) à l’occasion du séminaire dit des Bernardins, qui vise à une extension de la définition de l’entreprise afin qu’elle englobe ses différents rôles sociaux. La lecture institutionnaliste de l’ESS passe notamment par un traitement de la particularité des structures productives. Il nous semble en effet que les réflexions sur les statuts ne suffisent pas à l’affaire : ces derniers sont réductibles en dernière instance aux rapports sociaux de production. D’où la question d’une entreprise a-capitaliste. C’est dans ce sens que la lecture institutionnaliste liant dynamiques des règles (formelles et informelles) et de production devrait nous permettre de progresser dans une meilleure représentation de l’ESS en tant que « modèles ». La contribution proposée par Catherine Bodet, Noémie de Grenier et Thomas Lamarche à propos de Coopaname, dans le présent dossier, qui s’appuie sur la notion de « modèles productifs » développée par Boyer et Freyssenet (2000), abonde dans ce sens, caractérisant l’articulation entre logique politique et logique économique. Ces articles sont issus d’une manifestation scientifique qui participe conjointement d’une problématique en histoire économique et en histoire des savoirs et des représentations dont l’objectif est de saisir l’entreprise en tant que fait sociétal, soumis à des interprétations et à des stratégies variables en fonction du contexte historique et territorial. Dans ce sens, Anna Pellegrino revient sur le rôle de l’associationnisme en partant de la Fraternité artisanale …

Parties annexes