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Réflexion sur le développement des services en matière de violence[Notice]

  • Marie-Luce Garceau

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  • Marie-Luce Garceau
    professeure, École de service social, Université Laurentienne

Depuis « Sensibiliser, décider, agir » (1994), premier colloque sur les agressions sexuelles en Ontario français, le développement des services en français (SEF) en matière de violence contre les femmes a suivi un chemin tortueux, parsemé d’embûches, mais aussi de certains gains. En 2004, Action ontarienne contre la violence faite aux femmes (AOcVF) souhaitait en dresser un bilan grâce à la réflexion menée autour d’une recherche. Cette réflexion n’est pas récente. Fruit de la concertation et d’un travail collectif, tout particulièrement dans les centres d’aide et de lutte contre l’agression à caractère sexuel (Calacs) et dans les maisons d’hébergement pour femmes victimes de violence conjugale, elle a été enrichie plus récemment par les organismes partenaires d’AOcVF : la Fédération de la jeunesse franco-ontarienne (FESFO), le Mouvement ontarien des femmes immigrantes francophones (MOFIF), le Centre ontarien de prévention des agressions (COPA) et OPALE (regroupement de femmes francophones handicapées de Prescott-Russell). Tous ces organismes souhaitent la mise en place et l’épanouissement d’un réseau complet de SEF en matière de violence contre les femmes, géré par et pour les femmes francophones de l’Ontario. D’ailleurs, c’est un des grands principes confirmés lors des États généraux de novembre 2004 pendant lesquels cent cinquante personnes provenant des mêmes organismes ont entériné les résultats et les conclusions du bilan. Bref, tous ont validé la réflexion. La présente réflexion s’ouvre sur la définition de la violence et, comme le développement des SEF en matière de violence contre les femmes s’est fait sous le sceau de l’approche féministe, nous en verrons quelques principes. Par la suite, nous présenterons un bref historique des SEF, leurs services et leurs clientèles. Le financement étant le moteur des SEF, nous en ferons une courte analyse, puis, nous terminerons en présentant les recommandations des organismes en vue d’obtenir un réseau complet de SEF à la grandeur de l’Ontario. Les SEF ont adopté la définition suivante de la violence : Cette définition englobe, « sans y être limitée », toutes les formes de violence physique, sexuelle et psychologique exercées au sein de la famille, les enfants inclus (par ex. : la violence liée à la dot, le viol conjugal, les mutilations génitales et autres pratiques traditionnelles préjudiciables, la violence non conjugale et la violence liée à l’exploitation). Elle englobe aussi toutes les formes de violence exercées au sein de la collectivité, y compris le viol, les sévices sexuels, le harcèlement sexuel et l’intimidation au travail, dans les établissements d’enseignement et ailleurs, le proxénétisme et la prostitution forcée. Finalement, elle touche aussi les violences perpétrées ou tolérées par l’État dans lequel elles s’exercent. En plus d’adopter cette définition, les Centres d’aide et de lutte contre les agressions à caractère sexuel (Calacs) et les maisons d’hébergement ont toujours utilisé l’approche et l’analyse féministes comme moyen privilégié d’intervention. Nous pouvons les résumer de la façon suivante : Adopter une telle approche pose la question de la philosophie et des valeurs communes aux maisons d’hébergement et aux Calacs de l’Ontario français. En fait, historiquement, la plupart des services ont été mis en place en réaction à l’incapacité ou en l’absence des services institutionnels aptes à servir les femmes violentées. Ce sont des services communautaires ayant une mission particulière qui, pour les raisons suivantes, les distingue des organismes institutionnels : Au-delà de fournir des services de première ligne aux femmes victimes de violence, les Calacs et les maisons d’hébergement font figure de phare dans leur communauté. Leur rôle demeure vital, à la lumière de la souffrance et de l’exploitation que les femmes et les enfants ont à vivre tous les jours. Ce rôle est d’autant plus important que les femmes …

Parties annexes