Entrevue

Militer pour l’accès des personnes à mobilité réduite dans les MaritimesEntrevue avec Daniel Savoie[Notice]

  • Isabelle Côté

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  • Cette entrevue a été réalisée le 19 août 2017 et rédigée par
    Isabelle Côté

Entrevue avec Daniel Savoie, militant acadien, Professeur retraité, Université du Nouveau-Brunswick

D. Savoie : Tout a débuté en 1988 lorsque j’ai eu un accident de voiture qui m’a laissé paraplégique. J’ai immédiatement découvert toutes les barrières et tous les défis qui s’imposent aux personnes à mobilité réduite, car j’étais moi-même confronté à ces difficultés. À l’époque, je venais tout juste de terminer ma deuxième année universitaire en soins infirmiers et automatiquement la question a été : est-ce qu’il est capable de terminer son baccalauréat en fauteuil roulant au département des sciences infirmières de l’Université de Moncton? C’était du jamais vu pour eux; ils n’avaient jamais vu un infirmier en fauteuil roulant à l’hôpital auparavant. Habituellement, les gens changent de domaine ou de carrière. Pour une raison ou pour une autre, mes professeurs à l’Université et la doyenne de l’École des sciences infirmières ont approché l’Association des infirmières et infirmiers du Nouveau-Brunswick. Ils auraient eu une longue discussion et ils m’ont finalement permis de continuer mes études. J’ai quand même été chanceux parce que j’étais anciennement militaire. Donc, j’étudiais par l’entremise du Programme de formation des officiers de la Force régulière des Forces canadiennes, ce qui me permettait de payer ma scolarité, les livres, etc. Suite à mon accident, j’ai obtenu une assurance invalidité prolongée, et cette assurance m’a permis de payer mes cours. Étant donné que j’étais en fauteuil roulant, j’avais besoin de one-on-one avec des professeurs, d’où l’importance du support. J’avais non seulement le support de mes professeurs pour pouvoir poursuivre mes études ainsi que le désir de lever les barrières et d’affronter les défis, mais j’avais également le support financier qui me permettait de me payer un professeur one-on-one. Donc, j’ai poursuivi mon baccalauréat en fauteuil roulant. J’ai fait tous mes cours de troisième année, mais ces cours étaient surtout axés sur la santé mentale, l’obstétrique, etc. En quatrième année, quand est venu le temps d’entamer mes stages en chirurgie médicale, c’était le fun, car ils ont adapté mon programme. J’ai donc eu l’opportunité d’aller travailler en réadaptation et puis, pour moi, ça a été le début de mon militantisme. D. Savoie : Le militantisme a débuté lorsque j’ai eu l’opportunité de travailler dans un département de réadaptation où les gens avaient besoin d’aide. Au fil des années, j’ai rencontré énormément de personnes. Certaines d’entre elles étaient davantage fortunées et, comme moi, avaient eu accès soit à l’éducation, soit à des ressources financières, soit à une forme ou une autre de soutien social. Par contre, plusieurs autres n’avaient accès à rien ou avaient accès à peu de ressources. Donc, ce sont ces gens-là qui avaient le plus besoin d’aide, car ils avaient des difficultés à vocaliser ou à nommer leurs besoins ou encore à trouver des moyens pour franchir les barrières qui se dressaient devant eux. Certains d’entre eux sont nés avec un handicap et ont toujours été couvés par une mère poule qui s’occupait toujours d’eux et, donc, ils n’avaient jamais vraiment appris à se débrouiller par eux-mêmes. D’autres ont vécu le handicap à partir de l’adolescence ou de l’âge adulte et n’ont jamais eu un parent, un ami ou un professionnel qui s’est vraiment occupé d’eux ou qui leur a montré ou indiqué comment se débrouiller par eux-mêmes. Vous savez, il y a des choses que l’on apprend dès notre jeune âge. Quand un défi ou une difficulté nous tombe sur la tête et qu’on trouve ça lourd, soit qu’on affronte le problème ou qu’on évite le problème : fight or flight. Ceux qui affrontent le problème vont utiliser tous les moyens appris au cours de leur vie afin de gérer ou de s’adapter à …