Lu pour vous

LAMOUREUX, Diane, et Francis DUPUIS-DÉRI (dirs.) (2016). Au nom de la sécurité! Criminalisation de la contestation et pathologisation des marges, Québec, M Éditeur, 191 p.[Notice]

  • Martine Lanthier

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  • Martine Lanthier
    Étudiante en service social, Université Laurentienne

L’ouvrage collectif Au nom de la sécurité! Criminalisation de la contestation et pathologisation des marges rassemble les écrits de treize auteures et auteurs. L’ouvrage est issu d’un colloque qui a eu lieu à l’Université du Québec à Montréal en mars 2014. Deux phénomènes ayant retenu l’attention des auteures et auteurs lors du colloque y sont représentés. L’ouvrage comporte deux parties. La première pose un regard attentif sur la criminalisation de la contestation en apportant des exemples concrets d’événements qui se sont déroulés au cours de l’histoire canadienne. La deuxième se penche sur le phénomène de la pathologisation des marges et porte une attention particulière à la façon dont les élites politiques ou économiques « gèrent » la société, plus précisément les gens en marge qui résistent ou dévient de sa norme. La première partie de l’ouvrage s’ouvre sur un chapitre qui parcourt les liens entre la protestation étudiante de 2012 au Québec et l’arène judiciaire. Dans ce chapitre, Dufour explore la grève étudiante afin d’expliquer ce qui survient après une manifestation, c’est-à-dire lorsque les militantes et militants ont formellement été accusés et sont entrés dans un processus judiciaire. Son texte présente les résultats d’une recherche menée auprès de quatre collectifs de manifestantes et manifestants arrêtés au printemps 2012. L’auteure organise ses écrits en deux parties. Dans la première partie, elle fournit les données recueillies selon les types de droit mobilisés durant la période de manifestation étudiante et toute l’ampleur du phénomène de judiciarisation. Selon les dires de l’auteure, « c’est la première fois en 2012 qu’un conflit social est à ce point sous tension juridique au Québec » (p. 19). Afin de démontrer l’ampleur des arrestations, l’auteure insère dans son texte des tableaux construits à partir des données recueillies. C’est à Gatineau qu’il y a eu le plus d’arrestations en vertu du Code criminel, et l’arrestation de masse a été la technique de répression policière favorisée à Montréal, Québec, Gatineau et Victoriaville. Le type d’arrestation a un impact considérable sur la façon dont se déroule le processus judiciaire, et c’est ce que l’auteure démontre dans la deuxième partie du chapitre. À cet effet, Dufour partage les résultats préliminaires des entrevues concernant les conséquences de l’arène judiciaire sur l’action collective : « pour les militantEs, poursuivre la lutte dans l’arène judiciaire n’est pas un choix, mais davantage une obligation de «posture militante», afin de défendre le droit à la contestation politique dans une société démocratique » (p. 32). Elle présente six changements ressortis lors de ses entrevues, changements qui peuvent survenir après l’entrée dans l’arène judiciaire, c’est-à-dire à partir de la réception de la contravention jusqu’au procès lui-même ou jusqu’à l’abandon des poursuites. « Quel a été le rôle de la législation d’exception dans ce processus de délégitimation de la grève comme pratique démocratique et émancipatrice? » (p. 40). C’est à cette question que tentent de répondre Petitclerc et Robert, les auteurs de ce chapitre. En premier lieu, ils avancent que les lois spéciales ont une place bien particulière dans l’histoire canadienne et qu’elles ont évolué au fil des ans. Les auteurs dressent un bref historique des différentes grèves québécoises et des lois qui s’y rattachent, par exemple la grève légale de 1967 qui regroupait les travailleurs de la Corporation des instituteurs et institutrices catholiques du Québec (CICQ) et la loi 25, ainsi que la grève générale de 1972 du premier Front commun dans le secteur public et parapublic et le projet de loi 19. La toute première loi spéciale remonte à 1950; elle avait été créée dans le but de mettre fin à une grève dans le transport ferroviaire. …