Comptes rendus

Centre de documentation sur l’éducation des adultes et la condition féminine (dir.)Femmes et médias à travers le monde pour le changement social. Montréal, WomenAction 2000 et Les éditions du remue-ménage, 2001, 170 p.[Notice]

  • Estelle Lebel

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  • Estelle Lebel
    Département d’information et de communication
    Université Laval

La mondialisation et les technologies de l’information et de la communication (TIC) permettent désormais de diffuser des données jusque dans des régions et des milieux sociaux autrefois difficiles d’accès. Cependant, l’organisation des circuits et les intérêts financiers entraînent la diffusion des mêmes informations dans la presse imprimée, radiophonique, télévisuelle et informatique. Le choix de ces informations reflète le plus souvent les intérêts de leurs propriétaires au détriment de l’équité et de la justice sociale. Partout dans le monde, ceux et celles qui font l’objet d’exclusion économique raciale ou autre sont généralement exclus des moyens de communication. Notamment pour ces raisons, à Beijing, en 1995, à l’occasion de la Quatrième Conférence mondiale sur les femmes, on avait tenu à inclure les médias parmi les champs d’action prioritaires. Cet ouvrage présente les progrès accomplis en matière d’appropriation des médias par les femmes engagées dans des Organisations non gouvernementales (ONG) depuis cette conférence. Il se divise en trois grandes parties dont la première décrit le rapport mondial des ONG par régions selon le découpage de l’Organisation des Nations Unies (ONU) (Afrique, Asie-Pacifique, monde arabe, Amérique latine-Caraïbe et Europe-Amérique du Nord). On expose ensuite une sélection des meilleures pratiques dans le monde et, pour terminer, on effectue une évaluation parallèle pour servir de document de lobby dans le processus onusien. L’évaluation des progrès accomplis dans toutes les régions du monde représentait une tâche complexe de par la diversité des actions, des cultures et des langues ; pour obtenir l’information nécessaire, les représentantes des ONG ont dû mettre au point un réseau de communication de grande envergure ; ce réseau et cette action, elles les ont nommés : « WomenAction 2000 ». La coordination a été confiée au Centre de documentation sur l’éducation des adultes et la condition féminine (CDEACF) de Montréal dirigé par Sharon Hackett, qui signe le chapitre d’introduction. En soi, WomenAction 2000 est un exemple peu commun d’efficacité solidaire, à l’instar de l’organisation de la Marche mondiale des femmes. Bien que les discours introductifs apparaissent parfois triomphalistes sur le rôle potentiel des médias, notamment d’Internet « pour faire avancer l’avènement d’un ordre plus juste et équitable entre les genres » (p. 15), le constat est évident. Peu de choses ont changé (p. 21) : Les TIC ont eu des conséquences négatives tout autant que positives sur les organisations et les réseaux : « Au fur et à mesure qu’un plus grand nombre de femmes se réunissent pour élaborer des stratégies pour changer les choses, les choses deviennent de plus en plus difficiles à changer » (p. 23). Et pour cause, la propriété des médias et le niveau de concentration médias-industries résultant de la convergence des TIC avec les médias traditionnels soulèvent la question du contrôle dans de nombreux pays. La mondialisation et la monopolisation des médias rendent difficile la responsabilisation, alors que des conglomérats régionaux et internationaux achètent et vendent des fréquences nationales de diffusion, la presse écrite, des programmes de télévision, de câblodistribution et des films tout en ayant peu ou pas de comptes à rendre ni aux gouvernements ni à la société civile. L’ensemble de l’ouvrage montre le rôle important que jouent les médias alternatifs en construisant des ponts entre les secteurs dominants et informels et en faisant connaître des préoccupations non soulevées par les autres. L’approche pragmatique est fondée sur cette idée que les grands médias ne parlent pas des préoccupations des femmes et véhiculent des préjugés sexistes qui leur nuisent ; une Africaine remarque justement que la mondialisation permet aux multinationales d’être reçues dans les parties du monde les plus reculées pour peu qu’il y ait un minimum …