Comptes rendus

Sonia Dayan-Herzbrun Femmes et politique au Moyen-Orient. Paris, L’Harmattan, Collection « Bibliothèque du féminisme », 2005, 157 p.[Notice]

  • Muriel Gomez-Perez

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  • Muriel Gomez-Perez
    Université Laval

Cet ouvrage regroupe huit articles, préalablement publiés dans des revues ou dans un ouvrage collectif, tous rédigés par Sonia Dayan-Herzbrun, professeure de sociologie à l’université Paris VII Denis-Diderot et directrice du Centre de sociologie des pratiques et des représentations politiques. Ce choix est un des axes de la collection « Bibliothèque du féminisme » qui opte pour la réédition de textes ayant inspiré la réflexion féministe et le redéploiement des sciences sociales. Dans l’introduction, Dayan-Herzbrun se fixe pour objectif de « contribuer à une analyse féministe des phénomènes politiques dans le monde arabophone contemporain » (p. 7), en tenant, d’une part, à « historiciser » les rapports de domination des hommes sur les femmes et, d’autre part, à les « sociologiser ». Dans cette perspective, l’analyse des mouvements de libération nationale constitue la base de la réflexion de l’ouvrage qui adopte comme approche la participation des femmes. Ce militantisme est considéré comme étant à l’origine du féminisme. On peut, de ce fait, regretter que l’introduction ne soit pas une synthèse de la question dans l’ensemble du Moyen-Orient, dans la mesure où l’analyse est centrée sur deux pays, soit l’Égypte et la Palestine. Il n’en demeure pas moins que son propos est intéressant, car, en exposant les différentes phases du nationalisme arabe au XIXe siècle, l’auteure souligne le fait que la mobilisation est menée par des femmes au statut social privilégié qui activent les réseaux économiques et familiaux du harem. Ainsi, l’auteure prend le contre-pied des visions orientalistes qui décrivaient les femmes du harem comme lascives, indolentes et passives. On aurait pu aussi s’attendre que l’auteure ne parle pas seulement de Huda Sharawi, dirigeante du mouvement féministe égyptien, objet du premier article, mais d’autres femmes avec un équilibre sur les destinées du féminisme en Égypte et en Palestine. En effet, l’auteure met l’accent uniquement sur la persécution des féministes durant les années 50 en Égypte, alors qu’elle souligne la structuration du mouvement féministe dans le mouvement national palestinien au cours des années 50 et 60 de même que son évolution lors de la première et de la seconde intifada. Les articles sont courts, faciles d’accès et utiles pour un large public militant qui s’intéresse au débat politique autour du féminisme, ce qui explique la référence, la plupart du temps, à des écrits aisément consultables et le nombre limité de notes en bas de page. Alors que l’auteure remercie « toutes celles et tous ceux qui [lui] ont ouvert leur maison, ont partagé avec [elle] des moments de leur vie et ont répondu sans impatience ni lassitude à [ses] multiples questions », les propos des personnes interrogées sont très peu mis en évidence et rarement référencés, ce qui minimise le travail de recherche sur le terrain de l’auteure et conduit à des développements parfois trop globalisants. Pourtant, Sonia Dayan-Herzbrun, dès l’introduction, refuse « toute essentialisation des femmes, et surtout ce mode pernicieux, voire pervers d’essentialisation qui les transforme en un groupe homogène de victimes » (p. 22). Le premier article sur l’itinéraire de Huda Sharawi, de son enfance dans le harem à sa lutte féministe de 1923 jusqu’à sa mort en 1947, et les troisième, quatrième et cinquième articles sur les Palestiniennes traitent bien de la place des femmes dans la politique dans un contexte de lutte nationale. Dans le premier cas, en se basant sur l’autobiographie de Sharawi, l’auteure souligne en effet que le féminisme égyptien est un processus complexe qui fait la synthèse de plusieurs réalités socioculturelles. Prenant sa source dans des milieux sociaux privilégiés et européanisés, le combat des femmes dans la revendication nationale fait la synthèse des …