Comptes rendus

Lori Saint-Martin, Postures viriles : ce que dit la presse masculine., Montréal, Les éditions du remue-ménage, 2011, 183 p.[Notice]

  • Marie-José Des Rivières

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  • Marie-José Des Rivières
    Université Laval

Si l'on a passablement étudié la presse féminine, la presse masculine n'a fait l'objet que de très peu de recherches jusqu'à maintenant. Lori Saint-Martin a voulu « comprendre comment la presse masculine voit le monde, savoir ce qu'elle propose comme univers, de quelle manière elle intervient » (p. 7) dans la société et dans la construction des imaginaires. « L'auteure a décidé de traiter des magazines qui s'adressent de façon privilégiée aux hommes » (p. 8) en se demandant si la presse masculine est « le reflet inversé de la presse féminine » (p. 8) ou si elle dit, fait autre chose. Comment cette presse parle-t-elle aux hommes, que leur suggère-t-elle « par ses images et ses mots » (p. 8)? L'hypothèse de la chercheuse est que les magazines masculins pensent, disent, créent des identités sexuelles : le masculin plus explicitement, le féminin par opposition (p. 8). De plus, la presse masculine met le genre « en scène […] mais rarement en question » (p. 9). L'auteure observera les magazines « comme un lieu où le genre se performe, se naturalise, essaie de se faire oublier tout en se donnant à regarder de façon exceptionnelle » (p. 14), un peu comme le font les études sur la presse féminine qui explorent la façon dont celle-ci « construit les identités sexuées » (p. 14). La recherche de Lori Saint-Martin étudie trois magazines actuels : les deux premiers, Homme et Summum, visent une clientèle masculine hétérosexuelle; le troisième, Summum Girl, est en quelque sorte le prolongement de Summum. L’auteure s’attache « aux multiples dimensions de la façon dont ces magazines représentent les identités masculine et féminine ainsi que les rapports entre elles » (p. 8). Pour analyser ces publications, l'attention de l'auteure se portera sur les images, puis sur les textes. L'inventaire des différentes rubriques et de leur contenu permettra de tracer un portrait de la masculinité et de la féminité, ainsi que des relations hommes-femmes qui se détachent de l'ensemble (p. 24). Le premier chapitre de l'ouvrage de Saint-Martin étudie le magazine Homme, lancé en avril 2009; l'analyse révèle une publication vouée à la défense de la masculinité de l'homme québécois, à sa préservation, à sa restauration, à sa glorification, avec un discours antiféministe, agressif, de survalorisation du masculin et de représentations d'une dépendance féminine (p. 64). Enfin, un discours sans distance critique, décroché du réel : « Les gestes donnés pour constitutifs du masculin sont par exemple la chasse à l'orignal ou le fait de piloter un avion, des actions qui relèvent d'un “idéal fantasmatique” et qui n'ont pas d'ancrage dans la réalité urbaine contemporaine » (p. 65). Le deuxième chapitre est consacré à Summum, qui propose avant tout « une posture, une manière d'affronter le monde » (p. 67). Adoptant un ton plus léger que le magazine Homme, Summum rassemble des articles sur les « sports, les sorties, la chasse aux animaux sauvages et aux filles ». Il présente les hommes comme des « bêtes heureuses » (p. 67) et les femmes, comme des « belles qui les attendent » (p. 67). Les hommes représentés sont acteurs, politiciens, chercheurs, musiciens ou athlètes et font figure d'autorité. Les femmes, pour leur part, sont « figées dans une éternelle beauté plastique », comme des poupées (p. 71). Les pages de couverture exposent en effet des « pinups » semi-nues, voluptueuses, assujetties et offertes, aux poses et aux effets convenus. Les sujets de prédilection de Summum sont les sports, la mort, les filles, les gadgets et les fêtes; le lectorat est jeune et on semble vouloir lui …