Comptes rendus

Maryse Rinfret-Raynor et autres (dir.), Violence envers les femmes. Réalités complexes et nouveaux enjeux dans un monde en transformation, Québec, Presses de l’Université du Québec, 2014, 330 p.[Notice]

  • Anne-Sophie Germain et
  • Tatiana Sanhueza Morales

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  • Anne-Sophie Germain
    Université Laval

  • Tatiana Sanhueza Morales
    Université Laval

Le phénomène de la violence envers les femmes demeure un problème social préoccupant alors qu’il fait de nombreuses victimes pour qui les conséquences sont dévastatrices. Étant donné les transformations sociales importantes des 40 dernières années, le phénomène tend à se complexifier et exige de la part des chercheuses et des chercheurs, des spécialistes et des personnes-ressources ainsi que des décideuses et des décideurs politiques de poursuivre les réflexions sur le sujet et d’adapter les réponses sociales aux réalités et aux besoins changeants des femmes aux prises avec cette problématique. C’est dans cette optique que s’est tenu à Montréal en 2011 un colloque international organisé par le Centre de recherche interdisciplinaire sur la violence familiale et la violence faite aux femmes (CRI-VIFF). L’ouvrage sous la direction de Maryse Rinfret-Raynor et autres regroupe certaines présentations effectuées lors de ce colloque. Il se divise en trois parties : la première a pour objet de rendre compte de nouvelles perspectives théoriques et de recherche; la deuxième s’attache à des contextes particuliers dans lesquels la violence survient; et la troisième s’intéresse aux réponses politiques, judiciaires et psychosociales aux violences faites aux femmes. Première partie : « Violence faites aux femmes. De nouvelles perspectives théoriques et de recherche » Dans les deux premiers chapitres de la première partie, les deux auteurs invitent les lectrices et les lecteurs à revoir leurs conceptions de la violence conjugale. Tout d’abord, Michael P. Johnson (p. 15-31) souligne l’importance de distinguer les différents types de violence conjugale. Selon lui, cette distinction est nécessaire pour éviter des erreurs méthodologiques en recherche et concevoir des interventions adaptées et efficaces. Le texte d’Evan Stark (p. 33-51), pour sa part, propose d’utiliser le modèle de contrôle coercitif, qui conçoit la violence conjugale dans sa dimension politique, c’est-à-dire en fonction des stratégies de subordination utilisées par les conjoints violents (par exemple, harcèlement, intimidation, isolement) et du désir sous-jacent de ceux-ci d’empêcher les femmes d’agir en toute liberté. De son côté, Floya Anthias (p. 55-75) ouvre la discussion sur les dimensions structurelles de la violence en discutant de la pertinence de la théorie intersectionnelle pour étudier des problèmes comme le viol et l’agression sexuelle, la violence conjugale, la violence commise au nom de l’honneur et la traite des personnes. Sa perspective théorique permet de rendre compte des formes de discrimination à l’endroit des femmes qui surviennent à la conjoncture de diverses dimensions sociales telles que la classe sociale, la race et l’ethnicité. Pour sa part, Élisabeth Harper (p. 77-98) propose de rallier l’approche intersectionnelle et les approches narratives dans les interventions en matière de violence conjugale. Une telle intervention permettrait de transformer les narratifs sociaux au sujet de la violence conjugale, de la race et de l’ethnicité, qui ont tendance à stigmatiser les femmes et à limiter leur accès à des services appropriés. Poursuivant sur la question culturelle, Daniel Weinstock (p. 99-113) pose le débat autour des valeurs (respect de la diversité culturelle/intérêts fondamentaux des femmes) qui divisent les multiculturalistes progressistes et les féministes. Selon lui, c’est la vision statique et conservatrice du multiculturalisme qui augmente la vulnérabilité des femmes, alors que cette perspective ne considère pas les femmes comme des agentes de changements culturels. Les deux chapitres suivants s’attachent à l’examen des facteurs de risque auxquels les recherches pourraient accorder davantage d’attention. S’appuyant sur les données de l’Enquête sociale générale (ESG) de 2009, réalisée par Statistique Canada, Frédéric Ouellet et Marie-Marthe Cousineau (p. 117-134) montrent que les femmes plus jeunes, les femmes mariées, de même que celles qui rapportent une incapacité physique ou mentale ou la prise de certains médicaments, seraient plus à risque en matière …