Comptes rendus

La CORPS féministe, Corps Accord. Guide de sexualité positive, Montréal, Les éditions du remue-ménage, 2019, 181 p.[Notice]

  • Stéphanie Mayer

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  • Stéphanie Mayer
    Université d’Ottawa

La Collective pour un ouvrage de référence participatif sur la santé féministe (la CORPS féministe) propose en 2019, aux éditions du remue-ménage, une traduction et une adaptation francophone québécoise du livre Our Bodies, Ourselves (OBOS) publié pour la première fois en 1971 aux États-Unis. Cette encyclopédie s’est avérée un outil politique féministe révolutionnaire en ce qui concerne la santé globale des femmes et un succès de librairie : elle a été traduite dans 34 langues, vendue à plus de 4 millions d’exemplaires, rééditée huit fois. Porté par l’adage féministe « le personnel est politique », l’ouvrage OBOS constitue une référence incontournable; la plus récente édition, celle de 2011, aborde des thématiques diverses combinant les connaissances biomédicales, les savoirs tirés des expériences intimes des femmes et l’apport des critiques féministes sur les corps, les sexualités et la santé en général. La CORPS féministe – coordonnée par l’anthropologue Nesrine Bessaïh – a obtenu les droits pour la partie : « Relations intimes et sexualités ». À noter que la CORPS féministe a amorcé le travail pour publier d’autres sections de l’encyclopédie OBOS. Cet ouvrage très intéressant se présente selon la structure suivante : trois chapitres rassemblant différentes entrées bien documentées sur les thèmes des identités sexuelles des femmes, des pratiques intimes entourant les désirs sexuels et, enfin, des explications démystificatrices sur les obstacles divers aux plaisirs. Dans les premières pages, la partie « Préliminaires » (clin d’oeil à vous savez quoi) pose quelques éléments de contexte et de méthode, comme les précautions d’usage au sujet de la posture des membres de la CORPS féministe. On y emploie le terme « femme » pour désigner une catégorie sociale, un vécu partagé d’oppression et de discrimination (p. 13). Cependant, cette catégorie inclusive englobe un large spectre de la féminité qui comprend notamment « les femmes cis ou trans, des personnes non binaires ou mêmes des personnes assignées femmes à la naissance mais qui ne se reconnaissent pas dans cette désignation » (p. 13). Un souci particulier a été accordé au fait de ne pas homogénéiser l’expérience des femmes. On a d’ailleurs choisi d’éviter l’expression « nous les femmes » et de réserver l’usage du « nous » à la désignation des membres de la CORPS féministe (Bessaïh et Bogic 2016). Cette dernière préconise une conception non compartimentée de la santé qui suppose une interrelation entre les dimensions environnementales, sociales, psychologiques et biologiques dans la vie des femmes. Son approche globale en matière de santé repose sur la volonté d’une déconstruction des systèmes d’oppression, tels que le sexisme, le colonialisme, le racisme, l’hétéronormativité, le capacitisme ou la cisnormativité, tous des termes définis dans la section intitulée « Lexique ». L’ouvrage est ponctué d’interludes de témoignages sur des thèmes comme l’intimité, le poil, les agressions sexuelles, les désirs et les plaisirs, le projet parental et le vieillissement. Des listes de références complémentaires sont proposées dans des encadrés. Il faut insister sur le talent de l’illustratrice Marie Dauverné qui met en image le cycle menstruel, le clitoris et la vulve (représentés dans un miroir au bénéfice des moins acrobates), le développement embryonnaire ainsi que les organes sexuels typiques féminins et masculins. Ces planches constituent un matériel pédagogique fort utile pour n’importe quel public. Le premier chapitre, « Influences sociales et culturelles sur la sexualité » (p. 1977), offre une vue d’ensemble des enjeux sociétaux qui influent sur la construction identitaire et sexuelle des femmes. Il montre comment les sexualités et les désirs sont marqués par l’éducation sexuelle reçue, le corps médical, les effets du colonialisme, les médias, les normes religieuses, voire la pornographie. Le deuxième chapitre, « …

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