Comptes rendus

Manon Tremblay (dir.), Queering Representation: LGBTQ People and Electoral Politics in Canada, Vancouver, UBC Press, 2019, 372 p.[Notice]

  • Kyle Jackson

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  • Kyle Jackson
    Université du Vermont

L’ouvrage intitulé Queering Representation: LGBTQ People and Electoral Politics in Canada, dirigé par Manon Tremblay, se démarque comme le premier « qui traite de manière approfondie de la politique électorale et des personnes LGBTQ au Canada » (p. 32). Il se concentre sur la représentation politique des personnes de la communauté LGBTQ (principalement lesbiennes et gaies) au Canada à travers le prisme des politiques électorales, définies par Tremblay comme des « structures étatiques (institutions, acteurs, processus et activités) qui font de la représentation politique une réalité pratique » (p. 33). Alors que l’activisme du mouvement social LGBTQ n’est en aucun cas exclu de la large enquête contenue dans cette importante publication, « il n’est considéré que lorsqu’il contribue à la représentation politique telle qu’issue et incarnée par les structures étatiques » (p. 33). Les auteures et les auteurs soutiennent, en ayant recours à de multiples procédés qui renvoient à la diversité de leur enquête et de leurs méthodes (à la fois qualitatives et quantitatives), que « la représentation politique est importante pour les personnes et les communautés LGBTQ » (p. 33). Au sujet de la représentation LGBTQ en politique canadienne (fédérale, provinciale et, dans une moindre mesure, municipale), les chapitres abordent tour à tour les classiques « qui », « quoi », « où », « comment » et « quand »; tout l’ouvrage s’appuie sur de riches données empiriques pour proposer des théories exploratoires à propos de son importance, des facteurs qui lui sont défavorables et des réalisations qui lui sont, jusqu’à maintenant, rattachées. La représentation est appréhendée à travers les prismes interconnectés des expressions formalistes, descriptives (y compris symboliques) et substantielles : l’auteure examine les institutions, les identités et les intérêts liés à la représentation politique de la réalité LGBTQ. L’ouvrage se divise en deux parties : la première traite des électrices et des électeurs de la communauté LGBTQ (tout en tenant compte de l’électorat cisgenre et hétérosexuel, des politiciennes et des politiciens ayant affirmé leur réalité LGBTQ); la seconde est consacrée aux personnes LGBTQ élues. Les douze chapitres, ainsi que l’introduction  détaillée et la stimulante postface, expriment avec efficacité le projet de Manon Tremblay; ils comprennent des considérations sociales, culturelles, critiques et queers, de même que des méthodes interprétatives, inclusion étonnante compte tenu de l’approche centrée sur l’État et de la vision formelle de celui-ci. Un bon exemple est l’utilisation inédite faite par Tremblay des politiques de l’émotion (politics of emotion) pour parler de l’importance des élues et des élus de la communauté LGBTQ qui représentent des personnes qui en font partie. Cela dit, à d’autres moments, les auteures et les auteurs des douze chapitres auraient pu détailler davantage des idées critiques souvent seulement esquissées dans l’ouvrage, par exemple celles de l’intersectionnalité, de l’homonormativité et de l’homonationalisme. On aurait également pu confronter le puissant capitalisme (néolibéral) au contexte (néo)colonial de la représentation politique LGBTQ au Canada, ce dernier demeurant particulièrement invisible dans cet ouvrage, comme dans plusieurs autres. En ce sens, l’ouvrage Queering Representation apparaîtra à bien des lectrices et des lecteurs comme trop peu queer en ce qui a trait aux questions des identités et à celles qui touchent à l’intersectionnalité, à l’étendue du « sociopolitique » étudié, aux méthodes employées et aux politiques implicitement soutenues. Cela dit, ce collectif ouvre une voie absolument nécessaire à plusieurs égards et rend compte en effet de la représentation politique queer autant qu’on peut le faire dans la situation actuelle si l’on souhaite rester compréhensible dans le contexte des sciences politiques mainstream/malestream hétéronormatives (Tremblay, Paternotte et Johnson 2016 : 2). L’ouvrage sous la direction de Tremblay …

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