Résumés
Résumé
Lors de chacune des élections générales fédérales ou québécoises ayant mené à la formation d’un gouvernement minoritaire au cours de la dernière décennie, les médias se sont fait concurrence pour annoncer en primeur qui allait former le prochain gouvernement, et ce, avant même que l’un ou l’autre chef de parti se soit exprimé de quelque façon que ce soit sur les résultats des élections. Les médias ont pris la très fâcheuse habitude de remplacer l’ensemble du corpus de règles et principes constitutionnels applicables à la formation du gouvernement par l’application de la maxime simpliste suivante : « le parti politique ayant fait élire le plus grand nombre de députés a gagné les élections et a droit de former le prochain gouvernement ». Les médias présentent la chose comme s’il s’agissait d’un automatisme, d’une simple question d’arithmétique. Or, si cette heuristique ne cause pas de difficultés particulières lorsqu’un parti politique remporte une majorité de sièges, elle est tout à fait inadéquate pour décrire le droit et les conventions applicables en matière de formation du gouvernement dans notre système parlementaire. Cette heuristique est des plus problématiques lorsqu’aucun parti n’obtient une majorité de sièges lors d’élections générales. En réalité, comme la pratique parlementaire nous le démontre, lorsqu’aucun parti n’obtient une majorité de sièges, il n’est pas possible de déterminer qui formera le prochain gouvernement en nous fiant uniquement au nombre de sièges que l’un ou l’autre des partis a pu remporter. En effet, selon les principes de base, (a) le premier ministre sortant a le droit d’être le premier à tenter d’obtenir la confiance de l’assemblée législative au retour des élections générales, et (b) il est du devoir du gouverneur général (ou du lieutenant-gouverneur) de nommer le chef du(des) parti(s) le(s) plus susceptible(s) de jouir de la confiance de la chambre élue pour occuper le poste de premier ministre. Une méconnaissance populaire de l’ensemble des règles et principes applicables risque d’engendrer une importante crise de confiance dans nos institutions démocratiques. Cela est d’autant plus vrai si les acteurs politiques agissent conformément aux normes applicables, tout en allant à l’encontre de celles, erronées, publicisées par les médias. Cet article vise donc à expliciter les règles et principes constitutionnels canadiens applicables à la formation du gouvernement et à illustrer les différents facteurs constitutionnels devant entrer en ligne de compte en fonction des divers cas de figure possibles. Un aide-mémoire se trouve en annexe du texte de manière à faciliter la consultation de ces règles et principes applicables à ces diverses situations.
Mots-clés :
- Gouvernement,
- formation,
- Parlement,
- Constitution,
- conventions constitutionnelles,
- gouvernement minoritaire,
- gouvernement de coalition
Abstract
During the last decade, in Québec and elsewhere in Canada, the media have competed against one another to be the first to declare, on elections night, who would form the next government. Irrespective of whether they predicted that any political party would be able to obtain a majority of seats, they made their announcements within a few hours of the closing of the polls. In fact, their announcements systematically preceded any public statement by the leaders of the political parties involved. Indeed, media developed the unfortunate habit of substituting the entire set of constitutional rules and principles leading to the formation of government by a simplistic heuristic: “the political party that has won the largest number of seats has won the elections and has the right to form the next government.” Media present the issue as automatic, merely a matter of arithmetic. If this heuristic works well when a party has won a majority of seats, it is completely inadequate as a statement of the constitutional law and conventions related to the formation of government in our parliamentary system. This heuristic is most problematic when no party has won a majority of seats. In fact, as parliamentary practices demonstrate, knowledge of the number of seats that a party has won is not, in itself, sufficient to determine who will form the next government. Indeed, the fundamental principles of government formation are that (a) the incumbent Prime Minister (or Premier) has the right to be the first to seek the confidence of the newly elected legislative assembly, and (b) the Governor General (or Lieutenant Governor) has the duty to appoint the leader of the political party (or parties) most susceptible of commanding the confidence of the elected assembly to the position of Prime Minister (or Premier). Popular misunderstandings of the rules and principles leading to the formation of government may lead to a crisis of confidence in our democratic institutions. This is even more so if political actors adequately follow the proper constitutional rules, but act contrary to the erroneously stated rules by the media. This article thus aims at fleshing out the Canadian constitutional rules and principles applicable to government formation and at illustrating how constitutional considerations come into play in the variety of possible scenarios. A quick reference tool is appended to the text to facilitate consultations of the applicable rules and principles to those different fact situations.
Keywords:
- Government,
- formation,
- Parliament,
- Constitution,
- constitutional conventions,
- minority government,
- coalition government
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