TY - JOUR ID - 028336ar T1 - A New View of Leisure A1 - Ross, David JO - Relations industrielles / Industrial Relations VL - 27 IS - 4 SP - 746 EP - 756 SN - 0034-379X Y1 - 1972 Y2 - 28 mars 2024 14:42 PB - Département des relations industrielles de l'Université Laval LA - EN AB - The purpose of this paper is two-fold : first an attempt is mode to define work and leisure in operational terms. Second, using the new definitions of work and leisure, several problems in economies are re-examined and an attempt is mode to illustrate how the new definition may give us new insights into old and current problems. AB - Dans les manuels courants d'économique et en théorie, on considère le loisir comme synonyme du temps où l'on n'est pas en disponibilité sur le marché ou du temps où l'on n'est pas à son poste ; le travail est, de son côté, synonyme du temps où l'on est disponible pour travailler ou du temps où l'on occupe son poste. En théorie économique, la distinction entre le temps libre et le temps engagé est importante, surtout quand il s'agit d'analyser l'offre de travail et, tout particulièrement, d'examiner une courbe d'offre de travail renversée.Cet article vise un double but : d'abord essayer de définir la notion de travail et de loisir en termesopérationnels, c'est-à-dire en tant que phénomènes observables ; ensuite, chercher à réexaminer, à partir de définitions nouvelles du travail et du loisir, plusieurs problèmes qui se posent en économique et à tenter d'illustrer comment ces définitions nouvelles peuvent ouvrir des perspectives neuves à des questions anciennes et actuelles.NOUVELLES PERSPECTIVES EN MATIÈRE DE LOISIRSLa première constatation à laquelle on arrive, quand on essaie de rebâtir une définition du loisir, c'est qu'il n'y a guère d'activité qui soit travail pur ou loisir pur. De là, ce qui importe, c'est de découvrir une définition qui permette la catégorisation d'une activité selon qu'elle est plus ou moins empreinte de loisir.Au départ, nous affirmons qu'une activité est d'autant plus empreinte de loisir que la personne est moins gênée par la routine quotidienne et les contraintes de temps et d'espace.La routine : Par routine, nous voulons dire qu'il n'y a que peu de façons d'entreprendre et d'exercer une activité. Plus une activité laisse de choix, plus elle se rapproche de la notion de loisir.Le temps: Moins une activité est enfermée dans des limites de temps, plus on peut l'assimiler au loisir.L'espace: Moins une activité oblige à demeurer sur place, plus elle s'apparente au loisir.Plus une personne est en mesure d'exercer une activité sans se sentir contrainte par ses choix, dans ses mouvements dans le temps et dans l'espace, plus on considérera qu'elle dispose de loisir. Naturellement, il s'agit là d'une notion toute relative et le degré véritable de loisir pourra varier d'un individu à l'autre.QUELQUES APPLICATIONS PRATIQUES DE CETTE DÉFINITION NOUVELLEOn peut considérer trois applications pratiques qui montrent la portée des problèmes qu'on peut analyser en regard de cette définition nouvelle.a)Les taux différentiels de croissance du temps passé hors du travail. Si l'on estime la croissance du temps libre découlant d'une semaine de travail plus courte, de vacances plus longues, de jours fériés plus nombreux dans l'industrie manufacturière au Canada pour la période 1949-1969, on arrive à un résultat qui intrigue quelque peu. Au cours de cette période, les cols blancs ont bénéficié de 119 heures de plus de temps libre, tandis que les cols bleus en ont gagné 230. Cette constatation trouve une explication plausible si l'on se reporte à la nouvelle définition du loisir. On peut émettre l'hypothèse que, règle générale, dans l'industrie manufacturière, les cols blancs sont moins liés que les cols bleus à la routine ainsi qu'aux contraintes de temps et d'espace.b) Un autre domaine où nous pouvons appliquer cette nouvelle forme d'appréciation, c'est lorsqu'il est question de la théorie dufonds des salaires, qui remonte au moins jusqu'à Adam Smith, où l'on s'est rendu compte que c'est le « gain net » parmi diverses occupations qui détermine la répartition du travail entre les différents métiers ou professions. À partir de là, outre les motifs déterminants du « gain net » d'ordre purement pécuniaire, on a aussi découvert l'existence de motifs déterminants « psychiques » qui n'ont rien à voir avec l'argent.On peut donc soumettre ici que la part de loisir comprise dans un poste constitue une excellente source de motifs psychiques impondérables qu'on désigne souvent sous le nom de conditions favorables ou défavorables associées au travail. Plusieurs de ces conditions se retrouvent dans la routine et dans les contraintes de temps et d'espace. Même si le loisir, selon cette définition nouvelle, ne peut être encore estimé d'une façon précise, on peut le considérer comme un phénomène observable à qui on peut donner un rang ordinal dans une échelle graduée.c) La dernière application de la nouvelle définition du loisir est reliée au vieux problème de l'exactitude des comptes nationaux en tant que reflet du degré de bien-être social d'une collectivité. Une des principales faiblesses du produit national brut dont chacun peut se rendre compte, c'est qu'il ne révèle pas le temps libre qui est certainement un avantage et qui, en réalité, compense pour un revenu plus élevé quand nous le présentons sous la forme d'une courbe d'offre du travail renversée. Il n'y a guère de doute alors, si le produit national brut doit être considéré comme une mesure du bien-être, qu'il faille la corriger de manière à tenir compte de l'accroissement du temps consacré au loisir.Si l'on ne les observe que durant une période d'une durée restreinte, les avantages résultant du loisir associé au travail n'ont que peu d'importance et on pourrait à peine en percevoir le sens. Mais, considérés au cours d'une période plus longue, étant donné que des changements de structure significatifs se sont produits dansla composition de la main-d'oeuvre, il faudrait être très myope pour ne pas y déceler la possibilité des gains obtenus sous la forme du loisir associé au travail. Ainsi, au Canada, un des changements les plus frappants dans la structure de la main-d'oeuvre a été l'augmentation de l'emploi dans le secteur des services par rapport au secteur de la fabrication. Entre 1931 et 1969, l'emploi est tombé dans le secteur secondaire de 60 à un peu moins de 40 pour cent de l'emploi total, et le taux de changement ne semble pas être près de se ralentir. Quelles répercussions ces transformations ont-elles sur le bien-être ? En se fondant sur la nouvelle définition du loisir, on peut soutenir ici que cette croissance rapide de l'emploi dans le secteur des services s'est traduite par une augmentation du loisir associé au travail.Même s'il se trouve des exceptions, je crois qu'il est exact de dire que les travailleurs du secteur tertiaire sont censés, dans l'ensemble, disposer de plus de loisirs au cours de leur travail que ceux du secteur secondaire.Parce que ces emplois sont d'une nature plus intellectuelle, les travailleurs du secteur tertiaire peuvent au moins exécuter une part de leur besogne n'importe où et n'importe quand, et par conséquent, il devient de plus en plus difficile pour nombre d'employés de ce secteur de faire le partage entre le temps où ils sont à leur poste et celui où ils ne le sont pas.Il apparaîtrait dès lors normal de reconnaître les avantages du loisir associé au travail, même s'il n'est pas possible de les apprécier numériquement, comme des gains obtenus sous la forme d'un mieux-être et comme un composant de toute nouvelle mesure de bien-être du produit national brut.CONCLUSIONAutrefois, lorsque le travail pour une large part consistait en une activité physique où l'esprit n'occupait que peu de place, peut-être que le travail et la présence au poste d'une part, et le loisir et l'absence du poste, d'autre part, pouvaient-ils être presque synonymes. Aujourd'hui, à la suite du développement rapide du secteur tertiaire, il faut nous rendre à l'évidence qu'on peut trouver le loisir au poste même.Il ne faut pas en conclure, cependant, que la dichotomie présence au travail et absence du travail n'existe plus. Tel n'est pas le cas. Tout ce qui est soumis ici, c'est que les manuels d'économie politique traditionnels ne devraient plus affirmer que le temps de présence au travail est formé exclusivement de travail et, à partir de là, essayer de montrer qu'il y a entrecroisement entre loisir et travail quand, en réalité dans leurs exposés sur la courbe d'offre de travail individuel ils tiennent à la fois compte du temps passé au travail et du temps passé hors du travail. DO - https://doi.org/10.7202/028336ar UR - https://id.erudit.org/iderudit/028336ar L1 - https://www.erudit.org/fr/revues/ri/1972-v27-n4-ri2820/028336ar.pdf DP - Érudit: www.erudit.org DB - Érudit ER -