Résumés
Résumé
La Charte des droits et libertés de la personne établit non seulement expressément la façon dont certains droits et libertés doivent être protégés et exercés, mais prévoit aussi la façon dont les atteintes illicites au libre exercice de ceux-ci doivent être sanctionnées. Malgré la clarté de ce texte, la Cour suprême du Canada décide néanmoins que la Charte ne crée pas de régime de responsabilité distinct et autonome du droit commun de la responsabilité civile (Béliveau St-Jacques – 1996). Si tant est que l’on puisse accepter une telle convergence des recours, l’on s’attendrait à ce que les droits qui y sont énoncés soient pleinement reconnus comme éléments déclencheurs d’un recours civil lorsqu’une atteinte est alléguée. Or, il appert que ce n’est pas toujours le cas, comme en fait foi le sort que l’on a réservé au recours en dommages-intérêts pour atteinte illicite au droit à la sauvegarde de sa réputation, lequel se voit complètement absorbé par « le recours en diffamation ». L’examen de deux arrêts de la Cour suprême portant sur « le droit de la diffamation » nous démontre les conséquences conceptuelles de l’assimilation par le droit de la responsabilité civile des recours qui pourraient pourtant être mis en oeuvre par le biais de l’article 49 de la Charte (atteinte illicite à la réputation). Examinant le cadre d’analyse théorique des arrêts Prud’homme c Prud’homme (2002) et Bou Malhab c Diffusion Métromédia CMR inc (2011), les auteurs proposent que leur application s’avère problématique. Dans le premier cas, l’absence de responsabilité n’est examinée qu’à travers la notion de faute (les propos sont justifiés par la liberté d’expression) sans que ne soit véritablement examinée la présence d’un préjudice, lequel semble être en quelque sorte présumé. Dans le second cas, la faute étant acquise, et ce, sans véritable analyse de la part de la Cour, c’est l’absence de préjudice qui détermine l’issue du litige. Ce dernier arrêt illustre par ailleurs la difficulté de recourir au « droit de la diffamation » en matière de dommages punitifs. Cette discontinuité conceptuelle criante rend résolument ardue la compréhension des raisons pour lesquelles la faute et le préjudice devraient gouverner l’examen des recours pour atteinte à la réputation sous la Charte. Que la Cour intervertisse si aisément les rapports qu’entretiennent le recours « en diffamation » de la responsabilité civile de droit commun et celui pour « atteinte illicite à la réputation » de la Charte des droits et libertés de la personne ne revient-il pas à dire, qu’au final, leur coordination est artificielle et dès lors… inutile ?
Abstract
The Charter of Human Rights and Freedoms not only expressly states how certain rights and freedoms must be protected and exercised, but also provides the way unlawful interference with the free exercise thereof must be punished. Despite the clarity of its provisions, the Supreme Court of Canada decides nevertheless that the Charter does not create a liability regime separate and independent from the civil liability (tort) regime (Béliveau St-Jacques – 1996). To the extent that such convergence of actions can be accepted, one would expect that the rights described in the Charter be fully recognized as triggers for a civil remedy when an infringement is alleged. However, it appears that this is not always the case, as it is for the action for unlawful interference with the right to safeguard its reputation, which is completely absorbed by “the action in defamation”. The analysis of two decisions of the Supreme Court on “the law of defamation” demonstrates the conceptual consequences of the assimilation of the action for a victim of unlawful interference with the right to the safeguard of his reputation based on section 49 of the Charter by the general principles of civil liability. After examining the context of theoretical analysis of Prud’homme v Prud’homme (2002) and Bou Malhab v Metromedia CMR Broadcasting inc (2011), the authors propose that its application is problematic. In the first decision, the absence of liability is determined through the concept of fault (the comments are justified by freedom of expression) without truly considering the presence of an injury, which appears to be somehow presumed. In the second decision, the fault being admitted without further analysis by the Court, it is the absence of injury that determines the outcome. The latter judgment also illustrates the difficulty of using the “law of defamation” for punitive damages. This glaring conceptual discontinuity makes decidedly difficult to understand why the fault and the injury should govern the consideration of action for unlawful interference with the right to the safeguard of his reputation provided by the Charter. Would the fact that the Supreme Court is able to invert so easily the relationship between the “action in defamation” and the “unlawful interference with the right to reputation” means that in the end, their coordination is artificial and therefore ... pointless?
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