Comptes rendus

Réalisations argumentales et classes de verbes en fongbé, Anne-Marie Brousseau, Louvain et Paris, Peters, coll. langues et cultures africaines, no 22, 1998[Notice]

  • Juvénal Ndayiragije

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  • Juvénal Ndayiragije
    Université de Toronto

L’ouvrage dont nous présentons ce compte rendu étudie les classes de verbes du fongbé en ce qui a trait aux propriétés sémantiques et syntaxiques liées à leur structure argumentale. Le but visé est de fournir des représentations lexicales qui reflètent explicitement les régularités sémantiques syntaxiquement pertinentes. Cette recherche se veut ainsi une contribution au développement de modèles de représentation lexico-conceptuelle, dans le cadre de la Sémantique lexicale initiée par le MIT Lexicon Project (Hale et Keyser 1987 et les travaux subséquents). Le chapitre 1 présente le cadre théorique. Celui-ci est axé sur les trois questions de recherche suivantes : (i) comment est structuré le lexique? (ii) quel type d’information est nécessaire dans chaque entrée lexicale pour dériver sa projection en syntaxe? (iii) par quel mécanisme ces propriétés lexicales sont-elles projetées en syntaxe? Il s’agit donc d’isoler et de représenter les régularités lexicales qui sont syntaxiquement pertinentes. L’étude des propriétés des verbes y occupe une place de choix. Le format des représentations lexicales adopté contient deux niveaux : sémantique et lexicosyntaxique. Le premier niveau, appelé Structure conceptuelle lexicale (SCL), représente le concept dénoté par le prédicat, au moyen de primitifs sémantiques universels du type cause, change, be, at, etc. Ainsi, un verbe comme brûler aura la SCL : [x cause [y change be]]/ brûler, où les variables x et y représentent les participants impliqués dans l’action. Le second niveau, appelé Structure lexicale (SL), est la projection syntaxique de la grille thématique du prédicat. Il s’agit d’une syntaxe lexicale («L-syntax») de la structure argument-prédicat, dans laquelle les noeuds terminaux abstraits (phonétiquement vides ou épelés) correspondent aux prédicats primitifs susmentionnés. La fusion («conflation») de ces noeuds-têtes suit les principes syntaxiques existants et dérive la forme verbale insérée en syntaxe. Ainsi, le verbe anglais shelve, dont la SCL serait quelque chose comme [x cause [y change be at shelf]] dérive de la fusion de V (cause) et de P (at), tous abstraits, et du SN locatif shelf. Enfin, ce modèle pose l’existence d’opérations lexicales sur les SCL qui modifient les réalisations syntaxiques de la structure argument-prédicat. Parmi ces opérations figurent : (i) la suppression ou (ii) l’ajout d’un prédicat, et (iii) l’identification d’une variable de la SCL, par liage à une autre variable de la SCL ou remplacement par une constante qui associe une valeur générique à la variable de la SCL affectée. Voilà pour le cadre théorique. Le reste de l’ouvrage est une application de ce format et de ces opérations lexicales à l’étude des alternances argumentales en fongbé. Le chapitre 2 étudie l’alternance causatif-inchoatif, représentée par les paires de phrases du type (i) Marie a gonflé le pneu / Le pneu a gonflé et (ii) Marie a ouvert la porte / La porte s’est ouverte. Seuls les verbes de changement d’état se prêtent à ce type d’alternance. Plus important encore, l’étude démontre qu’on doit distinguer deux sous-classes de verbes de changement d’état : (i) ceux qui se prêtent à la forme inchoative simple et (ii) ceux qui acceptent la forme inchoative pronominale. Sémantiquement, cette distinction est encodée dans la SCL. Les verbes à inchoatif simple sont à la base des verbes monadiques, dont la SCL est [x change be]. La variante causative est dérivée par ajout du prédicat cause (et de sa variable) : [y cause [x change be] : Par contre, les verbes à inchoatif pronominal sont à la base des verbes dyadiques où l’entité qui subit le changement d’état est interprétée comme intrinsèquement responsable du processus. La SCL de cette classe de verbes est représentée …

Parties annexes