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Jocelyn Lachance n’en est pas à ses premières armes puisqu’il a déjà publié livres et articles portant notamment sur les jeux vidéo et le cinéma chez les jeunes et chez les adolescents. L’ouvrage qu’il livre ici s’inspire largement de la thèse de doctorat qu’il a réalisée sous la direction de David Le Breton. Deux grandes parties le composent. La première est une synthèse sur la question des rapports au temps chez les jeunes. Il faut le dire : rien de vraiment nouveau, il s’agit d’un survol plutôt académique des principales notions courantes (prescriptions de l’instantanéité, culture de la jeunesse, temps et ordre scolaire, etc.). On retiendra que pour une entrée en la matière sur le sujet, cette partie offre un aperçu rapide.

C’est la seconde partie qui constitue l’essentiel de l’ouvrage. Elle traite de la culture numérique et du rapport au temps chez les jeunes. Elle s’appuie sur une série d’entretiens menés auprès des jeunes eux-mêmes. On a droit cependant à des analyses plutôt classiques, portant sur la recherche d’autonomie, la quête d’identité, le culte de l’instant, les réseaux de sociabilité et leur caractère parfois éphémère. Au passage, on lira des analyses sur le jeu vidéo, sur l’autoproduction de soi sur Facebook, le cinéma et « cette logique de l’accélération de l’éphémère » (p. 90). Cette partie s’achève sur un chapitre intitulé « Violenter la temporalité ». Jocelyn Lachance y développe sa thèse centrale : la quête d’autonomie amène certains jeunes à violer les lois du temps par la recherche délibérée d’expériences de désynchronisation et de modification de la perception du temps, notamment par l’utilisation de psychotropes : tel serait le prototype de « l’hypermodernité adolescente ». On peut même jouer avec la mort dans le cas des amateurs de vitesse au volant ou de consommation de psychotropes. Ici Jocelyn Lachance distingue entre les adolescents en mal de vivre et qui n’hésitent pas à mettre leur vie en danger, de ceux qui se contentent de délibérément jouer avec le temps pour affirmer leur autonomie.

Étape transitoire avant l’entrée dans « l’âge adulte » ou pérennité de l’hypermodernité qu’incarnent les jeunes d’aujourd’hui ? La réponse de l’auteur demeure incertaine. En conclusion, il met l’accent sur le rôle des technologies numériques, relativisant quelque peu la trame d’une partie de son analyse qui accordait une grande place aux psychotropes.