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Voici un nouvel instrument de travail qui assume avec brio la relève des prédécesseurs en ce domaine, tels Gérard Brassard (Armorial des évêques du Canada, Montréal, 1940) et surtout André Chapeauet al. (Évêques catholiques du Canada, 1658-1979, Ottawa, 1980). Même rapide, un parcours de l’ouvrage convainc aisément de l’ampleur de son contenu, de la richesse de son information et de son aspect critique et novateur.

La première partie, intitulée « Le cadre administratif et historique », forme approximativement le tiers de l’ouvrage ; cette section est la plus technique. Le chapitre premier offre une « chronologie de l’établissement des circonscriptions ecclésiastiques », tandis que le deuxième a pour titre « Les diocèses et leurs évêques » ; celui-ci donne une liste alphabétique des circonscriptions ecclésiastiques, leur évolution et la succession de leurs titulaires. L’ensemble, complété par la mention des sources et de monographies diocésaines, forme une synthèse fort éclairante, notable par son aspect critique et novateur.

S’il fallait démontrer que l’auteur a eu le souci de réaliser une étude couvrant le plus possible l’ampleur de son sujet, le chapitre III l’illustrerait efficacement. En effet, il y est question de trois catégories de personnes : les évêques canadiens ou d’origine canadienne à l’étranger ; les évêques étrangers ayant vécu ou oeuvré au Canada ; les prêtres ayant refusé l’épiscopat. Dans ce dernier cas, l’auteur a voulu inclure « les noms de certains prêtres considérés pour l’épiscopat et qu’on retrouve souvent dans les sources relatives à l’histoire ecclésiastique comme figurant sur une terna ».

Le quatrième chapitre traite des « Évêchés et archevêchés titulaires », aujourd’hui disparus et attribués à des évêques canadiens. L’auteur répond à trois objectifs : « donner une idée précise de la localisation actuelle des villes et autres lieux dont les noms sont devenus ceux de sièges titulaires ; fournir des données chronologiques illustrant la vie de l’Église en ces lieux lorsqu’elle y était active ; faire un bref historique de l’attribution de ces titres au cours des derniers siècles ». Les renseignements, bien que plutôt techniques, permettent aux historiens de l’Église canadienne de s’y retrouver avec certaines appellations parfois attribuées successivement à plus d’un évêque.

Le chapitre V fournit la liste des « Membres de l’épiscopat appartenant à des ordres religieux ». Les Oblats de Marie-Immaculée figurent largement en première place, suivis par d’autres ordres missionnaires.

Le chapitre VI traite de « La représentation du Saint-Siège au Canada ». L’auteur distingue avec soin les diverses formes qu’a pu prendre cette représentation au cours de l’histoire des relations entre Rome et l’Église canadienne. Il étudie d’abord le cas des « précurseurs », tel Ignazio Persico qui, de 1873 à 1876, séjourna au pays et en profita pour « prendre le pouls de l’Église canadienne ». Viennent ensuite les « délégations spéciales » ou « missions officielles », comme celles de Mgr Conroy (1877-1878), de dom Smeulders (1883) ou de Mgr Merry del Val (1897-1898). Quant aux délégations « permanentes », elles portent le titre de délégations apostoliques (auprès de l’Église locale, 1899-1969), de prononciatures (1969-1994) et de nonciatures (depuis 1994), ces deux dernières ayant un statut diplomatique auprès du gouvernement du pays. Les biographies des représentants du Saint-Siège sont intéressantes et importantes ; la formation, la personnalité et le cheminement de ces diplomates éclairent le contexte historique dans lequel ils ont été désignés pour remplir leurs fonctions, parfois fort délicates et complexes. Enfin, la première partie de l’ouvrage est complétée par un index des noms des évêques mentionnés dans les chapitres précédents.

La seconde partie, avec ses 600 pages, est la plus élaborée et la plus importante. On y retrouve, par ordre alphabétique, la biographie de tous les évêques et préfets apostoliques dont les noms apparaissent aux chapitres II, III et VI. L’auteur propose, pour chacune des biographies, un parcours assez identique que, par ailleurs, il suit avec souplesse. De façon générale, le premier paragraphe retrace l’évolution de la carrière avant l’épiscopat ; le second traite de données relatives à l’épiscopat ; les autres développent la contribution apportée par chacun, avec parfois la mention de traits caractéristiques (traits physiques ou de caractère, orientations idéologiques, etc.), selon les sources consultées. À cet égard, on admet volontiers que l’usage exclusif des sources documentaires secondaires puisse expliquer certaines imprécisions. À titre d’exemple, on peut trouver insuffisante la raison évoquée pour la démission de Mgr Jean Langevin (1821-1892), premier évêque de Rimouski. De toute évidence, le dernier mot se trouve aux Archives vaticanes, dans ce cas comme dans celui d’autres évêques, tels Mgr Georges Courchesne, Mgr Joseph Charbonneau… Cependant, empressons-nous d’ajouter que, dans l’ensemble, les biographies, écrites dans un style limpide, sont enrichissantes, justes et nuancées. Elles sont accompagnées d’une bibliographie qui tient compte des parutions assez récentes.

Voilà donc un ouvrage devenu essentiel, par son envergure, la richesse de sa documentation, l’esprit de finesse et de clarté qui l’anime. Signalons en outre l’aspect esthétique de ce « monument » qui en fait, à notre sens, non seulement un « beau livre », mais une réussite dans le domaine de l’édition. Pour que notre satisfaction soit complète, nous souhaitons que se concrétise l’espoir exprimé par l’auteur de la publication éventuelle d’une troisième partie, « qui donnerait, pour chacune des notices biographiques, l’iconographie et une reproduction des armoiries pertinentes ».