Comptes rendus

Jacques Rouillard. Le syndicalisme québécois. Deux siècles d’histoire, Montréal, Boréal, 2004, 329 p.[Notice]

  • Reynald Bourque

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  • Reynald Bourque
    École de relations industrielles,
    Université de Montréal.

L’ouvrage de Jacques Rouillard, professeur au département d’histoire de l’Université de Montréal, est une présentation revue et enrichie de son Histoire du syndicalisme québécois publiée chez le même éditeur en 1989. L’auteur souligne dans son introduction qu’il y a ajouté de nouveaux éléments traitant de l’action syndicale en matière de négociation collective, et un nouveau chapitre portant sur la période 1985-2003. L’ouvrage est organisé en cinq chapitres qui correspondent à différentes périodes de l’histoire du syndicalisme québécois. La période 1818 à 1900 correspond selon l’auteur à la naissance et à l’affirmation du syndicalisme québécois. Il situe en 1818 l’origine du syndicalisme organisé au Québec, avec la création de la Société amicale des charpentiers et menuisiers de Montréal. Les deux décennies suivantes verront naître d’autres associations ouvrières dans les industries du vêtement, de l’imprimerie et de la construction. En 1833, le Syndicat des charpentiers de Montréal déclenche une grève pour obtenir la réduction de douze à dix heures de la journée de travail. Après un premier échec, il obtient gain de cause l’année suivante et participe à la fondation de Montreal Trade Unions, un regroupement d’associations ouvrières dont l’objectif principal est la réduction de la journée de travail. Malgré ces premiers succès, l’essor du mouvement syndical québécois est lent et largement tributaire de l’expansion des syndicats « internationaux » basés aux États-Unis. L’adoption en 1872 par le gouvernement canadien d’une loi qui consacre la reconnaissance légale des syndicats accélère le mouvement de syndicalisation au Canada et au Québec tout en accentuant la pénétration des syndicats « internationaux » et à un moindre degré des Chevaliers du travail, qui connaissent un succès relatif au Québec à la fin du dix-neuvième siècle. La période allant de 1900 à 1940 enregistre une expansion importante du syndicalisme au Québec dont les effectifs passent de 12 000 en 1901 à 157 000 en 1941. En parallèle à la montée importante des syndicats internationaux, on assiste au début du vingtième siècle à la naissance du syndicalisme catholique avec la fondation en 1911 de la Fédération ouvrière mutuelle du Nord, suivie en 1921 de la création de la Confédération des travailleurs catholiques du Canada (CTCC), l’ancêtre de la CSN, qui représente en 1940 environ 30 % des syndiqués québécois. En 1937, les syndicats internationaux fondent la Fédération provinciale des travailleurs du Québec, l’ancêtre de la FTQ. Cette période d’expansion du syndicalisme québécois est marquée par de nombreux conflits impliquant plusieurs milliers de travailleurs et travailleuses : grève de la chaussure à Québec (1900 et 1926), du vêtement à Montréal (1917 et 1933), et du textile (1937). Durant la période 1940 à 1960, le taux de syndicalisation grimpe de 20 % à 30 % et le syndicalisme québécois atteint sa maturité. Les années 1940 à 1945 au Canada et au Québec correspondent à une période de plein emploi favorable aux revendications syndicales, même si les négociations salariales dans les industries de guerre (qui emploient près de 75 % des travailleurs du secteur manufacturier) sont soumises à un contrôle par un organisme fédéral de conciliation. Le gouvernement canadien adopte en 1944 le CP 1003 qui reprend les principes du Wagner Act américain sur la reconnaissance syndicale, la négociation collective et le droit de grève. La même année, le gouvernement du Québec emboîte le pas avec sa loi sur les relations ouvrières, mais il soumet les services publics à une loi des différends qui impose l’arbitrage obligatoire en cas d’impasse dans les négociations collectives, sans droit de grève. La période de l’après-guerre est caractérisée par une chasse aux militants communistes dans les syndicats internationaux, tandis que la CTCC devient plus …