Notes critiques

Les peuples autochtones et la naissance du québec : Pour une réécriture de l’histoire ?Yves Chrétien, Denys Delâge et Sylvie Vincent, Au croisement de nos destins : quand Uepishtikueiau devint Québec, préface de Serge Bouchard, Montréal, Recherches amérindiennes au Québec, 2009, 92 p.Mathieu d’Avignon et Camil Girard (dirs), A-t-on oublié que jadis nous étions « frères » ? Alliances fondatrices et reconnaissance des peuples autochtones dans l’histoire du Québec, Québec, Les Presses de l’Université Laval, 2009, 180 p.[Notice]

  • Daniel Salée

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  • Daniel Salée
    École des affaires publiques et communautaires,
    Département de science politique,
    Université Concordia.
    salee@alcor.concordia.ca

Les deux ouvrages collectifs dont il est question ici, bien que distincts, sont de la même pâte. Ils portent sur divers aspects de la dynamique de rencontre et d’interaction entre les peuples autochtones et les Européens au moment de la fondation de Québec. Conçus et produits par quelques-uns des spécialistes les plus éminents de l’histoire de la Nouvelle-France et des rapports entre les populations amérindiennes et allogènes aux seizième et dix-septième siècles, ils nous sont offerts dans la foulée immédiate des célébrations commémoratives du 400e anniversaire de la ville de Québec, pour rappeler, visiblement, une dimension que les festivités auraient en partie négligée : en débarquant à l’endroit précis où ils ont fondé Québec, les Français se sont implantés là où vivaient et florissaient depuis longtemps d’autres peuples avec leur histoire propre, intimement liée à l’espace que ces Européens s’appropriaient désormais ; l’essence fondamentale de la société québécoise participe de ce contact originel entre les deux groupes, et donc aussi, nécessairement, de la présence et de la mémoire mêmes des peuples autochtones. Le court volume qu’ont constitué les animateurs de Recherches amérindiennes au Québec, en regroupant trois textes différents d’Yves Chrétien, Denys Delâge et Sylvie Vincent, est le premier à s’inscrire dans une toute nouvelle collection qui est, peut-on lire en page de garde, « destinée à un large public [et] vise à mettre en lumière ce qui est souvent oublié, voire occulté : hier comme aujourd’hui, aujourd’hui comme hier, la réalité du Québec ne peut se concevoir sans la présence des Premières Nations ». L’opuscule entier, incluant la préface de Serge Bouchard, est scrupuleusement fidèle à cet esprit. L’objectif poursuivi par Mathieu d’Avignon et Camil Girard avec leur ouvrage collectif est sensiblement le même : ils désirent amener le lecteur « à jeter un regard nouveau sur le temps des « origines », sur les relations interculturelles entre peuples autochtones et Européens au temps de la fondation de Québec, sur la place des Amérindiens dans l’histoire et dans la société québécoise, sur les diverses répercussions immédiates et futures des premières alliances franco-amérindiennes, sur les quatre siècles passés d’une histoire commune et sur le temps présent » (p. 5). Le titre évocateur du livre que signent Yves Chrétien, Denys Delâge et Sylvie Vincent ne fait aucun doute sur le sens du message qu’il porte : Québec était innue (ou montagnaise selon l’ancienne appellation) avant d’être française. Yves Chrétien, archéologue, atteste que les fouilles archéologiques révèlent que des traditions ancestrales amérindiennes se sont maintenues dans la région jusqu’au début du dix-septième siècle, intégrant par la suite des éléments de la culture matérielle européenne. Denys Delâge, sociologue et ethnohistorien, insiste sur l’importance de « souligner davantage le rôle indispensable joué par les Montagnais dans le succès de notre implantation en Amérique » (p. 39). Enfin, Sylvie Vincent, anthropologue, livre des détails méconnus de la tradition orale innue contemporaine et lève le voile sur la manière dont les Autochtones ont vécu et se représentent les premiers contacts avec les Français. Mathieu d’Avignon et Camil Girard, quant à eux, ont rassemblé divers textes qui mettent en lumière les dynamiques de cohabitation et d’échange interculturel qui ont d’abord caractérisé les relations entre Amérindiens et Européens aux origines du Québec. Marcel Trudel ouvre le volume en se prêtant avec Mathieu d’Avignon à une entrevue dans laquelle il exhorte Québécois et Autochtones d’aujourd’hui à relire l’histoire et à reconnaître la contribution des uns et des autres. Puis, Camil Girard fait le point en compagnie de Silvio Marcus de Souza Correa, un collègue brésilien, sur les transferts culturels à la base des alliances entre les Français et …

Parties annexes