Comptes rendus

Olga Hazan, La culture artistique au Québec au seuil de la modernité. Jean-Baptiste Lagacé, fondateur de l’histoire de l’art au Canada, Québec, Septentrion, 2010, 612 p., plus cédérom.[Notice]

  • Andrée Fortin

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L’ouvrage que propose Olga Hazan tient à la fois de l’essai historique, du document, de matériaux pour une histoire de l’art et de l’université ; ce n’est pas un ouvrage collectif, mais un chapitre a été rédigé par Suzanne Lemerise et Brigitte Nadeau ; d’autre part, un cédérom y est glissé, dont le contenu ne recoupe celui d’aucun chapitre. En fait, le sous-titre de ce livre non conventionnel rend mieux compte du contenu que le titre. Jean-Baptiste Lagacé a été le premier professeur d’histoire de l’art dans une université canadienne ; il a enseigné à partir de 1904 à ce qui était alors l’Université Laval à Montréal jusqu’à 1944, alors que l’institution devient l’Université de Montréal. Après avoir rappelé le contexte universitaire et intellectuel du début du 20e siècle, Hazan présente les « prédécesseurs » de Lagacé et les premières conférences publiques sur l’histoire de l’art. Mais elle s’attarde essentiellement à la trajectoire de Lagacé, à sa formation et son enseignement. En ce qui concerne sa trajectoire personnelle et professionnelle, la quantité d’information est sidérante et servira sans doute de matériau pour des analyses futures. À ce propos, je souligne l’importance des annexes, sources et index. Le contenu des cours et conférences de Lagacé est reconstitué à partir d’une part des notes et résumés qui ont survécu, mais aussi à partir des comptes rendus que la presse en a faits. Le chapitre de Lemerise et Nadeau est consacré au travail « d’inspecteur de l’enseignement du dessin à la Commission des écoles catholiques de Montréal » de Lagacé. Le cédérom nous convie à la visite d’une exposition tenue en 2004 au Centre d’exposition de l’Université de Montréal, intitulée « Sur les pas de Jean-Baptiste Lagacé », et offre des vues générales de l’exposition ainsi que toutes les photos, dessins, et artefacts qui y ont été présentés, et aussi tous les textes accompagnant ces objets. Cette exposition a été conçue par l’auteure du livre, Olga Hazan, à l’occasion du centenaire de la création de la chaire d’histoire de l’art de Lagacé. La pièce de résistance est le chapitre 7, comptant un peu plus de 200 pages. Il s’agit d’une édition critique de l’Initiation à l’histoire de l’art que Lagacé se préparait à publier au moment de sa mort en 1946. Le chapitre 6 propose pour sa part les Lettres de voyage (1900) du même Lagacé. Ces deux chapitres réunis forment plus de la moitié du livre. Plusieurs éléments intéressants sont avancés sans être très développés. Ainsi l’histoire de l’art est enseignée à l’Université avant l’histoire-tout-court. Est-ce lié au fait que l’histoire a longtemps été rattachée à la littérature ? Hazan avance que c’est plutôt à cause du « pouvoir rhétorique » de l’image : « le discours par l’image, et sur l’image, se tisse au nom d’une vertu morale, laquelle engage le discernement du beau et du bien » (p. 80). En effet, de nouvelles techniques de projection permettent d’illustrer les propos des conférenciers et professeurs. Mais l’attrait de l’ailleurs y est-il pour quelque chose comme dans les actuelles conférences de « grands explorateurs » ? Ce livre intéressera les historiens des idées, de l’université et de l’histoire de l’art, auxquels il fournira d’abondants matériaux et pistes d’analyse.