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Intéressé d’abord par la dynamique du vieillissement des banlieues de première couronne dans la région métropolitaine de Québec, le Groupe interdisciplinaire de recherche sur les banlieues (GIRBa) de l’Université Laval explore, dans La banlieue s’étale, l’univers des zones périurbaines, où s’implantent aujourd’hui les nouvelles banlieues. Sous la direction d’Andrée Fortin, Carole Després et Geneviève Vachon, l’ouvrage présente un collectif de textes, dont la plupart sont fondés sur l’analyse de témoignages. Ces témoignages ont été recueillis lors d’entrevues réalisées à l’été 2005 auprès de 132 adultes et 30 adolescents de six secteurs différents de la région métropolitaine de Québec : Saint-Étienne-de-Lauzon, et Sainte-Hélène-de-Breakeyville, L’Ange-Gardien, Saint-Augustin-de-Desmaures, Lac-Beauport et Sainte-Catherine-de-la-Jacques-Cartier.

Les premiers chapitres de l’ouvrage procèdent d’abord à la caractérisation du territoire périurbain. On y présente une analyse des dimensions physiques et paysagères des zones à l’étude. Des données sociodémographiques viennent appuyer cette caractérisation, d’abord en retraçant le processus d’étalement de 1945 à 2006 dans la région métropolitaine de Québec, puis en détaillant l’évolution récente dans les zones périurbaines. Les thématiques abordées dans les chapitres subséquents sont variées. Elles touchent la publicité sur les logements neufs, la définition de l’espace idéal pour élever des enfants, le désir de proximité avec la nature, les habitus résidentiels, la dépendance à l’automobile, les lieux de consommation et la mobilité adolescente. Malgré cette diversité, on constate une grande complémentarité entre les textes. Cela s’explique par le fait que les analyses présentées sont, pour la plupart, alimentées par une seule et même base de données.

Dans le milieu universitaire actuel, il est agréable de voir un ouvrage qui s’intéresse à la banlieue et aux gens qui y résident. Trop d’ouvrages traitent de la banlieue comme d’un « problème » de croissance urbaine, sans considérer qu’il s’agit également d’un milieu de vie. Les auteurs de La banlieue s’étale cherchent à comprendre la raison d’être de la banlieue à travers le témoignage des gens qui ont fait le choix d’y vivre. Conscients des impératifs environnementaux, leur objectif est de « suggérer des pistes d’aménagement, à la fois dans le périurbain et les quartiers plus centraux, pour limiter les effets pervers de l’étalement urbain » (p. 20). Ces pistes de solution passent toutefois par l’acceptation de l’état initial de la situation. Comme il est décrit dans l’ouvrage, une majorité de familles vit désormais dans les banlieues. La banlieue est devenue un lieu de référence pour élever ses enfants. Elle offre un cadre de vie sécuritaire et tranquille, et une proximité avec la nature, qui n’existent pas, aux yeux de ses résidents, dans la ville centrale. Malgré leur sensibilité aux enjeux environnementaux, les résidents des banlieues demeurent attachés à l’usage de leur automobile. Ils préfèrent envisager des solutions de transport moins polluantes, comme les voitures électriques, plutôt que de migrer vers les transports en commun.

Pour arriver, dans ce contexte, à influencer le développement du territoire, il est incontournable de prendre en compte les aspirations des citoyens. La maison détachée et l’accès aux axes de transport autoroutiers demeurent importants. Pour densifier l’espace urbain, les auteurs croient que les banlieues de premières couronnes offrent un potentiel intéressant, et complémentaire au développement des quartiers centraux. On y suggère notamment la subdivision des lots de maisons unifamiliales pour favoriser l’accès à la propriété des jeunes familles là où les services sont déjà développés. Dans un contexte de vieillissement et de stagnation de population, les auteurs soulignent également l’urgence d’agir. Les possibilités d’influencer le développement du territoire par la construction de nouveaux quartiers résidentiels seront de plus en plus rares dans l’avenir. Selon eux, « le développement durable, c’est aussi de ne pas léguer aux générations futures des infrastructures démesurées qui seront coûteuses à entretenir, voire à maintenir en contexte de vieillissement démographique » (p. 367).