Comptes rendus

Mario Mimeault, L’exode québécois, 1852-1925 : correspondance d’une famille dispersée d’Amérique, Québec, Septentrion, 2013, 443 p.[Notice]

  • Thierry Nootens

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  • Thierry Nootens
    Département des sciences humaines, Université du Québec à Trois-Rivières et Centre interuniversitaire d’études québécoises
    thierry.nootens@uqtr.ca

L’ouvrage est divisé en quatre parties et comporte neuf chapitres. La première partie met en lumière les particularités communicationnelles des lettres échangées. La correspondance des Lamontagne leur permet de maintenir une famille virtuelle, malgré la distance. Les scripteurs trouvent leur compte dans ces échanges : la lettre sert notamment d’exutoire en des temps difficiles. La deuxième partie s’attarde aux « horizons d’attente » (expression répétée ad nauseam dans l’étude) des migrants, soit à la conjoncture changeante d’opportunités et d’aspirations qui sont les leurs. Les contingences et la précarité de l’expérience migratoire apparaissent clairement. La troisième partie analyse le rôle de la culture familiale dans la dynamique migratoire. Pour l’auteur, ces itinéraires relèveraient entre autres d’une « culture migratoire » (p. 223) héritée des générations précédentes et remontant même à l’époque de la Nouvelle-France, proposition assez peu convaincante. La quatrième partie, enfin, traite du rapport des fils et filles Lamontagne avec leur nouvel environnement. On constate alors que le sentiment d’appartenance à la famille, sentiment structuré par la figure du père, se maintient avec vigueur au fil des pérégrinations. L’enthousiasme du comité des prix de l’IHAF n’a pas été contagieux. L’exode québécois aurait mérité un élagage vigoureux. La profusion étonnante des redites rend la lecture plutôt pénible. Le recours à la théorie alourdit parfois le propos inutilement, notamment des emprunts aux théories littéraires conduisant à formuler, dans un langage qui se voudrait savant, des réalités qui tombent sous le sens. Plus problématique encore est la présence d’analyses qui avoisinent, et de près, le jugement de valeur. Cela surtout dans la deuxième partie, où les parcours difficiles de certains enfants Lamontagne (il y a dans le groupe de véritables situations de déclassement social) sont interprétés en termes d’adaptation ou d’ajustement personnel. Discourir dans cet esprit du cas d’une femme abandonnée par son mari laisse perplexe (p. 181 et 182). De surcroît, postuler qu’une des filles est motivée par une volonté de « fortune facile et rapide » (p. 152), attitude qui relèverait par-dessus le marché de la culture commerciale de sa famille, alors que rien ne permet de l’établir, c’est vouloir faire parler les sources à tout prix. Enfin, le lecteur attentif relèvera quelques erreurs assez manifestes quant à l’histoire de la condition féminine, notamment sur le plan juridique (p. 85, 118, 148 et 149).