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L’autisme et le trouble du spectre de l’autisme (TSA) sont des sujets rarement abordés sous l’angle de la réalité des parents qui vivent avec un enfant atteint. Le livre de Catherine des Rivières-Pigeon et Isabelle Courcy a justement pour but de faire ressortir une réalité trop peu connue jusqu’à présent : ce que vivent ces familles, tant sur le plan de la santé que sur celui de leurs conditions de vie. Le livre s’appuie sur des recherches menées à l’Université du Québec à Montréal, depuis 2007, dans une perspective interdisciplinaire et portant sur les services offerts par le système public et les centres de réadaptation en déficience intellectuelle et en troubles envahissants du développement (CRDITED) aux enfants âgés de deux à cinq ans.

Les auteurs font ressortir la détresse que vivent une majorité de parents au quotidien, qui va bien au-delà du deuil de l’enfant souhaité. Un sentiment de détresse généré par d’importantes difficultés à concilier la famille et le travail, de sérieux problèmes d’argent et le manque de répit. Quelques témoignages :

  • « On dirait que juste le mot TED ça fait partir toutes les gardiennes potentielles. Les gens se sentent un peu inconfortables. » (Sylvie).

  • « J’ai quitté mon emploi parce que je ne trouvais pas de service de garde pour prendre mon enfant avec des besoins spéciaux. J’ai eu à trouver de l’aide pour lui. » (Mylène).

  • « J’ai abandonné la recherche d’emploi ou la reprise des études car je devais me consacrer à connaître mieux l’autisme et pour savoir comment réagir et mieux gérer les crises de ma fille. » (Annie).

L’ouvrage met donc en évidence le besoin d’agir directement sur ces difficultés en instaurant des mesures de soutien concrètes et matérielles pour ces familles. Les programmes d’intervention comportementale intensifs (ICI) rapportent que plusieurs mères quittent leur emploi afin de consacrer plus de temps à la stimulation de leur enfant, dans l’espoir qu’il puisse entrer à l’école en classe ordinaire. Les recherches sur l’ICI montrent précisément que de nombreux enfants autistes, stimulés en bas âge et tout au long de leur enfance, pourront terminer leur scolarité, avoir un emploi et vivre de façon relativement autonome. De là l’importance, selon les auteures, d’aider financièrement ces familles. Elles suggèrent qu’une prestation leur soit octroyée pendant la petite enfance afin qu’un parent puisse s’engager dans un traitement sans vivre de souci financier ni de difficulté de conciliation travail-famille. Elles suggèrent que d’autres études se penchent sur l’implication des pères ou sur les prestations particulières à accorder autant aux pères qu’aux mères.

Des Rivières-Pigeon et Courcy donnent souvent la parole aux parents d’enfants ayant reçu un diagnostic de TSA. On découvre ainsi que l’implication parentale dans les programmes d’ICI est principalement assumée par les mères et que les tâches accomplies par les parents pour le bien-être et le développement de leur enfant sont diverses. Ce qui amène ces derniers à développer une expertise toute particulière auprès de leur enfant ainsi qu’auprès des intervenants et des autres parents avec qui ils échangent, entre autres dans les forums de discussion, par exemple. Une expertise qui devrait être prise en considération dans les recherches futures.

En conclusion, les auteures rappellent que pour l’instant toute la charge financière des enfants ayant reçu un diagnostic de TSA repose sur les épaules de leurs parents et que l’État devrait en toute justice les soulager en partie de ce fardeau.