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Ce petit ouvrage aborde une question de plus en plus débattue dans les recherches sur le travail enseignant et les différents métiers de l’éducation : la souffrance vécue par les acteurs. Dans un contexte où près de 20 % des enseignants quittent définitivement l’enseignement durant leurs premières années d’exercice et où l’on évoque régulièrement le haut niveau de stress et de détresse psychologique que vit le personnel scolaire, ce livre arrive à point nommé pour susciter le questionnement et soutenir la réflexion.

Fruit d’une recherche collective effectuée dans le cadre des travaux du Centre de recherche et d’intervention sur l’éducation et la vie au travail (CRIEVAT) et menée auprès du personnel d’une école en milieu défavorisé, l’ouvrage se compose de quatre chapitres, lesquels analysent la situation des quatre principaux « corps d’emplois » d’une école : les enseignants, les professionnels non enseignants, le personnel de soutien et les membres de la direction. Tous les chapitres sont signés par M.-F. Maranda et S. Viviers auxquels se joignent Anne Marché-Paillé (chapitres 1 et 2) et Lucie Héon (chapitre 4).

Comme le titre l’indique, les auteurs adoptent ici un cadre théorique particulier : la psychodynamique du travail. Une annexe présente très (trop) brièvement les grandes lignes de ce cadre théorique. Pour l’essentiel, il tente de cerner la dynamique des processus psychiques des sujets en analysant la manière dont ceux-ci réagissent aux réalités du travail qui structurent leur identité. La psychodynamique ne se contente pas de construire une compréhension du réel, elle se veut aussi une « clinique » du travail et, en ce sens, elle est porteuse de visées transformatrices.

Cet ouvrage n’est pas sans mérites, dont le plus important est de donner à voir et à entendre la voix des différents acteurs du milieu scolaire. Toutefois, sa lecture laisse quelque peu perplexe. D’abord, sur le plan de la forme. On pourra à juste titre être agacé par les nombreuses répétitions d’un chapitre à l’autre. En fait, les chapitres semblent avoir été conçus pour des publications séparées. Il aurait été préférable de les retravailler pour cette publication afin d’en extirper les redites. Ensuite, le cadre théorique est insuffisamment développé (il tient en deux pages et demie) et les informations méthodologiques sont fort lacunaires. On déplorera par ailleurs une bibliographie bien mince : huit références seulement dont la majorité impliquant la professeure Maranda. De plus, si l’on souscrit globalement à l’analyse proposée par les auteurs, on déplore cependant une certaine tendance à la généralisation abusive (rappelons qu’il s’agit d’une recherche menée auprès d’une seule école en milieu particulier) et le manque de prise de distance critique par rapport aux discours des sujets (manque particulièrement criant dans le chapitre qui porte sur les enseignants). Néanmoins, malgré ces lacunes, nous recommandons la lecture de cet ouvrage à quiconque souhaite mieux comprendre la réalité du monde scolaire. Il y découvrira que – comme les auteurs le montrent – ce n’est pas dans les stratégies adaptatives personnelles que résident les solutions aux problèmes du monde du travail mais dans les réaménagements organisationnels.