Comptes rendus

Frédéric Boily, La Coalition Avenir Québec. Une idéologie à la recherche de pouvoir, Québec, Les Presses de l’Université Laval, 2018, 184 p.[Notice]

  • André Lecours

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Le gouvernement de la Coalition Avenir Québec (CAQ) représente un chapitre nouveau dans la politique québécoise, qui s’accompagne d’une certaine incertitude sur la nature, l’idéologie et les objectifs du parti. Dans ce contexte, et vu la pauvreté de la littérature sur la CAQ, la contribution de Frédéric Boily, un spécialiste de la droite au pays, vient à point nommé. Dans ce livre rédigé avant la formation du gouvernement caquiste à l’automne 2018, Boily offre une analyse éclairante de la CAQ, mais aussi des récentes dynamiques politiques au Québec. Comme le mentionne l’auteur dans l’introduction, la montée de la CAQ implique un bouleversement du système des partis québécois et coïncide avec des mutations considérables dans l’importance relative des questions idéologique et nationale. Il est donc impératif, pour saisir l’évolution récente de la politique québécoise et sa trajectoire future, d’avoir une bonne compréhension de la nature de ce parti. Le livre comporte quatre chapitres. Le premier présente une discussion de la naissance de la CAQ. Ce chapitre met en relief deux facteurs-clés dans la formation et le développement du nouveau parti. Tout d’abord, l’auteur note, très justement, l’importance du contexte politique, notamment le retour de l’axe gauche-droite dans la politique québécoise, facilité par la chute en importance de la question nationale. En effet, il semble qu’en 2018, le Québec était finalement prêt à appuyer un parti se disant autonomiste, c’est-à-dire une formation politique n’offrant ni un positionnement en faveur de l’indépendance ni une forte défense des principes du fédéralisme canadien, et préférant mettre l’accent sur les questions de politique publique. Comme l’auteur le rappelle, l’Action démocratique du Québec (ADQ), qui avait fait un pari similaire quelques années auparavant, n’a jamais obtenu une majorité parlementaire. Par contre, Boily note que l’existence de l’ADQ, plus particulièrement son rôle dans la « crise » des accommodements raisonnables, a été une condition nécessaire à la création et à la montée de la CAQ, tout comme l’a été le leadership de François Legault. Ce premier chapitre comporte aussi une discussion intéressante de la nature droitiste de la CAQ, l’auteur rappelant que le chef du parti n’a jamais exprimé le souhait de sortir l’État de la société et de l’économie québécoise. Il y a une certaine ambiguïté dans l’idéologie de la CAQ qui, selon Boily, est plus entrepreneuriale que néolibérale. Le deuxième chapitre examine la CAQ lors des élections de 2012 et 2014. Aux élections de 2012, la CAQ a fait campagne sur la lutte contre la corruption et sur l’idée de l’entrepreneuriat. Éprouvant de la difficulté à se démarquer et mal connu des Québécois, le parti ne fait élire que 19 députés. Aux élections de 2014, la CAQ veut se faire le champion du développement économique (entre autres en appuyant le développement pétrolier), mais le retour de la question référendaire avec l’arrivée sur scène de Pierre-Karl Péladeau torpille l’idée que le Québec est passé à autre chose et le parti de François Legault doit se contenter de 22 sièges. Le troisième chapitre se concentre sur le nationalisme de la CAQ. L’auteur voit dans la CAQ un retour au nationalisme autonomiste, alimenté par une défense de l’identité québécoise. Dans sa discussion sur le populisme incarné par la CAQ l’auteur est nuancé, évoquant un « populisme protestataire » consistant à dénoncer les élites en place, mais non un « populisme identitaire » où ce sont aussi « les autres » qui sont dénoncés. Ce chapitre peut sûrement être utile à l’analyse des politiques du gouvernement caquiste sur l’immigration et la laïcité. Finalement, le quatrième chapitre offre une discussion à propos de l’équipe de la CAQ, incluant son aile …