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Dès le début, les directeurs de ce collectif campent leur objectif de façon lapidaire. Cet ouvrage collectif, écrivent-ils, a pour ambition de cerner certains des apports de l’analyse de l’activité à l’étude du travail enseignant. Que font les enseignants ? Telle est la question apparemment banale à laquelle ils tentent de répondre ici. Après avoir rappelé que nous disposons encore de trop peu de connaissances concernant l’activité réelle de l’enseignant, ils soutiennent que son analyse constitue un défi majeur pour la recherche, l’intervention et la formation (p. 2, paragraphe 1). Leur intention avouée est de donner les moyens méthodologiques et théoriques pour rendre intelligible l’activité enseignante, non seulement pour la modéliser, mais aussi pour développer des dispositifs d’intervention et de transmission… (p. 3, par. 1). La voie royale pour saisir cet objet d’étude réside, selon eux, dans le recours à l’ergonomie dont ils ont choisi de faire le fil conducteur de leur entreprise.

L’ouvrage comporte onze chapitres très étoffés, distribués en trois parties. La première porte de façon spécifique sur l’analyse de l’activité enseignante, la deuxième sur la présentation de cadres théoriques pour analyser cette activité. La troisième partie enfin, intitulée Élaboration et marges de l’analyse de l’activité en formation, met en évidence le processus d’analyse des pratiques. Ce livre compact, chargé de notions maintes fois abordées dans d’autres contextes, s’achève par une conclusion non moins dense. Les membres de ce collectif apportent un nouvel éclairage sur une notion trop souvent galvaudée. Ils ont le mérite de rappeler les forces et les limites des travaux conduits jusqu’ici sur l’activité de l’enseignant. Leur apport consiste également à définir de façon claire et articulée divers outils susceptibles d’éclairer les formateurs dans le domaine. En un mot, ils réussissent à présenter une vue panoramique de l’état des lieux concernant l’activité enseignante sous son angle opérationnel.

Sans nier, et loin de là, la valeur de leur travail, les auteurs, en insistant sur la dimension technique, ont pris le risque de donner l’impression que la fonction enseignante peut se résumer au visible, au mesurable et à l’observable. Lessard, dans sa conclusion, a raison de rappeler l’importance de prendre en considération la conscience des sujets. Par-delà les outils, il y a le vécu de l’enseignant, sa propre subjectivité, son propre ressenti. La référence à l’ergonomie, si elle donne une certaine uniformité à l’ensemble de la démarche, n’en marque pas moins les limites. Tout champ de pratique a ses propres repères, celui de l’enseignement comme tous les autres. Cet aspect n’est, hélas, ici abordé que de façon sommaire.

Bref, en dépit de sa dimension unidirectionnelle, axée sur le comment-faire, cet ouvrage aidera certes les experts à développer leur bagage théorique et à s’adonner à leurs intérêts de chercheurs. Je ne suis pas sûr cependant que les praticiens puissent y trouver vraiment leur compte, étant donné la spécificité du vocabulaire utilisé par les auteurs.