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Dans le contexte de la révision des programmes selon une approche par compétence, de la consolidation de l’enseignement supérieur européen, de l’adoption grandissante du modèle curriculaire anglo-saxon, le collectif Savoirs professionnels et curriculum de formation arrive à point nommé en offrant réflexions et analyses sur les principaux enjeux que soulèvent ces thèmes auprès des concepteurs de curriculums, des acteurs qui en assurent l’opérationnalisation ainsi que des chercheurs qui les étudient.

L’ouvrage auquel contribuent dix-huit auteurs rend compte de la complexité et de la multidimensionnalité des rapports qui existent entre les savoirs professionnels et l’élaboration des curriculums de formation et ce, en deux parties distinctes : 1) la place des savoirs professionnels dans les curriculums ; 2) l’analyse de curriculums conçus en fonction de différents types de formation professionnelle.

Un point fort de ce volume est de regrouper des analyses justes et pertinentes portant sur des sujets particulièrement critiques par rapport aux questions curriculaires. À ce titre, on peut citer la distance entre la théorie et la pratique dans le cadre des formations institutionnalisées des écoles ou des universités ou, encore, le caractère tributaire de l’organisation de la formation en fonction des traditions et des conceptions en vigueur dans les établissements qui les offrent. La délicate et toujours présente question de la place et du rôle des savoirs disciplinaires dans la formation est aussi abordée sous des angles intéressants.

Par ailleurs, l’ouvrage comporte des éléments qui enrichissent le cadre entourant le processus même d’élaboration des curriculums en discutant le bien fondé de différentes approches préconisées, leur logique, leurs limites, les dilemmes qui leur sont inhérents et qui forcent les compromis dans les choix, l’influence des valeurs sociétales sur la composition des programmes, la nécessité d’appliquer des modèles intégrateurs, dynamiques, évolutifs et aptes à rendre compte de la complexité de la formation.

En aval du curriculum prescrit, se retrouve le curriculum vécu, traité encore ici de belle façon, que ce soit dans la nécessité d’une articulation efficace entre les différents paliers éducatifs impliqués, dans la compréhension commune des acteurs, dans l’importance à accorder à la pensée réflexive, à la contextualisation dans l’apprentissage, aux questions éthiques et morales ou, enfin, dans l’organisation du stage comme lieu d’intégration et de construction de cohérence.

S’il faut relever des points critiques, on peut dire que l’ouvrage possède les défauts de ses qualités. Comme tout collectif, la synthèse n’est pas toujours facile à faire et l’appréciation du choix des thèmes traités peut varier selon les lecteurs. Aussi, il ne faut pas s’attendre à découvrir un guide pratique ; telle n’était pas l’intention des auteurs. L’angle analytique adopté fournit des cadres conceptuels, soulève des problèmes, pose des questions, mais sans nécessairement apporter des solutions toutes faites ou des procédés à appliquer.

Toutefois, ces points critiques s’avèrent bien minimes face à l’immense intérêt que soulève cet ouvrage qui atteint sa cible en rassemblant, dans une seule et même référence, plusieurs considérations qui traduisent bien la complexité et la multidimensionnalité liées à l’élaboration, à l’opérationnalisation et à l’étude des curriculums de formation.