Corps de l’article
À travers des notes de recherche de formateurs et différents témoignages de finissants, cet ouvrage collectif décrit une réalité, fait un constat, hélas cru, d’un manque de cohérence entre la réalité d’une clientèle multiculturelle et la formation des enseignants. Un certain nombre de thématiques pertinentes à la question de l’éducation multiculturelle dans la formation des enseignants s’y retrouvent : la préparation à l’intervention éducative, l’identité culturelle pluriethnique et la relation enseignants-associés et stagiaires, l’hétérogénéité en salles de classe, multiethnicité et milieux socio-économiquement défavorisés, la gestion de la diversité, etc. ; de plus, différents témoignages de finissants sur les pratiques des enseignants-associés sont rapportés.
Les résultats sont riches d’enseignement à différents points de vue. On y relève l’importance d’acquérir différentes compétences dans une situation d’intervention éducative multiculturelle, on y constate le rôle incontournable des universités dans la formation des enseignants à l’éducation interculturelle, l’importance des activités de formation continue et de perfectionnement, l’utilité de différentes approches pédagogiques en milieux de stages, notamment l’approche coopérative, la posture de l’enseignant dans une classe pluriethnique, etc. Les auteurs y font également ressortir le manque flagrant de données sur la manière dont les enseignants-associés accueillent des stagiaires confrontés à la différence culturelle. Ils déplorent l’état embryonnaire de la recherche sur l’apport des stages pratiques à l’éducation multiculturelle.
L’objectif avoué du livre, à tout le moins, est de stimuler une réflexion qui mènerait à des changements fondamentaux. Cet ouvrage a l’avantage de mettre en évidence les expériences de terrain, mais aussi des contradictions entre les modèles prescrits et les représentations que les acteurs (les enseignants, les formateurs, les élèves, etc.) s’en font. Le nombre varié d’auteurs, qui abordent différents aspects, est un point fort, même si on doit déplorer une faiblesse. En effet, les acteurs que sont les parents sont un maillon manquant des recherches rapportées. Leur participation, leur engagement et leur poids politique indéniables ne sont pas évoqués. Dans ce contexte, la nouvelle politique interculturelle de la Commission scolaire de Montréal apparaît comme une bonne initiative. Elle vise l’intégration des parents et des élèves multiethniques en y consacrant en 2007 un budget d’un million de dollars. Si le manque d’études sur la préparation des enseignants à intervenir en milieu multiculturel est dénoncé, il faudra aussi de l’action, des moyens. Ainsi, le nouveau programme d’Éthique et culture religieuse (ÉCR), prévu pour l’automne 2008, s’inscrit dans une perspective de vivre-ensemble. Il vient confirmer et renforcer ce qui est prôné dans cet ouvrage collectif, à savoir le défi de la diversité culturelle ; mais surtout, il requiert que l’on réponde également aux besoins de formation des enseignants.
Ce livre sera très utile aux étudiants-maîtres, aux enseignants associés, aux enseignants des différents niveaux (primaire, secondaire, collégial et universitaire), aux équipes de rédaction de programmes dans les ministères de l’Éducation, aux comités d’agrément des programmes de formation à l’enseignement, etc. Les chercheurs intéressés par ces thèmes trouveront également des pistes sérieuses pour poursuivre ce que les auteurs ont initié. L’initiative de rassembler ces idées, ces connaissances, ces données, en un document, est un acquis.