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1. Introduction et problématique

Même si l’enseignement de l’éducation physique a connu un essor remarquable au cours des dernières décennies, il n’en demeure pas moins qu’il s’agit d’un phénomène relativement récent. Au milieu du 19e siècle, ce champ d’études en émergence préconisait des exercices physiques souvent pratiqués à l’aide de cerceaux pour occuper le temps libre des élèves (O’Carroll, 1993). Selon certains histo- riens, ce n’est qu’au début des années 1960 que l’éducation physique a favorisé la promotion intense de la culture physique et d’un type particulier de conditionnement physique, généralement liés à des exercices militaires et de posture (Gill, 1963). C’est surtout à cette époque que l’éducation physique, telle que nous la connaissons aujourd’hui, s’est le plus rapidement développée dans le système scolaire public.

C’est aussi le cas en Acadie, O’Carroll (1993) qualifiant même la décennie 1960-1970 de grand réveil sportif. Toute la communauté acadienne était alors témoin du développement spectaculaire des sports et de l’activité physique, ceux-ci s’intégrant de plus en plus à la vie sociale.

C’est d’ailleurs entre les années 1960 et 1970 que la province du Nouveau-Brunswick jette les bases d’une importante infrastructure gouvernementale afin de permettre la construction accélérée d’écoles et d’installations sportives. Et c’est justement dans la foulée de ces réformes que le gouvernement instaure une école normale acadienne, située sur le campus de l’Université de Moncton et offrant entre autres une formation de deux ans entièrement axée sur l’éducation physique.

Toutefois, en 1968, dans le but de réduire l’écart important entre les anglophones et les Acadiens, l’Université de Moncton juge opportun de mettre sur pied un baccalauréat professionnel en éducation physique dont serait responsable un département d’éducation physique, aujourd’hui l’École de kinésiologie et de récréologie. À ce jour, l’École compte au-delà de 900 diplômés, dont la plupart oeuvrent toujours dans le réseau scolaire. En plus de participer activement à la formation sportive, ces professionnels ont grandement contribué à l’essor de l’activité physique et du loisir, non seulement à l’École, mais également à l’intérieur de toute la communauté. Fondés sur ces bases, les Jeux de l’Acadie regroupent annuellement des centaines de jeunes des provinces maritimes, et les compétitions en sont largement diffusées par la Société Radio-Canada. Enfin, la présence accrue d’athlètes acadiens au sein des équipes provinciales participant aux Jeux du Canada, voire aux Jeux olympiques, est aussi à prendre en compte quand on fait le bilan des retombées de la présence de ces professionnels de l’activité physique dans la communauté.

Selon le Conseil canadien des administrateurs universitaires en éducation physique et kinésiologie (2007), il existe actuellement une trentaine d’universités canadiennes offrant des programmes universitaires en éducation physique, en activités physiques, en kinésiologie et en récréologie. Ces formations diffèrent sensiblement en fonction des exigences particulières des universités et des gouvernements provinciaux, et bien que la plupart des diplômes décernés se situent au premier cycle, on peut néanmoins faire des études supérieures, tant au premier qu’au deuxième cycle, dans la plupart des régions du pays.

Malgré le nombre de programmes existants, peu d’études portent sur le cheminement de carrière. En effet, alors qu’environ 83 % des universités considèrent la satisfaction de leurs diplômés envers leurs études en éducation physique comme un indispensable outil de gestion, seulement 23 % d’entre elles ont effectivement pris la peine de réaliser une étude semblable (Walker, 1993). C’est également le constat de Soucie et Brodeur (1979) qui déplorent le nombre limité d’études visant à connaître le cheminement professionnel. Ils soulignent avec raison que ces études s’avèrent souvent utiles pour permettre de mieux cerner les besoins de formation continue et la qualité de la préparation professionnelle. D’où la pertinence de la présente étude qui tentera de mieux connaître ce phénomène et de répondre à la question suivante : Quel est le profil des diplômés en éducation physique de l’Université de Moncton de 1968 à 2001 ?

Cet article se divise en cinq sections. L’introduction permet de mettre en perspective le sujet : l’étude du profil des diplômés en éducation physique d’universités canadiennes. La section suivante est consacrée à la recension des écrits dans ce domaine. La section sur la méthodologie aborde l’instrument de collecte de données, le traitement des données, ainsi que les considérations éthiques. Par la suite, nous faisons état des résultats, de leur analyse et de la discussion de ceux-ci. Nous terminons par un retour sur les faits saillants et sur leurs implications pour la recherche et la pratique.

2. Contexte théorique

Parmi les rares études sur cette question, mentionnons d’abord celle de Soucie et Brodeur (1979) qui avait pour objectif de dresser le profil de carrière de 211 bacheliers francophones en éducation physique de l’Université d’Ottawa. Les résultats révèlent que la plupart d’entre eux ont occupé au moins un poste dans le domaine de l’enseignement ou encore de l’administration scolaire. Le premier emploi a été d’abord obtenu grâce à des contacts personnels et, en règle générale, ce sont ceux qui travaillent à temps plein qui font preuve de la plus grande mobilité. Parmi les problèmes rencontrés en milieu de travail, on invoque couramment les communications et les relations humaines tendues. En majorité, les personnes recensées dans cette étude participent activement aux activités professionnelles ; par ailleurs, celles qui ont poursuivi des études plus poussées se sont surtout dirigées vers les disciplines de l’administration, de la pédagogie, du conditionnement physique et de la physiologie de l’exercice.

Dans le cadre de ses études doctorales, Taylor (1990) a mené une enquête auprès de 378 diplômés des trois cycles d’études de la Texas A&M, une université américaine. Les objectifs visés consistaient à inventorier les opinions sur la qualité de la formation, sur la pertinence des cours, sur l’expérience professionnelle, etc. Il en ressort que les niveaux de satisfaction se situent nettement au-dessus de 3 sur une échelle de 1 à 5.

À la lumière du modèle de croissance professionnelle élaboré par Fessler (1985), les chercheurs Wood et Lynn (2001) ont examiné le cheminement professionnel de six éducateurs physiques. Dans cette étude, les chercheurs tentaient non seulement d’identifier les conséquences d’un environnement favorable ou non à l’esprit de collaboration, mais abordaient également le profil de carrière des éducateurs physiques. Trois éducateurs physiques étaient toujours dans la profession, alors que trois autres l’avaient quittée. Selon cette étude, ce sont des facteurs d’ordre personnel et organisationnel qui expliqueraient le mieux la décision de quitter ou non la profession. En d’autres mots, la révision du choix de carrière résulte davantage de l’importance accordée à des facteurs comme l’isolement, la collaboration, la flexibilité, la résolution de problèmes, le sentiment de contrôle, etc.

Pour leur part, Taks, Delheye, Hartmann-Tews et Demuynck (2003) ont réalisé une vaste enquête auprès de 300 diplômés en éducation physique, sport et loisir (les chercheurs ont utilisé ces trois termes afin de refléter la terminologie particulière aux trois pays étudiés) de Belgique, d’Allemagne et de France. Ces chercheurs voulaient entre autres connaître le cheminement de carrière et les compétences jugées essentielles. En Belgique et en France, le secteur de l’éducation est le principal employeur, alors qu’en Allemagne, c’est plutôt le secteur sportif. En ce qui concerne les compétences, les Belges et les Français estiment primordiales la pédagogie et la communication. Pour leur part, les Allemands optent davantage pour le sens de l’engagement sans pour autant oublier l’aptitude à bien transmettre la matière.

De leur côté, Chan, Lau et Hui (2001) ont mené une enquête sur la satisfaction au travail de 159 enseignants en éducation physique oeuvrant principalement dans les écoles primaires et secondaires de Hong Kong. Les auteurs de l’étude déplorent la rareté des ressources humaines et matérielles, la surcharge de travail et les minces possibilités de promotion. Par contre, l’une des principales motivations qui les incitent à demeurer dans la profession est l’appui et la collaboration des collègues. En revanche, on invoque fréquemment la perte de l’habileté physique comme raison de départ.

Dans un exposé sur les éducateurs physiques oeuvrant au Royaume-Uni, Armour (2000) a analysé leur profil et leurs préoccupations. Déjà, à l’école, ces éducateurs physiques se distinguaient par leur esprit sportif et leur performance scolaire. Toutefois, dans l’exercice de leurs fonctions, ils sont unanimes aujourd’hui à dénoncer leur statut marginal et mal reconnu, développant par conséquent des attitudes de méfiance, plusieurs se demandant même comment faire pour améliorer leur piètre image professionnelle. Devant ce problème, quelques penseurs soutiennent que la solution réside surtout dans une volonté commune, non seulement d’accepter les attributs propres de leur profession, mais aussi de les mettre constamment en valeur (Armour et Jones, 1998 ; Kretchmar, 1996).

Un peu plus de vingt-cinq années se sont écoulées depuis la dernière parution d’une étude canadienne sur les diplômés en éducation physique (Soucie et Brodeur, 1979). C’est donc afin de combler ce vide que, dans la présente étude, nous nous penchons sur la connaissance du profil des diplômés de l’Université de Moncton en visant tout particulièrement la poursuite des objectifs suivants :

  • dresser le profil professionnel des diplômés en éducation physique ;

  • connaître certaines activités de perfectionnement professionnel et les besoins en matière de formation continue de ces diplômés ;

  • évaluer la qualité de la formation reçue durant le programme d’études ;

  • comparer les caractéristiques de ceux qui sont demeurés dans la profession par rapport à ceux qui l’ont quittée.

3. Méthodologie

3.1 Sujets

Pour la période visée, l’âge moyen des répondants était de 40,80 ans, parmi lesquels 65,50 % d’hommes et 34,50 % de femmes ; parmi ces sujets, 74,30 % étaient mariés ou vivaient en union libre. Environ 65,90 % étaient parents, avec à charge, en moyenne, 2,0 enfants. Enfin, près de 57,70 % des personnes qui ont répondu ont l’enseignement comme principale tâche actuelle.

3.2 Instrumentation

Pour mener à bien l’enquête, un questionnaire de 57 questions a été élaboré et validé à la suite d’une consultation auprès de dix diplômés et de huit professeurs en éducation physique de l’École de kinésiologie et de récréologie (ÉKR) de l’Université de Moncton. En plus des questions usuelles sur les renseignements personnels, quatre thèmes particuliers ont été explorés : 1) leur séjour à l’École de kinésiologie et de récréologie, 2) leur expérience de travail, 3) leurs efforts de formation continue, et 4) leur avenir professionnel (Tableau 1). La section sur l’expérience du séjour à l’École de kinésiologie et de récréologie visait surtout à recenser les opinions sur la qualité de la formation reçue, sur les cours jugés utiles et sur l’importance de l’internat à temps plein. Pour ce qui est de l’expérience de travail, on demandait le nom de leur employeur, leur langue de travail, leurs tâches quotidiennes, leur satisfaction au travail, leur salaire, etc. Les efforts de formation personnelle ont été mesurés par la participation à des conférences, l’abonnement à des revues scientifiques, ou encore l’adhésion à des associations professionnelles. Par ailleurs, la partie du questionnaire sur la formation continue était principalement axée sur les études universitaires suivies après leur départ de l’École de kinésiologie et de récréologie. Nous voulions savoir de quelle façon les diplômés envisageaient concrètement leur avenir professionnel. Afin de répondre à cette question, nous avons inventorié, entre autres, l’intention de changer d’emploi ou encore de retourner aux études.

Tableau 1

Thèmes du questionnaire de la présente étude

Thèmes du questionnaire de la présente étude

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3.3 Déroulement

L’enquête s’est déroulée de la mi-janvier à la mi-avril 2001. Après l’envoi du questionnaire par la poste, trois rappels ont été effectués. Nous avons repoussé d’un mois l’échéance du retour du questionnaire pour nous assurer d’obtenir un meilleur taux de réponse. Sur un total de 821 diplômés en éducation physique de l’Université de Moncton, nous avons reçu 293 questionnaires, pour un taux de réponse de 35,70 %.

3.4 Méthode d’analyse des données

Des statistiques descriptives (fréquences, pourcentages, moyennes et écarts-types) ont servi à dresser le profil des diplômés, à connaître les activités et les besoins de formation, à évaluer la qualité de la formation universitaire et à recueillir les renseignements sociodémographiques du groupe à l’étude. Notre plan de traitement des données comprend des comparaisons et des regroupements des données. À partir d’analyses de comparaison (test t), nous avons voulu savoir si des différences significatives sont perceptibles dans les réponses des participants à partir des renseignements généraux recueillis. Des analyses comparatives selon le sexe et le fait d’enseigner ou non ont été réalisées.

3.5 Considérations éthiques

Le questionnaire a été envoyé par la poste, accompagné d’une enveloppe de retour affranchie et d’une lettre de sollicitation décrivant les objectifs de l’étude. De plus, ces derniers ont été repris dans le questionnaire, plus précisément au verso de la page frontispice. En bref, les participants ont été informés que l’étude visait à faire un retour sur la carrière, la formation, la satisfaction au travail et les besoins de formation.

En retournant par la poste le questionnaire dûment rempli, les diplômés manifestaient leur consentement à participer à l’étude de façon volontaire. Toutes les données ont été codées dans un fichier SPSS sans aucune référence aux répondants. À la fois dans la lettre de sollicitation et dans le questionnaire, les chercheurs ont souligné le caractère confidentiel des données. Il était impossible de retracer les coordonnées des répondants.

Certains des résultats de l’étude ont déjà été diffusés dans le réseau acadien des éducateurs physiques. Il va sans dire que nous ferons des efforts supplémentaires dans ce sens, une fois l’article publié.

4. Résultats

4.1 Les études à l’École de kinésiologie et de récréologie

Une large proportion des diplômés interrogés ont fait du bénévolat durant leurs études (57,7 %) et ils jugent que cela a été un facteur déterminant dans l’obtention de leur premier emploi ( = 3,42 ; s = 1,21). De plus, ils estiment que l’inter- nat professionnel à temps plein ( = 3,43 ; s = 1,23) et la qualité de la formation ( = 3,72 ; s = 1,02) ont été des facteurs favorables, toujours dans la recherche du premier emploi. Plusieurs des cours suivis ont été évalués comme utiles ( = 3,91 ; s = 0,85), notamment les cours centrés sur les activités physiques ou le conditionnement physique ( = 4,34 ; s = 1,02), la physiologie de l’exercice ( = 4,08 ; s = 1,26) ou encore la pédagogie ( = 4,07 ; s = 1,24). À noter que l’échelle de réponse au questionnaire allait de 1 à 5, où 1 signifiait Tout à fait en désaccord et 5, Tout à fait en accord.

En tenant compte du sexe et du fait d’effectuer ou non des tâches reliées principalement à l’enseignement, les moyennes des cours jugés utiles ont été comparées à l’aide du test t. À une exception près, il n’y a aucune différence significative ou pratique. Bien évidemment, la signification statistique est une fonction directe de la grandeur de l’échantillon. Dans le cas d’un échantillon composé de 293 diplômés, il est donc plus approprié de s’attarder à la signification pratique, définie ici par une différence entre les moyennes, qui est égale ou plus grande que la moitié des moyennes des écarts types. Pour une discussion détaillée sur le concept anglais de meaningfulness, on se reportera à l’ouvrage de Cohen (1977).

Les diplômés dont les tâches sont surtout axées sur l’enseignement ( = 4,55 ; s = 0,75) estiment que les cours d’activité de conditionnement physique sont plus utiles, contrairement à ceux dont les tâches sont plutôt orientées vers des responsabilités non pédagogiques ( = 4,05 ; s = 1,25), t (282) = -4,20 ; p = 0,001. Il existe également une autre différence significative et pratique : la moyenne cumulative des femmes ( = 3,05 ; s = 0,37) est supérieure à celle des hommes ( = 2,86 ; s = 0,42), t (233) = 3,44 ; p = 0,001.

4.2 L’expérience en milieu de travail

La deuxième partie de notre étude portait sur le profil de carrière. Une fois leurs études terminées, les diplômés se sont consacrés principalement à la recherche d’un emploi (75,8 %) ; la majorité (78,8 %) ayant pris moins de quatre mois pour le trouver. Un peu moins de la moitié des répondants (45,1 %) attribuent leur succès à l’envoi de leur curriculum vitae à des employeurs éventuels. Sur une échelle de Lickert de 1 à 5 où 1 signifie Trop long et 5, Trop court, ils estiment néanmoins raisonnable le temps requis pour obtenir un premier emploi (= 3,36 ; s = 0,82). La plupart d’entre eux (91,1 %) occupent actuellement un poste à temps plein, et leur langue de travail est essentiellement le français (87,8 %). Toutefois, peu de diplômés assument des responsabilités d’ordre administratif (17,4 %). Bon nombre d’entre eux (43,3 %) oeuvrent principalement dans les milieux scolaires, tandis qu’un faible pourcentage est à l’emploi de services de loisirs municipaux (6,8 %) ou d’entreprises privées (12,6 %). Au cours de leur carrière, ils ont occupé 2,9 postes pour le compte de 2,5 employeurs. En moyenne, ils travaillent pour leur employeur actuel depuis 11,9 années. Ils se montrent plutôt satisfaits au travail, à 4,11 sur une échelle où 5 signifie Très satisfait. En revanche, la question relative à la probabilité d’obtenir une promotion d’ici les cinq prochaines années reçoit une réponse dans la moyenne, c’est-à-dire 3,0 sur une échelle graduée de 1 à 5.

Les tableaux 2 à 7 montrent les résultats de certaines comparaisons reliées aux revenus, à la poursuite des études après le baccalauréat ainsi qu’à l’importance du curriculum vitae dans l’obtention du premier emploi en fonction du sexe du répondant et du fait d’enseigner ou non. Tout d’abord, on remarque que la recherche d’un emploi ou la poursuite des études après le séjour à l’École de kinésiologie et de récréologie n’est pas reliée au sexe ni au fait d’enseigner ou non (Tableaux 2 et 3).

Tableau 2

Avenir professionnel selon le sexe

Avenir professionnel selon le sexe

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Tableau 3

Avenir professionnel selon que les sujets ont ou non l’enseignement comme tâche principale

Avenir professionnel selon que les sujets ont ou non l’enseignement comme tâche principale

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En ce qui concerne l’obtention d’un premier emploi grâce au curriculum vitae, il n’y a pas de différence significative entre les hommes et les femmes (Tableau 4). Par contre, ce document joue un rôle plus décisif dans le cas des ensei- gnants (61,1 %) que des non-enseignants (46,3 %), χ2 (1, N = 290) = 6,2 ; p = 0,02 (Tableau 5).

Tableau 4

Obtention du premier emploi grâce au curriculum vitae selon le sexe

Obtention du premier emploi grâce au curriculum vitae selon le sexe

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Tableau 5

Obtention du premier emploi grâce au curriculum vitae selon que les sujets ont ou non l’enseignement comme tâche principale

Obtention du premier emploi grâce au curriculum vitae selon que les sujets ont ou non l’enseignement comme tâche principale

* p < 0,05

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Le tableau 6 montre que les hommes disposent de revenus supérieurs aux femmes : en effet, 54,3 % des hommes ont un salaire annuel égal ou supérieur à 50 000 dollars, c2 (2, N = 282) = 21,0 ; p = 0,000, comparativement à 30,2 % pour les femmes. D’autre part, 50,3 % des enseignants obtiennent des salaires bruts se chiffrant à au-delà de 50 000 dollars, alors que cette proportion est moindre chez les non-enseignants (40,2 %), χ2 (2, N = 282) = 24,5 ; p = 0,00 (Tableau 7).

Tableau 6

Salaire brut personnel selon le sexe

Salaire brut personnel selon le sexe

*** p < 0,000

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Tableau 7

Salaire brut personnel selon que les sujets ont ou non l’enseignement comme tâche principale

Salaire brut personnel selon que les sujets ont ou non l’enseignement comme tâche principale

*** p < 0,000

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4.3 Le perfectionnement professionnel

Un des objectifs de la recherche est de connaître les activités de perfectionnement professionnel des répondants au questionnaire. Aujourd’hui, les responsables des ressources humaines d’organismes ou d’entreprises encouragent fortement leur personnel à participer à des activités de perfectionnement professionnel. On constate que la pratique en matière de ressources humaines dans les organisations favorise la participation aux activités des diverses associations professionnelles. C’est ainsi que 79,5 % des diplômés en éducation physique de l’École de kinésiologie et de récréologie s’inscrivent annuellement à une conférence ou à un colloque professionnel, alors que d’autres s’abonnent à une revue scientifique (23,8 %) ou professionnelle (54,6 %). De plus, chaque année, 58,3 % achètent un livre utile à la réalisation de leurs tâches liées au travail.

En ce qui concerne ces pratiques de perfectionnement, le tableau 8 révèle certaines différences entre les enseignants et les non-enseignants. En particulier, on constate que les enseignants (84 %) participent davantage à une conférence professionnelle que les non-enseignants (73,2 %), χ2 (1, N = 292) = 5,14 ; p = 0,02. Par contre, les non-enseignants (30,1 %) s’abonnent plus souvent à une revue scientifique que les enseignants (19,2 %), χ2 (1, N = 269) = 4,26 ; p = 0,04.

Tableau 8

Nature du perfectionnement professionnel selon que les sujets ont ou non l’enseignement comme tâche principale

Nature du perfectionnement professionnel selon que les sujets ont ou non l’enseignement comme tâche principale

* p < 0,05 ** p < 0,01

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En ce qui a trait aux activités des associations provinciales, les enseignants (84,9 %) y participent plus fréquemment que les non-enseignants (61,7 %), χ2 (1, N = 286) = 20,21 ; p = 0,001, quoique les non-enseignants (47,7 %) soient plus présents au sein d’associations nationales que les enseignants (21,7 %), χ2 (1, N = 254) = 19,2 ; p = 0,001. Soulignons enfin qu’il n’y a aucune différence entre les hommes et les femmes par rapport au perfectionnement professionnel (Tableau 9).

Tableau 9

Nature du perfectionnement professionnel selon le sexe des sujets

Nature du perfectionnement professionnel selon le sexe des sujets

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4.4 L’avenir professionnel

En ce qui a trait à leur avenir professionnel, bien que 14,8 % des répondants déclarent avoir l’intention de se mettre prochainement à la recherche d’un meilleur emploi, la plupart des diplômés (63 %) ne songent pas actuellement à quitter leur emploi.

Après avoir réussi leurs études à l’École de kinésiologie et de récréologie, plusieurs ont choisi de poursuivre leur formation universitaire. C’est ainsi que 49,1 % des diplômés de cette école ont ajouté à leur formation un certificat ; 22,9 %, un baccalauréat ; 24,6 %, une maîtrise et 2,7 %, un doctorat. Dans le cas de la maîtrise, l’administration est le domaine d’études le plus populaire (40,8 %). Au moment du sondage, environ 12 % des diplômés suivaient un autre programme d’études, principalement en administration (55,9 %).

Afin de parfaire leur formation, certains examineraient favorablement la possibilité de s’inscrire à un programme de deuxième cycle (26,5 %) offert éventuellement par l’École de kinésiologie et de récréologie, soit donné à distance (77,8 %), soit par des professeurs sur place en région (62,2 %). Dans l’hypothèse de la création d’une maîtrise à cette école, le programme devrait être orienté, selon les répondants, vers un axe particulier, par exemple l’activité physique et la santé ( = 4,44 ; s = 0,98), l’évaluation de la condition physique ( = 4,05 ; s = 1,05), l’entraînement sportif ( = 3,78 ; s = 1,90), la réadaptation cardiaque ( = 3,63 ; s = 1,20) et le loisir thérapeutique ( = 3,51 ; s = 1,24).

5. Discussion des résultats

Les résultats de la présente étude menée auprès de diplômés en éducation physique apportent non seulement un certain éclairage sur leur passage à l’Université de Moncton, mais aussi sur leur cheminement subséquent. Encore une fois, même si les écrits sur le cheminement de carrière des éducateurs physiques ne sont pas nombreux, il nous est néanmoins possible de comparer nos résultats avec quelques études réalisées au Canada et ailleurs.

5.1 Qualité de la formation

En ce qui a trait à la qualité de la formation, rappelons que la plupart des répondants considèrent que leur séjour à l’École de kinésiologie et de récréologie a été profitable, les cours et le stage ayant même été jugés comme des éléments propices à l’obtention d’un premier emploi. Soulignons que ces résultats à propos de la qualité de la formation reçue à cette école corroborent ceux de Taylor (1990).

Même si celle-ci date déjà de trois décennies, notre étude se compare également à celle de Soucie et Brodeur (1979) notamment sur le plan de la méthodologie. Par exemple, nos échantillons se chiffrent respectivement à 293 et 211 répondants ; toutefois, le pourcentage d’hommes dans l’enquête de Soucie et Brodeur (88 %) est plus élevé que le nôtre (65,5 %). L’explication réside probablement dans le fait qu’un plus grand nombre de femmes ont accès aujourd’hui aux études postsecondaires dans le domaine de l’éducation physique.

5.2 Recherche du premier emploi

D’entrée de jeu, les diplômés affirment que leur recherche d’emploi s’est assez bien déroulée. En effet, ils estiment raisonnable le temps requis pour se trouver un emploi. En fait, un peu plus des deux tiers (76,1 %) ont mis entre trois et quatre mois pour accéder au marché du travail. Cette situation s’explique sans doute par le nombre d’emplois disponibles au Nouveau-Brunswick à cette époque, alors que les programmes de retraite anticipée à la fin des années 1990 faisaient en sorte que plusieurs postes en enseignement sont devenus disponibles.

Dans notre étude, 57,7 % affirment que le bénévolat a été un facteur déterminant dans l’obtention du premier emploi. Par contre, Soucie et Brodeur (1979) soulignent que ce sont surtout les contacts personnels qui permettent le mieux d’obtenir le premier poste permanent. On peut penser toutefois que ces contacts personnels ont été établis dans le cadre d’activités de bénévolat.

5.3 Expérience de travail des répondants

Tout comme dans l’étude de Soucie et Brodeur (1979) où 56,9 % occupaient un poste d’enseignant, la majorité (57,7 %) des répondants de l’École de kinésiologie et de récréologie effectuent également des tâches liées directement à l’enseignement. Bien que ce soit dans des proportions différentes, Taks, Delheye, Hartmann-Tews et Demuynck (2003) rapportent également qu’une grande majorité de diplômés européens occupent un emploi dans le secteur de l’éducation. Cette situation s’expliquerait par le fait que les finissants en éducation physique ont traditionnellement comme principal débouché les postes offerts dans un contexte scolaire. Dans la même veine, Banks et Wright (2001) rappellent que les quatre débouchés les plus importants sont justement l’éducation, sans pour autant oublier la physiologie, la biomécanique et la gestion du sport. D’ailleurs, si la majorité des diplômés de l’École de kinésiologie et de récréologie (43,3 %) oeuvrent principalement dans le milieu scolaire, il n’est pas surprenant qu’ils aient jugé utiles les cours universitaires reliés à l’activité physique ou au conditionnement physique. Comme on le sait, ces cours accordent, à de rares exceptions près, une large place au geste pédagogique.

En raison d’une situation socioéconomique changeante, le domaine de l’enseignement est devenu de moins en moins une option pour les finissants de l’École de kinésiologie et de récréologie. Comme le souligne Zechetmayr (1986), la diminution du nombre d’élèves, les compressions budgétaires, l’élimination ou même le regroupement de postes font en sorte que plusieurs doivent se tourner vers d’autres types d’emplois où leurs compétences peuvent s’avérer utiles.

Un autre aspect de notre étude touche à la satisfaction au travail. Les répondants de notre étude évaluent favorablement leur satisfaction au travail, ce qui n’est pas toujours le cas dans les études recensées. Armour (2000), par exemple, fait état de conditions de travail difficiles pour les éducateurs physiques, qui mentionnent, entre autres, une surcharge de travail, un pessimisme quant aux chances d’avancement, un manque d’appui professionnel, le caractère routinier du travail, voire même des cas de sexisme. Il faut dire que les chances d’avancement, pour les éducateurs physiques, se situent surtout dans la promotion à des tâches administratives. Or, une affectation à des postes de nature administrative peut impliquer des études de 2e cycle, ce qui n’est pas toujours facile après un séjour dans le monde du travail.

Quant au sondage de Chan et ses collaborateurs (2001), il fait également ressortir un niveau de satisfaction au travail fort acceptable, celui des femmes étant même relié davantage au temps consacré à la formation. En revanche, Soucie et Brodeur (1979) font remarquer que ce sont les nombreux problèmes de communication et de relations humaines qui affectent négativement la satisfaction au travail. Enfin, Woods et Lynn (2001) soulignent qu’en dernière analyse, ce sont surtout des facteurs personnels et organisationnels qui influencent davantage la décision de rester dans la profession ou de la quitter.

5.4 Perfectionnement professionnel des répondants

Comme en font foi les résultats de notre étude, les occasions de formation sont prisées par les professionnels. En effet, 79,5 % des répondants s’inscrivent annuellement à un congrès ou à un colloque professionnel. Mentionnons toutefois que les enseignants participent davantage à des activités formatives que les non-enseignants. En comparaison, Soucie et Brodeur (1979) constatent que la participation aux congrès, dans le cas de 29,6 % des répondants, varierait entre un et trois depuis l’obtention du diplôme, alors que 17,6 % auraient pris part aux activités d’un peu plus de 16 congrès. Toujours selon cette dernière étude, l’appartenance à des associations professionnelles se chiffrait à 63 % environ. À vrai dire, ces résultats sont semblables à ceux de notre étude, puisque 75 % des hommes et 74 % des femmes sont membres d’une association provinciale ; 34 % des hommes et 31,1 % des femmes sont membres d’une association nationale.

Le désir de poursuivre des études de 2e cycle s’est concrétisé chez 24,5 % de nos répondants, notamment dans le domaine de l’administration (40,8 %). Une fois de plus, ces résultats concordent avec ceux de Soucie et Brodeur (1979), dans la mesure où 35,1 % des membres du groupe analysé par ces auteurs ont poursuivi des études en administration, et 21,4 % en pédagogie ou en didactique.

5.5 Salaire des répondants

Au chapitre des salaires, notre étude montre que les hommes obtiennent des salaires plus élevés que les femmes, alors que les enseignants sont plus nombreux que les non-enseignants à recevoir un salaire supérieur à 50 000 dollars. Zechetmayr (1986) est arrivé à des conclusions semblables dans le cadre de son étude sur les possibilités d’emplois en éducation physique. L’analyse de Finnie et Frenette (2003), portant sur trois cohortes distinctes de diplômés canadiens, met également en lumière le fait que les hommes gagnent plus que les femmes. Plus précisément, ces chercheurs ont montré que le pourcentage d’augmentation salariale est plus élevé chez les hommes pour les cohortes 1982 et 1990. Ce résultat n’est guère surprenant, compte tenu des inégalités salariales entre les hommes et les femmes dans presque tous les secteurs d’activités professionnelles.

6. Conclusion

La présente étude auprès d’un échantillon de 293 diplômés du programme d’éducation physique de l’Université de Moncton entre les années 1968 et 2001 visait essentiellement à connaître le profil de carrière, la satisfaction envers la formation universitaire reçue ainsi que les activités de perfectionnement professionnel des répondants. En effet, malgré le grand nombre de programmes en éducation physique et l’intérêt des gestionnaires pour ce genre d’information, peu de chercheurs se sont intéressés à cette question.

L’instrument de collecte de données consistait en un questionnaire comprenant une soixantaine de questions, particulièrement en ce qui a trait au séjour des anciens étudiants à l’École de kinésiologie et de récréologie, à leur expérience de travail, à leurs efforts de formation continue ainsi qu’à leur avenir professionnel. En plus des statistiques descriptives qui ont servi à dresser le profil des répondants, nous avons réalisé des analyses comparatives selon le sexe, et selon le fait d’enseigner ou non.

Les résultats de notre étude ne sont pas très différents de ceux obtenus par Soucie et Brodeur (1979) auprès d’une autre clientèle. Par ailleurs, la situation des diplômés en éducation physique ne semble guère avoir changé au cours des 25 dernières années. Les possibilités d’emplois se situent surtout dans le secteur de l’éducation, et l’expérience du bénévolat joue toujours un rôle important dans l’obtention du premier emploi. Dans l’ensemble, les répondants accordent beaucoup d’importance au perfectionnement professionnel, et se disent généralement satisfaits de la formation universitaire reçue.

Les résultats de notre étude sont utiles aux administrateurs dans la planification des programmes d’études à l’École de kinésiologie et de récréologie, que ce soit pour la modification des programmes de 1er cycle ou pour l’élaboration de nouveaux programmes de cycles supérieurs. Ils offrent également des données aux associations professionnelles quant à la participation des professionnels de l’éducation physique à des activités de perfectionnement.

Pour ce qui est de la recherche comme telle, le questionnaire conçu dans le cadre de ce projet pourrait servir à une étude longitudinale (tous les cinq ans, par exemple) auprès des diplômés en éducation physique de l’École de kinésiologie et de récréologie. Le questionnaire pourrait aussi être utilisé auprès d’autres cohortes d’étudiants (en kinésiologie, par exemple) de la même école (ÉKR), ou d’autres écoles ou facultés, à l’Université de Moncton ou ailleurs. Nous pourrions également comparer les résultats obtenus auprès des diplômés en éducation physique avec ceux des diplômés en récréologie, groupe qui a également fait l’objet d’un sondage et dont les résultats ont déjà été publiés (LeBlanc, Ouellette et Singleton, 2003/2004).

Une autre étape de la recherche pourrait aussi consister à examiner les raisons expliquant les différences notées entre les enseignants et les non-enseignants, et entre les hommes et les femmes, notamment en ce qui a trait au perfectionnement professionnel.