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Cet ouvrage retrace d’abord le parcours de la profession d’éducateur de jeunes enfants (EJE), dont la situation est loin d’être simple. Il s’agit d’une profession marquée du sceau de la précarité : longtemps en mal d’identité, les éducateurs de jeunes enfants sont en fait, de conclure les auteures, des […] travailleurs sociaux spécialistes de la petite enfance (p. 182). La conception de l’enfant constitue le fondement à la fois de la formation des éducateur de jeunes enfants et de leur rôle : favoriser le développement global de l’enfant (en s’appuyant sur un projet éducatif clairement défini), faciliter la fonction parentale, contribuer à une démarche de prévention précoce en facilitant l’accès à la scolarisation, tels sont quelques-uns des rôles qui incombent à ces professionnels. Quant à la formation des éducateurs de jeunes enfants, elle est axée sur quatre domaines de compétences : accompagnement du jeune enfant et de sa famille, action socioéducative auprès de celui-ci, communication professionnelle, et dynamiques institutionnelle et partenariales. Bien conçue, cette formation représente une avancée dans l’évolution de la profession, circonscrite avec précision. Toutefois, il semble qu’il y ait encore loin de la coupe aux lèvres et que les débouchés d’emploi restent encore incertains pour les éducateurs de jeunes enfants.
Ce volume, dont la présentation et la lecture sont agréables, notamment grâce à de nombreux encarts qui soulignent des points précis en lien avec le texte principal, ainsi que des schémas et tableaux qui illustrent et complètent le propos des auteurs, brosse un tableau exhaustif d’une profession mal connue. Son approche historique permet de comprendre les méandres de l’évolution de la profession et en fait ressortir la complexité, mais engendre du même coup une certaine confusion chez le lecteur : les considérations d’ordre social y alternent avec celles qui concernent la conception de l’enfant en bas-âge et la formation initiale, tous points qui seront repris plus tard dans les deux autres parties de l’ouvrage.
La description du jeune enfant et de son développement, présentée en lien avec ses milieux de vie et, surtout, avec sa famille, permet de comprendre les méthodes d’intervention préconisées, ainsi que la logique qui sous-tend les différents aspects de la formation des éducateurs de jeunes enfants. Cependant, cette partie de l’ouvrage est dépourvue de références, lacune en partie comblée par un tableau récapitulatif, fourni en annexe, des sources sur lesquelles se fonde cette vision de l’enfant. L’examen de ce tableau ne manquera pas d’étonner le lecteur nord-américain : outre que ni Bowlby, ni Vygotsky, ni Bronfenbrenner, parmi les plus grands, n’y figurent, l’absence de données empiriques est particulièrement frappante. Autre pays, autres moeurs, dit-on. Le fossé qui existe entre nos cultures scientifiques est ici très apparent.
Par contre, la partie de l’ouvrage consacrée à la formation des éducateurs de jeunes enfants nous est plus familière : domaines de compétences et de formation, ancrage de la pratique dans la théorie témoignent d’une approche analogue à la nôtre, de sorte que sa cohérence est plus évidente à nos yeux. Bien que résolument français, cet ouvrage peut cependant intéresser le lecteur québécois, dans la mesure où il constitue une source de comparaison et de réflexion quant à nos propres structures d’accueil et d’éducation destinées à la petite enfance.