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Les auteurs de cet ouvrage présentent le cadre théorique et conceptuel de l’énaction comme outil d’organisation des activités d’apprentissage des apprenants, de formation et de pratique enseignante. Le premier chapitre développe l’idée de la connaissance comme action en situation (un connaître), où l’acteur agit dans une dialectique situant-situé qui définit la situation. Le deuxième chapitre propose l’exploration des notions du réseaux d’actions virtuelles, qui composent le versant situant de la situation (ce qu’apporte l’acteur à la situation) et de spielraum ou espace de manoeuvre qu’offre l’environnement dans son interaction avec l’acteur. Le troisième chapitre lie ces deux notions en explicitant comment l’acteur en situation passe, grâce à l’expérience et au développement de ses compétences, d’une relation de confusion avec l’environnement à une relation d’extériorité qui lui fournit l’occasion du recul réflexif, pour arriver enfin à une relation d’intériorité, analogue à la compétence de l’expert qui dépasse la compréhension des possibilités de l’environnement en interaction avec lui, pour le projeter dans une relation de créativité chez l’être en situation. Dans le quatrième chapitre, on examine l’intelligence et la compétence dans une perspective énactive, et on les redéfinit en termes situationnels comme intelligences dispositionnelle, positionnelle et gestuelle. Le cinquième chapitre fait appel à la métaphore du karaté-do pour expliciter la notion de la relation d’intériorité dans une éducation-do, finalisée par l’enseignant qui s’inscrit dans une voie selon trois éléments lui permettant d’approfondir l’intériorité : l’esprit zen (la disponibilité de l’acteur), le do (la voie de l’engagement personnel dans sa pratique) et le maai (la distance spatiotemporelle entre l’acteur et son objet, ou la situation dans laquelle il évolue et à laquelle il doit s’harmoniser). Le dernier chapitre permet d’opérationnaliser les concepts élaborés dans les chapitres précédents dans un contexte d’enseignement-apprentissage et fournit en outre des pistes pour devenir un praticien énactif, tant sur les plans dispositionnel, positionnel et gestuel.

La théorie de l’énaction développée dans cet ouvrage recadre l’apprentissage et le développement professionnel dans un système global, beaucoup plus près de ce que révèle la recherche sur les diverses dimensions de la pratique enseignante et de la compétence experte que les approches cognitiviste ou constructiviste traditionnelles. Cette théorie intègre en outre les dimensions émotionnelle et corporelle souvent négligées, lesquelles fournissent des repères analytiques et réflexifs nécessaires à la compréhension et à la transformation de l’action de l’enseignant et de l’apprenant. Certains propos philosophiques plus abstraits sont illustrés par des métaphores accessibles à des étudiants en formation initiale, par exemple, bien qu’il aurait été enrichissant pour le lecteur de se représenter plus fréquemment l’actualisation des divers concepts dans des situations d’enseignement. Le cadre théorique développé dans cet ouvrage ajoute une profondeur certaine au concept de compétence et aux orientations axiologiques qui en découlent, en situant les conditions d’un apprentissage authentique et signifiant ainsi que sa finalité, pour l’enseignant à la formation initiale ou continue, ou pour ses élèves.