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1. Introduction et problématique

Ce texte présente les résultats d’une étude réalisée dans le contexte de stages en formation initiale à l’enseignement secondaire visant à répondre à la question : comment se construisent les compétences en enseignement ? Nous avons travaillé avec des étudiants au moment de leurs stages de deuxième, troisième ou quatrième années, le stage de première année n’ayant pas été retenu car il ne comporte pas de prise en charge d’enseignement. Précisons qu’il s’agit d’étudiants différents chaque année, qui n’ont pas fait l’objet d’un suivi longitudinal. Les échanges sur les pratiques des stagiaires, réalisés en présence de leur enseignant associé et du superviseur universitaire, visaient à rendre explicites les ressources mobilisées – du moins les ressources que ces stagiaires étaient en mesure de verbaliser – dans la manifestation des compétences reliées à l’acte d’enseigner, compétences décrites dans le référentiel du ministère de l’Éducation du Québec (2001). Dans ce texte, nous visons donc, d’abord, à identifier les ressources que les stagiaires disent mobiliser dans l’action. Ensuite, nous explorons plus précisément la part des savoirs théoriques dans les ressources qu’ils évoquent.

Une formation universitaire pendant laquelle sont intégrés connaissances et savoirs, tant disciplinaires que didactiques, tant pédagogiques que fondamentaux, et incluant un stage en milieu scolaire lors de chacune des quatre années, voilà ce qui caractérise la formation initiale à l’enseignement au Québec depuis plus d’une décennie. En 2001, le ministère de l’Éducation précisait, dans un référentiel de compétences professionnelles, ce qui constitue dorénavant le profil de sortie en fin de formation à l’enseignement. Les compétences, au nombre de 12, se regroupent sous quatre domaines : les fondements de l’éducation, l’acte d’enseigner, le contexte scolaire et social, et l’identité professionnelle.

Ce référentiel a un effet structurant, puisque tous les programmes de formation à l’enseignement doivent viser le développement des compétences qui y sont présentées. Mais comment se construisent les compétences d’un professionnel pendant la formation initiale ? Inspiré entre autres des travaux de Rey (1998), Perrenoud (1999) et Le Boterf (1997), le ministère de l’Éducation du Québec (2001) a retenu les caractéristiques suivantes pour définir une compétence professionnelle : pratique intentionnelle déployée en contexte réel, elle se fonde sur un ensemble de ressources et elle est de l’ordre du savoir-mobiliser en contexte d’action professionnelle. C’est aussi la position de Tardif (2006), qui évoque les caractères intégrateur, combinatoire, développemental, contextuel et évolutif des compétences. Le contexte de notre étude étant celui des périodes de stage en milieu scolaire pendant la formation à l’enseignement, certaines des caractéristiques des compétences mentionnées ci-dessus nous interpellent particulièrement à l’étape de leur construction en formation initiale : l’identification des ressources qui fondent la compétence et la mobilisation de ces ressources.

Une étude récente de Piot (2008) sur la construction des compétences à l’enseignement a été réalisée avec des enseignants de niveaux variables d’expérience, certains étaient en début de carrière, alors que les plus expérimentés avaient plus de 20 ans de pratique. L’absence d’études en formation initiale confirme le constat de Le Boterf (2001) : jusqu’à maintenant, la recherche sur le développement des compétences professionnelles a été réalisée avec des praticiens en situation de travail ou en formation continue. On sait donc peu de choses à propos de leur construction en formation initiale. Il a semblé important de s’interroger sur ce qui nourrit la compétence car, en formation initiale, certaines des ressources susceptibles d’être mobilisées dans l’action par les futurs enseignants ne sont pas encore acquises, les stages ayant lieu tout au long des quatre années de formation, en concomitance avec des cours, ateliers et séminaires universitaires. Plusieurs questions se posent alors à propos des ressources disponibles pour la pratique : Les stagiaires sont-ils capables de verbaliser les ressources auxquelles ils font appel pour agir ? Quelles ressources disent-ils être en mesure de mobiliser ?

2. Contexte théorique

L’étude des ressources mobilisées dans l’action repose sur une conception dynamique de la compétence. La proposition, par Le Boterf (2002), d’un double équipement de ressources, incorporées et externes, nous sert de cadre pour appréhender ce qui semble utile aux stagiaires pour l’action en classe. La liste de ressources a par ailleurs été adaptée à la situation d’enseignement en utilisant la typologie des savoirs enseignants proposée par Cochran, DeRuiter et King (1993).

2.1 Les compétences professionnelles et les ressources pour agir

Définissons d’abord le concept de compétence retenu dans ce texte, ce terme étant polysémique. Dans un large tour d’horizon, Martineau (2006) montre l’évolution du concept et les différents sens qu’il a pu prendre, selon les perspectives privilégiées : en sociologie ou en psychologie du travail, en administration des organisations ou, plus récemment, en éducation. Bien que l’approche par compétences tire son origine de l’entreprise et de ses besoins en formation de personnel compétent et efficace, les chercheurs du domaine de l’éducation se sont approprié le concept et l’ont adapté pour l’apprentissage scolaire (par exemple, Perrenoud, 2004). Dans ce dernier domaine, il se dégage un large consensus autour de la définition suivante : la compétence est l’orchestration de ressources diverses, en situation (Perrenoud, Altet, Charlier et Paquay, 1996). Elle peut également se définir comme une relation entre les capacités d’un individu et ce que requiert une classe particulière de situations (Ellström, 1997). La compétence est en effet liée à la notion de famille de situations. Il s’agit donc d’une réponse qui requiert […] l’intégration de tout un ensemble de savoirs, de savoir-faire et de savoir-être (Martineau, 2006, p. 25). C’est la perspective que nous retenons dans ce texte, notre contexte étant celui des programmes de formation à l’enseignement, élaborés pour répondre aux orientations du ministère de l’Éducation du Québec (2001).

Un professionnel compétent sait sélectionner, organiser et mobiliser des ressources afin d’agir […] avec pertinence dans un contexte particulier, selon Le Boterf (2002, p. 46), dont les travaux ont grandement inspiré les orientations prises en formation initiale à l’enseignement, au Québec. Une formation aux compétences suppose donc l’acquisition de ressources de diverse nature et l’apprentissage de la mobilisation de ces ressources pour agir, c’est-à-dire une intériorisation progressive de séquences d’actions selon ce que requièrent les situations professionnelles. Même si, dans ce texte, nous ne traiterons pas du processus lui-même de mobilisation des ressources ni des conditions pour le faire, cet aspect de la compétence reste présent. D’une part, parce que les ressources, encore partielles, d’un novice ne sont pas nécessairement disponibles sous forme de blocs mobilisables dans l’action, comme le suppose Le Boterf (2002) chez les praticiens expérimentés. D’autre part, à l’instar de Perrenoud (2004), nous devons faire l’hypothèse que les savoirs doivent subir des transformations pour devenir des ressources pour l’action. À cet égard, une étude de Borges (2005) sur les savoirs d’enseignants brésiliens montre bien la transformation que requièrent les savoirs disciplinaires pour pouvoir être mis au service de l’enseignement, afin de […] rendre la connaissance de la matière enseignable, compréhensible, attirante pour les élèves (p. 37). La question de l’identification des ressources disponibles nous paraissant préalable à celle des mécanismes impliqués dans leur mobilisation, seule cette dimension est traitée dans ce texte ; d’autant plus que l’étude des mécanismes de mobilisation des ressources nécessiterait le recours à d’autres dispositifs méthodologiques que ceux utilisés dans notre recherche.

Le Boterf (2002) décrit sous la forme d’un double équipement les ressources qui peuvent être mobilisées par un professionnel : des ressources incorporées et des ressources externes. Le tableau ci-dessous présente ces catégories de ressources.

Tableau 1

Double équipement de ressources du professionnel (tableau réalisé par les auteures à partir de Le Boterf, 2002)

Double équipement de ressources du professionnel (tableau réalisé par les auteures à partir de Le Boterf, 2002)

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Les ressources incorporées par le professionnel sont inséparables de sa personnalité (Le Boterf, 2002, p. 116) et demeurent hétéroclites : des savoirs acquis, des savoir-faire développés, des aptitudes et caractéristiques personnelles. Les savoirs s’acquièrent en formation. Les savoirs théoriques (concepts, savoirs disciplinaires) sont des savoirs formalisés, qui aident à comprendre les situations. Il ne s’agit pas ici d’un savoir actif, subordonné à l’action : il y a lieu d’y voir plutôt une relation de questionnement critique (Le Boterf, 2002, p. 118) entre savoir théorique et action. C’est également la position qu’adopte Legendre (1998). Selon ce dernier, le praticien possède également un ensemble de croyances, c’est-à-dire des connaissances naïves, plus ou moins fondées, qui orientent son action. Il peut également compter sur un certain nombre de savoir-faire, certains formalisés, d’autres empiriques, essentiellement développés dans/par l’exercice du métier. Parmi ces savoir-faire, certains sont de l’ordre des relations qu’entretient un professionnel avec autrui ; d’autres sont plutôt d’ordre cognitif et […] correspondent à des opérations intellectuelles nécessaires à la formulation, à l’analyse et à la résolution de problèmes, à la conception et à la réalisation de projets, à la prise de décision, à la création ou à l’invention (Le Boterf, 2002, p. 139). Enfin, parmi les ressources internes dont dispose un praticien pour agir, se retrouvent ses aptitudes et qualités personnelles, des aspects émotionnels et physiologiques qui le font réagir, des éléments de sa culture, etc. Pour leur part, les ressources externes sont situées dans l’environnement du professionnel ; on dit qu’elles sont objectivées (Le Boterf, 2002, p. 157), car extérieures à lui, qu’il s’agisse de l’accès à des réseaux professionnels, à des banques d’informations ou à du matériel.

Cette catégorisation de ressources, adaptée à la situation de l’enseignement, correspond à notre intérêt de recherche, qui est d’identifier les ressources mises à contribution par les stagiaires dans leur agir. L’adaptation que nous avons faite des catégories de Le Boterf (2002) qui concernent les savoirs requis pour la situation d’enseignement tient compte de la typologie des savoirs proposée par Cochran et ses collaborateurs (1993) : ces derniers, tout en s’inspirant des travaux de Shulman (1986), mais en adoptant une perspective constructiviste, définissent le pedagogical content knowing comme résultant d’une intégration graduelle, par le futur enseignant, de connaissances à propos de la pédagogie, de la matière, des élèves, de l’environnement. Nous précisons la nature de ces savoirs dans le tableau 1. Nous adhérons à cette conception constructiviste du développement des savoirs et des compétences pendant la formation. Parmi les ressources qui peuvent être mobilisées par les stagiaires, en lien avec les compétences de l’acte d’enseigner, notre intérêt s’est porté plus particulièrement sur la part des savoirs. Le terme savoir fait référence à un ensemble de connaissances systématisées dans un domaine, supposant des acquisitions plus approfondies que la connaissance (Legendre, 2005).

2.2 Le recours aux savoirs pour agir

Parmi les savoirs mobilisables par un professionnel, certains, issus de la recherche, ont été formalisés et sont donc considérés hors contexte, alors que d’autres se déclinent plutôt en savoirs tacites, ancrés dans l’action. Barbier (1996) définit la première catégorie, les savoirs objectivés issus d’une construction sociale, […] comme des énoncés propositionnels faisant l’objet d’un jugement social se situant dans le registre de la vérité ou de l’efficacité (p. 9). Alors que pour lui, les savoirs d’action ou d’expérience se caractérisent par […]le fait que dans tous les cas le référent en est constitué par ce que nous pourrions appeler des composantes identitaires (p. 9), des savoirs inférés à partir de constats. Il suggère d’ailleurs de réserver le terme savoir pour désigner des énoncés communicables.

S’appuyant sur les travaux de Bromme et Tillema (1995), Saussez et Paquay (2004) discutent des savoirs professionnels en termes d’amalgame de concepts scientifiques et de concepts quotidiens, formulent l’hypothèse que les concepts quotidiens, de l’ordre de croyances ou de conceptions préscientifiques (Legendre, 2005) prédominent chez les enseignants. Les croyances sont définies par Margerum-Leys et Marx (2004) comme des propositions implicites ou explicites tenues pour vraies et acceptées comme guide pour l’action ou les décisions. L’analyse proposée par Bromme et Tillema (1995) suggère que les ratios entre concepts scientifiques et quotidiens varient d’une profession à l’autre, selon un certain nombre de caractéristiques qui seraient défavorables à la pratique enseignante. Les concepts quotidiens dominent en effet dans les professions proches du quotidien, c’est-à-dire là où les exigences quant à l’utilisation de connaissances scientifiques sont peu élevées (dans l’argumentation des décisions, par exemple), ou encore là où la formation et l’utilisation partagée de connaissances scientifiques dans l’analyse des situations professionnelles ne sont pas systématiques. Suivant l’analyse de ces auteurs, chez les enseignants, les outils d’intelligibilité que sont les savoirs seraient donc majoritairement des concepts peu formalisés, souvent tirés du quotidien et assimilables à des croyances. La recherche montre en effet que les enseignants agissent davantage selon leurs croyances, fondées sur leur expérience, plutôt que selon des connaissances plus objectives (Margerum-Leys et Marx, 2004). Ces croyances se trouvent même parfois en opposition avec des connaissances objectivées.

Dans le contexte des stages, Martin (2004) explique, pour sa part, le peu de recours aux savoirs savants par l’urgence de réagir aux situations, qui oriente davantage le stagiaire vers des savoirs opératoires, argumentés par des explications relevant du sens commun. Cela conduirait graduellement à un lessivage de savoirs universitaires plus formels. Dans ce texte, nous retenons cette distinction entre savoirs formalisés et croyances pour l’écart épistémologique entre ces concepts, et nous faisons l’hypothèse que les stagiaires évoquent davantage des concepts quotidiens que des savoirs formels pour expliquer leur pratique. En éducation, la conclusion de Carter (1990) à l’effet que les connaissances des enseignants sont peu abstraites et formalisées nous semble en effet toujours valable.

Ce texte vise à explorer un volet de la construction des compétences professionnelles, celui des ressources que les stagiaires affirment mobiliser en formation à l’enseignement secondaire pour expliquer leur agir, en regard des compétences regroupées sous l’acte d’enseigner du référentiel (Ministère de l’Éducation du Québec, 2001). Dans un deuxième temps, il vise à examiner de manière plus particulière la place occupée par les savoirs dans le discours des stagiaires sur leur pratique, dans le contexte particulier de l’un de leurs stages. Le dispositif de l’étude permet d’identifier les ressources mentionnées pour agir, sans toutefois prétendre répondre à la question des mécanismes de mobilisation de ces ressources dans l’action.

3. Méthodologie

Selon la définition présentée, les compétences sont en partie inobservables (Legendre, 2007) ; leur présence peut être inférée à partir d’actions, de comportements (Barbier, 1996). Il en va de même pour les ressources mobilisées dans la pratique qui ne sont pas directement observables. Le dispositif méthodologique de l’étude est conçu pour permettre l’accès au raisonnement pédagogique des stagiaires. Seront donc privilégiés la position (ou le discours ou le point de vue) des stagiaires, enseignants en formation à l’enseignement secondaire et leurs discours sur leur pratique, même si l’on considère que certains éléments échappent à la conscience et qu’une pratique ne peut totalement être mise en mots. Nous sommes intéressées par ce que peuvent révéler les stagiaires à propos de leur action pédagogique, enregistrée sur vidéo, même s’il est évident qu’il s’agit, de leur part, d’une reconstruction a posteriori : la subjectivité même des stagiaires est recherchée dans une étude sur la construction de leurs compétences à enseigner.

3.1 Sujets

Des stagiaires en formation à l’enseignement secondaire ont été invités à commenter, en explicitant les ressources auxquelles ils ont eu recours, des situations de classe enregistrées sur vidéo correspondant aux compétences suivantes qui sont au programme de chacun des stages : conception de situations d’enseignement-apprentissage, pilotage de ces situations, évaluation de la progression des apprentissageset supervision du fonctionnement du groupe-classe. Nous avons eu accès à l’analyse de séances de 22 stagiaires volontaires, dans diverses disciplines (français, mathématiques, sciences, histoire, etc.). Il s’agit de stages de 2e année (pour huit stagiaires, dont trois dyades, chacune étant jumelée à un même enseignant associé), ainsi que de 3e et 4e année (pour 6 et 8 stagiaires respectivement). Ces expériences de stage correspondent à des prises en charge progressives d’enseignement susceptibles de susciter le recours à des ressources différenciées, selon le moment de formation : en deuxième année, un assistanat de 20 jours auprès d’un enseignant associé ; en troisième année, la prise en charge de la moitié de sa tâche ; enfin, en quatrième année, la responsabilité complète de la tâche. Lors des séances d’analyse des enregistrements, les groupes de participants étaient constitués, par école, des enseignants associés (au total, 15 des 19 pressentis y ont participé), du superviseur universitaire de ce groupe de stagiaires (six au total dans l’étude) et d’un chercheur, ces personnes formant chaque fois avec les stagiaires un sous-groupe de 7 à 10 participants.

3.2 Instrumentation et déroulement

Chaque stagiaire a enregistré sur vidéo des situations d’enseignement en classe, puis en a sélectionné des extraits qui illustrent les compétences retenues dans l’étude, le critère de choix des situations étant d’avoir du matériel intéressant à discuter à propos de ces compétences. Nous nous sommes appuyées sur l’approche de Fenstermacher (1996) pour l’explicitation des ressources ou fondements de l’action. En effet, pour cet auteur, diverses prémisses peuvent sous-tendre l’agir de l’enseignant : valeurs, savoirs théoriques ou empiriques, ou encore contraintes imposées par le contexte. Ces prémisses ne sont pas nécessairement conscientes chez l’enseignant au moment de l’action, ni au moment d’en amorcer l’analyse. Ainsi, malgré certaines limites, la rétroaction vidéo joue un rôle de mise en évidence ; à cette rétroaction s’ajoute la contribution d’autres intervenants, présents pendant l’analyse. Cette manière de procéder favorise la prise de conscience, la verbalisation et la justification des motifs d’action. De plus, elle permet aux acteurs de rendre davantage intelligibles et communicables leurs savoirs d’action. Le rôle des Autres (dans notre cas : enseignants associés, pairs, superviseur et chercheur) consiste principalement à aider le stagiaire à exprimer et à préciser les fondements de son action, à partir de sa position propre : de collègue stagiaire ou de formateur. Mentionnons que l’approche de Fenstermacher comporte deux phases, l’explicitation des arguments et leur reconstruction, mais que seule la première phase a été utilisée dans l’étude. La reconstruction des arguments n’est pas un objectif de notre étude, car elle nécessiterait beaucoup de temps d’interaction entre le chercheur et le praticien (enseignant en exercice, ou ici stagiaire en formation) pour prétendre y arriver, ce qui n’était pas notre objectif.

Les séances d’analyse ont eu lieu vers la fin de chacun des stages, quelques jours après l’enregistrement de la leçon en classe. Chaque stagiaire présentait les séquences qu’il avait retenues (entre 7 et 10 minutes d’enregistrement) ; en suivant l’approche d’explicitation des arguments de Fenstermacher (1996), les membres du groupe, par leurs interventions, incitaient le stagiaire à dégager les raisons pour lesquelles il avait agi de cette manière et à préciser les ressources sur lesquelles il s’était appuyé.

3.3 Méthode d’analyse des données

Lors des séances d’explicitation, les échanges ont été enregistrés (audio), transcrits et analysés. Chacune des 22 transcriptions couvre entre 6 et 10 pages de texte. La grille d’analyse a été élaborée à partir du double équipement de ressources qui peuvent être mobilisées, selon Le Boterf (2002), pour agir avec compétence dans une situation donnée (Tableau 1). Pour la situation d’enseignement, nous avons adapté les catégories de Le Boterf (2002) en nous inspirant de la typologie de Cochran et ses collaborateurs (1993), tout en prenant en compte la liste des compétences attendues de la part des enseignants en fin de formation (Ministère de l’Éducation du Québec, 2001). De plus, nous avons subdivisé les compétences examinées en composantes. Les définitions des catégories retenues pour l’analyse peuvent être consultées dans le chapitre 3 de Le Boterf (2002) et dans le référentiel publié par le Ministère de l’Éducation du Québec (2001). Les composantes des compétences […] décrivent des gestes professionnels propres au travail enseignant[…] et doivent être perçues comme des balises (Ministère de l’Éducation du Québec, 2001, p. 57). À titre d’exemple, pour la compétence Évaluer la progression des apprentissages, les composantes comprennent : prendre des informations pour repérer les forces et les faiblesses, construire et employer des outils pour évaluer, etc. Précisons qu’au fur et à mesure de l’analyse, nous avons apporté certaines modifications à la liste des composantes pour certaines des compétences ; notamment en ajoutant des volets évoqués par les stagiaires. Ainsi, observer les élèves pour mieux intervenir a été ajouté comme composante de la compétence supervision du fonctionnement du groupe-classe, une composante absente du document original (d’ailleurs décrit comme non exhaustif par les auteurs du référentiel). La grille d’analyse est donc mixte : composée de catégories prédéfinies spécifiques au domaine et de catégories émergentes provenant de l’analyse.

Parmi les ressources, nous précisons ici les définitions retenues afin de justifier l’importance que nous accordons à la catégorie des savoirs. Les savoirs théoriques regroupent d’abord les théories et concepts formalisés, autrement dit, des savoirs formels utiles pour comprendre ; ils sont généralement diffusés par l’institution de formation et peuvent concerner l’élève, l’apprentissage ou l’enseignement. Ils comprennent également les savoirs disciplinaires ou toute connaissance spécifique des contenus, tant sur le plan de la matière à enseigner que de la didactique de cette matière. En outre, les savoirs théoriques incluent les croyances ou connaissances que l’on peut qualifier de naïves, par opposition aux connaissances scientifiques, rationnelles. Ces croyances ou connaissances ont un caractère expérientiel propre à chacun, sont porteuses de jugements et de valeurs et sont de nature idiosyncrasique (Saussez et Paquay, 2004) ; à l’instar des théories formelles, ces théories personnelles peuvent porter sur l’élève, l’apprentissage, etc. En cours de codage, nous avons classé comme savoirs théoriques des expressions telles que l’activation des connaissances antérieures, même si elles ne faisaient pas nécessairement l’objet de développement de la part des stagiaires, étant donné que le vocabulaire utilisé ne faisait pas partie du sens commun, mais correspondait tout à fait à celui de la réforme en cours. De plus, ces expressions qui s’avéraient tout à fait caractéristiques du domaine et appropriées pour expliciter l’action du stagiaire en contexte ont permis d’enrichir la grille d’analyse.

Font également partie de cette catégorie de ressources des savoirs d’environnement, ou connaissances plus ou moins formalisées, liées au contexte d’intervention, et permettant de s’adapter aux situations ; il peut s’agir de la connaissance des ressources externes (humaines et matérielles), de connaissances organisationnelles à propos de la tâche enseignante (caractéristiques de la tâche en termes de nombre de groupes, de niveau des élèves, de durée des cours, etc.), de l’organisation de l’école (règles administratives, profils de concentration en sciences ou en sport, etc.), de connaissances sociales qui se rapportent aux élèves (caractéristiques des élèves ou des groupes, etc.) ou encore, des normes sociales du milieu. Enfin, les savoirs procéduraux servent à décrire comment il faut agir dans une situation spécifique comportant une séquence d’actions à réaliser ; ce sont des modes d’emploi.

En ce qui concerne le codage et l’analyse, le logiciel QDA Miner a été utilisé. Nous avons d’abord effectué plusieurs essais de codage afin de nous assurer d’accords interjuges supérieurs à 70 % et d’accords intrajuges supérieurs à 80 %, suffisants pour en assurer la validité. Nous avons examiné systématiquement les désaccords afin de raffiner la grille d’analyse ainsi que notre compréhension des définitions de chacune des catégories. Pour examiner les liens créés par les répondants entre les compétences (ou leurs composantes) et les ressources évoquées, nous avons utilisé le coefficient de Jaccard. Ce coefficient, qui évalue le degré de similarité entre deux ensembles, est établi en calculant l’intersection de ces deux ensembles divisée par l’union de ceux-ci (Recherches Provalis, s. d.). Ainsi, nous nous intéressons aux moments où deux ou plusieurs catégories (ressources et compétences) sont présentes en même temps pour une même unité (phrase), par rapport à ceux où elles ne sont pas codées ensemble. Nous n’avons retenu que les liens les plus importants, c’est-à-dire ceux dont les indices de cooccurrence étaient supérieurs ou égaux à 0,1.

3.4 Considérations éthiques

Pour cet article, le matériel analysé provient des discussions de groupe. Nous avons assuré aux stagiaires que toutes les transcriptions seraient rendues anonymes : tous les noms des participants ont donc été remplacés par des noms fictifs, et les caractéristiques des lieux de stage ont été supprimées pour éviter leur identification.

De plus, la confidentialité du matériel recueilli durant l’étude garantissait aux stagiaires que cela n’aurait aucun impact sur leur évaluation en stage. Par ailleurs, comme le matériau de base des discussions était constitué d’enregistrements vidéo en situation de classe, nous nous sommes engagées à ce que le matériel vidéo disponible pour l’étude (les extraits) ne soit jamais diffusé en dehors du groupe restreint de chercheurs qui procéderaient à l’analyse des données. L’utilisation de matériel vidéo en recherche est bien documentée (Tochon, 1996), de même que les conditions et garanties à offrir aux participants, comme par exemple leur retrait de l’étude sur simple demande. Exposer sa pratique professionnelle est exigeant, et nous avons adapté les conditions de recueil de données au contexte et aux contraintes de la classe. Nous avons obtenu un certificat d’approbation éthique pour le projet et les participants ont été informés des objectifs de la recherche. Parents d’élèves, enseignants et directions d’école nous ont fourni les autorisations nécessaires pour les enregistrements en classe.

4. Résultats

Afin de répondre à la question des ressources que les stagiaires affirment mobiliser dans la manifestation des compétences, nous présenterons d’abord, dans cette section, les faits saillants de notre étude : les fréquences générales des catégories de ressources (selon la grille d’analyse) présentes dans l’ensemble des 22 entrevues codées, ainsi que certaines fréquences relevées selon l’année de stage. Ensuite, nous exposerons les liens que nous avons cherché à établir entre les savoirs théoriques (incluant les théories et concepts formels, les savoirs disciplinaires et les croyances) et les compétences ciblées dans cette étude, selon les dires des participants. Enfin, nous distinguerons les compétences professionnelles en fonction de leur relation apparente avec des savoirs, qu’ils soient théoriques (formels) ou de sens commun (croyances).

4.1 Fréquences des catégories de ressource

Un certain nombre de constats peuvent être formulés à partir de l’examen des fréquences relevées lors de l’analyse des énoncés des stagiaires, certaines ressources étant évoquées de manière générale, peu importe l’année du stage, tandis que d’autres paraissent plus spécifiques à certains moments de la formation.

4.1.1 Fréquences générales des catégories de ressources

Deux éléments nous ont semblé particulièrement intéressants lorsque nous avons examiné les fréquences des catégories de ressources : les catégories présentes dans plus de 90 % des cas et l’absence complète de certaines catégories.

Catégories présentes dans plus de 90 % des cas analysés. Le tableau 2 présente les fréquences des catégories de ressources et compétences retrouvées dans au moins 20 des 22 entrevues analysées.

Tableau 2

Fréquences des catégories de ressources présentes dans plus de 90 % des cas

Fréquences des catégories de ressources présentes dans plus de 90 % des cas

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Pour mettre en évidence ce qui semble typique des ressources évoquées par l’ensemble des stagiaires, nous les présentons ici par ordre de fréquence. Soulignons d’abord la présence marquée des savoirs disciplinaires d’ordre didactique. L’exemple suivant est assez typique du discours des stagiaires : Alors, comme préambule, j’ai décidé de faire un rappel de connaissances antérieures des élèves concernant la division d’un segment par une fraction, un rapport, le milieu d’un segment (cas no 6, stage 2 ; le numéro correspond au cas analysé, le stage est précisé). En importance, suivent les savoir-faire procéduraux, qu’on peut présumer acquis des premières expériences d’enseignement. Il peut s’agir d’une séquence d’actions, énoncée comme suit : En général, je fais de la théorie et des exercices d’application, je circule partout, je fais passer des élèves au tableau (cas no 17, stage 4). Une autre catégorie de ressources très fréquente dans l’ensemble des entrevues est celle des contenus disciplinaires, un type de ressources que l’on peut considérer comme assez typique des enseignants du secondaire ayant reçu une formation disciplinaire poussée. Un stagiaire précise ainsi : Parce que j’ai fini le module des équations quadratiques, avec des paraboles et des χ2, je ne voyais pas vraiment d’activité concrète (cas no 10, stage 3).

Viennent ensuite les croyances des stagiaires à propos de l’enseignement. Rappelons qu’il s’agit de savoirs peu formalisés, relevant davantage de concepts quotidiens que de savoirs formels ; par exemple : Ma vision de l’histoire : on s’est tous fait raconter des histoires quand on était jeunes et un cours d’histoire, c’est rien de plus, rien de moins (cas no 1, stage 2). Sont également fréquemment évoquées les valeurs des stagiaires, c’est-à-dire leurs convictions durables, plus particulièrement les buts qu’ils visent pour eux ou pour les élèves. À titre d’exemple : Moi, mon objectif, ici, je voulais créer une atmosphère de labeur au sein du groupe, motiver les élèves […], ils ne seront pas endormis, je vais être dynamique, vif et vivant avec eux (cas no 6, stage 2). La catégorie des savoirs reliés à l’environnement scolaire est également présente. En effet, lors des séances d’analyse, les autres posent des questions à propos des élèves ou de l’organisation de la tâche.

À cet effet, lors des séances d’analyse, les Autres posaient souvent des questions spécifiques aux stagiaires. Afin d’expliciter les motifs de son agir en classe, un stagiaire est ainsi amené à préciser le contexte de son intervention : On a fait la même chose dans un groupe de secondaire 4 et 5, des doubleurs ; ils étaient 32 dans la classe, mais ça a quand même bien été (cas no 2, stage 2). Le recours aux ressources matérielles est aussi évoqué assez fréquemment par tous les stagiaires : Avant de leur distribuer le texte de Baudelaire et de le lire ensemble pour commencer l’analyse, ce que j’ai fait pour faire des liens avec les connaissances antérieures […], j’ai présenté un tableau de Delacroix (cas no 9, stage 3).

Certains types de ressources semblent donc accessibles aux stagiaires, quel que soit le moment de la formation. Il s’agit, très majoritairement, de ressources incorporées (Tableau 2). Pour des futurs enseignants du secondaire, peu importe le stage, discuter des compétences de l’acte d’enseigner fait d’abord émerger des savoirs liés à la discipline et à la didactique de cette discipline. Ce sont les ressources les plus fréquemment évoquées. Parmi les autres ressources mentionnées par les stagiaires à tous les moments de formation, certaines sont probablement en partie préalables à l’entrée en formation : des croyances à propos de ce qu’est l’enseignement, des savoirs sociaux ou organisationnels et des savoir-faire procéduraux. Toutefois, une partie de ces deux dernières catégories a sûrement été acquise lors des expériences de stage elles-mêmes. Les valeurs des stagiaires et les buts qu’ils poursuivent, pour eux ou pour leurs élèves, sont également avancés comme ressources, confirmant leur place importante pour expliquer l’agir des enseignants (Portelance, 1998). Enfin, la seule ressource externe mentionnée par pratiquement tous les stagiaires est le recours à du matériel.

Absences à noter. Nous n’avons retrouvé dans le discours des stagiaires ni savoir théorique formel relatif à l’élève, notamment au sujet des stades de développement cognitif, ni savoir formel sur l’enseignement qui serait lié, entre autres, aux divers modèles et conceptions de l’enseignement (exemple : apprentissage coopératif / socioconstructivisme). Il semble que l’explicitation de l’agir en situation de classe ne repose pas, pour les stagiaires, sur le recours à cette catégorie de savoirs pédagogiques formels. Certaines catégories de ressources externes n’ont également été évoquées par aucun stagiaire : l’utilisation des réseaux d’expertise ou de certains réseaux professionnels (recours aux directions des écoles, à d’autres professionnels de l’école, aux conseillers pédagogiques ou aux syndicats), ressources qui sont probablement davantage mobilisées par les enseignants en exercice que par les stagiaires. Il en est ainsi des réseaux documentaires, à l’exception de quelques documents en provenance du ministère de l’Éducation ou trouvés sur Internet, des ressources par ailleurs très peu mentionnées. Soulignons enfin que, sans être totalement absents, les savoir-faire cognitifs sont peu mentionnés par les stagiaires. Cependant, il pourrait s’agir ici d’un effet de la méthode de collecte de données utilisée pour cette partie de l’étude, soit la rencontre d’explicitation. Par ailleurs, en utilisant une autre méthode, celle d’entrevues collectives réalisées à la fin de l’étude pour en faire le bilan, nous avons pu recueillir des témoignages de stagiaires illustrant leur mode de raisonnement pédagogique à propos de conceptions des situations d’enseignement / apprentissage (SEA) et de leur pratique réflexive dans l’action et sur l’action (Gervais, Correa Molina et Lepage, 2007).

4.1.2 Fréquences de catégories de ressources selon l’année de stage (deuxième, troisième ou quatrième année)

En effectuant l’opération de calcul de la fréquence des catégories de ressources mentionnées par les stagiaires, ce qui nous a d’abord intéressées, c’est la présence de certaines ressources uniquement chez les étudiants qui en étaient à leur deuxième, troisième ou quatrième stage.

Étant donné les faibles fréquences, un des seuls éléments intéressants à signaler dans le tableau 3 est l’importance que prennent les réseaux professionnels chez les stagiaires de deuxième année. Ainsi, leurs collègues stagiaires sont cités comme ressources, ce qui s’explique probablement par la modalité de travail en dyade, retenue pour ce stage. Mentionnons que la seule ressource retrouvée exclusivement en quatrième année est le recours à Internet (catégorie : ressources documentaires), mais elle n’est évoquée que par l’un des huit stagiaires concernés. J’ai vu de belles images sur Internet, avec l’échelle de pH bien tracée… ça parle, il y a des animations […] (cas n° 17, stage 4).

Tableau 3

Ressources présentes exclusivement chez des stagiaires de 2e, 3e ou 4e année

Ressources présentes exclusivement chez des stagiaires de 2e, 3e ou 4e année
*

Ce type de savoir-faire provient de l’expérience d’une autre personne, généralement l’enseignant associé, et concerne l’importance du facteur temps dans l’enseignement, par exemple : la durée des transitions entre les activités d’un cours.

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Il est assez surprenant de ne pas retrouver davantage de ressources spécifiques à chacune des années de formation. Par exemple, la compétence en gestion de classe fait l’objet d’une attention particulière en 3e année de ce programme, et les savoirs théoriques liés à cette compétence n’ont été mentionnés que par des stagiaires de cette année de formation. C’est la seule spécificité révélée dans les résultats, alors que chaque année comporte une orientation équivalente (intégration des TIC ou évaluation des apprentissages, par exemple). Par ailleurs, nous notons que les modalités mêmes d’un stage (le stage effectué en dyade en 2e année) semblent avoir un impact sur le développement de certaines ressources liées à des compétences professionnelles. Le recours aux ressources pourrait être en bonne partie tributaire du contexte de pratique.

4.2 Liens entre compétences et savoirs théoriques

Nous avons examiné la place particulière des savoirs théoriques parmi les ressources invoquées par les stagiaires pour expliciter les compétences ciblées dans l’étude. Ces liens ont été observés à partir des cooccurrences entre les compétences (ou certaines de leurs composantes) et certaines ressources, exprimés par le coefficient de Jaccard. Rappelons qu’il s’agit de savoir si des catégories (compétences et ressources) sont présentes en même temps pour une même unité par rapport aux moments où elles ne sont pas codées ensemble. Concrètement, cela représente les moments où la stagiaire a utilisé concurremment deux ou plusieurs codes de l’analyse dans un même énoncé.

4.2.1 Illustration des liens entre compétences et savoirs invoqués

Notre analyse nous a permis d’identifier des rapprochements entre les compétences et les diverses ressources disponibles pour les stagiaires. Les liens les plus importants sont reproduits dans le tableau 4.

Tableau 4

Liens entre les compétences et les savoirs théoriques invoqués

Liens entre les compétences et les savoirs théoriques invoqués

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La compétence conception des situations d’enseignement / apprentissage (SEA et ses composantes) semble davantage reliée aux savoirs suivants : théories mises de l’avant par la réforme à propos de l’apprentissage et de la didactique disciplinaire. De son côté, la compétence pilotage des SEA et ses composantes est plus souvent mentionnée en même temps que certaines croyances au sujet de l’apprentissage, de l’élève et de l’enseignement, de même qu’au sujet des savoirs didactiques en fonction des disciplines. Pour ce qui est de la compétence évaluation de la progression des apprentissages, elle est particulièrement liée aux savoirs didactiques disciplinaires. Enfin, la compétence supervision du fonctionnement du groupe-classe et ses composantes semblent, pour leur part, reliées à des croyances en lien avec la gestion de classe.

Les savoirs didactiques liés à la discipline, ressources les plus souvent mentionnées dans l’ensemble (Tableau 4), semblent servir de base pour planifier, piloter et évaluer les apprentissages. De plus, chez des stagiaires de tous les niveaux, nous avons observé un recours à certains savoirs théoriques liés à l’apprentissage et à la réforme. Ainsi, par exemple, ils évoquent l’activation des connaissances antérieures : En plus, j’ai vérifié les connaissances antérieures pour commencer la nouvelle matière, sinon, ils ne feront pas les liens entre ce qu’ils savent déjà et la matière que je donne (cas n° 7, stage 2), ou le fait de rendre l’élève actif dans son apprentissage : Donc, ce sont les élèves eux-mêmes qui construisent la matière, l’enseignant est là pour insister sur l’essentiel, pour les guider… (cas n° 8, stage 3). Il s’agit là d’expressions qui relèvent clairement du vocabulaire employé dans la réforme (Ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport, 2006, 2007).

Les autres contenus théoriques se résument à des croyances ou concepts quotidiens. Ainsi, la compétence supervision de la classe semble particulièrement s’appuyer sur des croyances, sans recours explicite à des aspects théoriques pourtant traités à l’Université, tels l’autorité ou le comportement de l’enseignant : Je pense que l’enseignant ne doit pas être trop permissif ; quand il faut être sévère, il le faut… (cas n° 14, stage 4). Dans le cadre de notre étude, avec le dispositif utilisé, les savoirs spécifiques d’éducation autres que les savoirs disciplinaires didactiques se retrouvent peu dans le discours des stagiaires, même finissants, pour parler de ce qui fonde leur pratique.

5. Discussion des résultats

Cette étude visait à explorer l’explicitation, de la part des étudiants, des ressources qu’ils ont mobilisées lors des stages de la deuxième à la quatrième année de formation à l’enseignement secondaire, en regard des compétences professionnelles liées à l’acte d’enseigner et énoncées dans le référentiel du ministère de l’Éducation du Québec (2001). Rappelons le peu de connaissances actuelles à propos du processus de développement des compétences professionnelles en formation initiale (Le Boterf, 2001). Dans la présente section, nous discutons d’abord des catégories de ressources évoquées par les stagiaires, puis, nous examinons plus en détail la place des savoirs théoriques dans leur discours.

5.1 Catégories de ressources évoquées

Dans l’ensemble, bien qu’elles soient très inégalement évoquées, les ressources exprimées par les stagiaires pour expliquer leur agir (les compétences de l’acte d’enseigner) couvrent la quasi-totalité des catégories de ressources incorporées proposées par Le Boterf (2002). Rappelons qu’il s’agit ici des ressources qu’ils sont en mesure d’exprimer de manière consciente. Outre des croyances à propos de l’enseignement, les éléments les plus fréquemment mentionnés correspondent en bonne partie aux savoirs de la typologie proposée par Cochran et ses collaborateurs (1993), et concernent les contenus disciplinaires et didactiques, des savoir-faire d’ordre procédural et des savoirs sociaux reliés aux élèves et à l’organisation de la tâche. Comme nous avons déjà noté l’absence de mention de savoirs théoriques à propos des élèves, les savoirs retenus par les stagiaires sont essentiellement des savoirs contextualisés qui semblent avoir du sens pour eux : Qui sont les élèves auxquels ils enseignent ? Quelles sont leurs caractéristiques ? Comment agissent/réagissent-ils ? Décontextualisés par nature, les savoirs formels sur le développement à l’adolescence ne semblent pas être en mesure de les aider à agir en situation.

Nos résultats peuvent compléter ceux de l’étude de Piot (2008), réalisée, rappelons-le, auprès d’enseignants en exercice ayant des niveaux variables d’expérience (de débutants à chevronnés). L’auteur conclut à la présence de trois types de ressources mobilisées dans la construction des compétences : […] des savoirs pratiques acquis par l’expérience, des savoirs académiques issus de l’étude et enfin, des valeurs, croyances et théories personnelles (p. 95). Piot (2008) ne donne toutefois pas d’exemples de savoirs académiques, définis comme acquis par l’étude (p. 102), qu’il a retrouvés chez les enseignants. Il s’avère que le recours à ces diverses ressources varie selon l’expérience : en phase initiale de la carrière, les savoirs académiques ne sont pas présents, c’est-à-dire qu’ils ne semblent pas fonctionnels, alors qu’ils le deviennent chez les plus expérimentés. Pour l’auteur, les savoirs passent alors du […] statut de cadre de connaissances déclaratives théoriques (know how) au statut d’analyseur cognitif pour problématiser une situation concrète (p. 105).

Quant aux catégories de ressources externes de Le Boterf (2002), elles semblent globalement peu exploitées par les stagiaires : seuls certains réseaux professionnels (leurs enseignants associés ou leurs collègues stagiaires pour l’essentiel) et des ressources matérielles sont explicitement identifiées pour concevoir des situations d’enseignement / apprentissage, les piloter, évaluer les apprentissages des élèves et superviser le groupe-classe. Pour leur part, jamais mentionnés, les réseaux d’expertise (le recours à des auteurs, par exemple) ou les ressources informationnelles (tout type de documentation) semblent presque totalement ignorés des stagiaires comme ressources pour agir.

À cet égard, il est possible d’émettre diverses hypothèses. Ainsi, à l’instar de Martin (2004), on peut supposer que lorsque le stagiaire se retrouve dans l’urgence de l’action, il manque de temps pour consulter des personnes ou de la documentation, si bien que les idées à propos des planifications ou des stratégies à utiliser pour faire apprendre ou pour surmonter les difficultés ne peuvent surgir que de lui-même.

La pratique de l’enseignement secondaire a souvent été décrite comme individualiste (Hargreaves, 1992) ; en avons-nous un reflet ici ? Aurions-nous observé le même genre de résultats avec de futurs enseignants du primaire ?

Une autre hypothèse : peut-être que les compétences ciblées pour la présente étude, celles de l’acte d’enseigner, n’ont pas permis de dégager des ressources qui auraient pu être évoquées pour d’autres compétences, telles celles reliées à la coopération (les compétences 9 et 10 du référentiel). Il est à noter, à ce propos, que seuls les stagiaires placés dans un dispositif de stage coopératif, en deuxième année, ont mentionné le recours au collègue stagiaire comme ressource. Il y a lieu de se demander comment les formateurs pourraient sensibiliser davantage les futurs enseignants à la pertinence de ce type de ressources. Dans cette perspective, certaines pratiques qui s’instaurent à l’Université sont à encourager ; par exemple, celle où des étudiants de différents programmes sont réunis pour contribuer à des études de cas. Ils se trouvent alors en meilleure position pour comprendre comment leurs expertises respectives peuvent être complémentaires et utiles dans l’apprentissage de l’exercice du métier.

5.2 Place des savoirs théoriques

Comme nous en avions fait l’hypothèse, à la suite de l’analyse de Bromme et Tillema (1995), à l’exception des contenus disciplinaires et des savoirs didactiques, les croyances ou concepts quotidiens (définis par Saussez et Paquay, 2004) prédominent dans le discours des stagiaires par rapport aux savoirs théoriques formels d’éducation. La figure qui suit illustre non seulement les savoirs évoqués comme ressources par les stagiaires en lien avec les quatre compétences professionnelles étudiées (conception et pilotage des situations d’enseignement / apprentissage, évaluation des apprentissages et supervision de la classe), mais aussi les liens établis par les participants entre les compétences.

Figure 1

Savoirs évoqués comme ressources par les stagiaires en lien avec les quatre compétences professionnelles étudiées ainsi que les liens établis entre les compétences (coefficient de Jaccard égal ou supérieur à 0,1)

Savoirs évoqués comme ressources par les stagiaires en lien avec les quatre compétences professionnelles étudiées ainsi que les liens établis entre les compétences (coefficient de Jaccard égal ou supérieur à 0,1)

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Nous avons distingué les liens retrouvés chez l’ensemble des participants de ceux qui sont spécifiques aux stagiaires de 4e année. En fin de formation, on peut remarquer une augmentation importante du nombre de liens reliant les compétences aux savoirs. Cependant, ces ajouts sont principalement de l’ordre des croyances, à l’exception d’un lien fait entre l’évaluation des apprentissages et les savoirs didactiques disciplinaires. Il faut également souligner que les liens entre les compétences n’apparaissent qu’en fin de formation dans le discours des stagiaires. Toujours de ce point de vue, ces derniers font appel exclusivement à des savoirs théoriques formels comme ressources pour la compétence conception des SEA, une compétence qui se manifeste hors classe. Par contre, quand ils sont en action en classe (pilotage, évaluation, gestion), ils s’appuient davantage sur des croyances, exception faite pour les savoirs formels en provenance de contenus disciplinaires ou d’éléments didactiques s’y référant. La supervision de la classe, compétence identifiée dans la recherche comme suscitant le plus de difficultés lors des débuts dans l’enseignement (Chouinard, 1999), n’est en lien qu’avec des croyances. Nous pouvons supposer qu’il peut s’avérer insuffisant de ne compter que sur des croyances pour comprendre et intervenir dans ce type de situations (exemple : l’indiscipline). Ainsi, il faudrait davantage aider les stagiaires à transformer ces savoirs théoriques liés au concept de gestion de classe en ressources mobilisables pour l’action. D’ailleurs, cette compétence n’est reliée aux autres, dans le discours des stagiaires, qu’en fin de formation.

Les savoirs théoriques servent à rendre les situations intelligibles dans la mesure où ils constituent un cadre de référence pour l’action (Fenstermacher, 1994 ; Le Boterf, 2002 ; Legendre, 1998). Ils ne sont donc pas mobilisables directement dans la pratique. À l’exception des contenus disciplinaires spécifiques à enseigner et de procédés didactiques, les stagiaires semblent préférer des croyances, des savoirs de sens commun à ces savoirs théoriques. Cela se vérifie principalement quand ils sont dans l’action. Un tel constat ne peut que soulever des interrogations. On peut se demander, par exemple, en quoi ces savoirs de sens commun leur sont plus utiles que des savoirs spécifiques d’éducation, issus de la recherche, pour analyser ce qui se passe et planifier les prochaines actions. S’agit-il d’un problème de formation, dans la mesure où, comme formateurs, nous ne réussissons pas à faire intégrer ces savoirs, non perçus comme pertinents pour comprendre l’action en classe ni surtout pour soutenir la transformation de ces derniers afin qu’ils deviennent mobilisables dans l’action ? Peut-être leur pertinence apparaît-elle plus tard, quand une certaine aisance de pratique s’installe, comme le supposent Baillauquès et Breuse (1993) ainsi que Piot (2008) ? Pour ce dernier, lorsqu’un enseignant a accumulé suffisamment d’expérience pratique, il exprime explicitement des savoirs théoriques (académiques) qui semblent alors devenir fonctionnels dans sa pratique.

Nos résultats paraissent indiquer que, en formation initiale, les expériences de la pratique ne sont pas suffisantes pour provoquer ce changement de statut des savoirs, du moins dans le discours des stagiaires. Impossible, donc, d’évacuer une difficulté inhérente à la formation : celle de la prise de conscience de la pertinence de savoirs qui doivent nécessairement être transformés avant d’être mobilisés dans la pratique (Perrenoud, 2004). De là l’importance, dans les activités de formation, de travailler l’appropriation et la mobilisation des savoirs théoriques, mais surtout d’accentuer l’accompagnement au cours du transfert de ces apprentissages par les formateurs. Certains auteurs ont plutôt formulé l’hypothèse d’un phénomène de croyances antérieures fortes chez les stagiaires, que nous ne parvenons pas à déconstruire (Wideen, Mayer-Smith et Moon, 1998). Étant donné que notre dispositif méthodologique faisait intervenir les enseignants associés dans les séances d’explicitation, il se peut que les résultats soient aussi, en partie, tributaires d’un processus de socialisation, les stagiaires adoptant un discours conforme au rapport instrumental au savoir, assez caractéristique des enseignants (Altet, 2004 ; Portelance, 2005). Sauf en ce qui concerne les savoirs disciplinaires et didactiques, nos résultats confirment donc cette image d’une profession où les concepts scientifiques spécifiques sont peu utilisés pour argumenter ce qui fonde la pratique (Bromme et Tillema, 1995), du moins lors des premiers pas dans la pratique.

Dans cette étude du développement des compétences, notre questionnement a porté sur la nature des ressources que les stagiaires disent mobiliser pour enseigner. Les résultats ont permis d’identifier empiriquement diverses catégories de ressources dans l’agir professionnel des stagiaires. Il s’agit principalement de ressources incorporées, c’est-à-dire, selon Le Boterf (2002), inhérentes à la personne : savoirs et savoir-faire intégrés, valeurs, etc., alors que les ressources externes sont peu mentionnées par les stagiaires. L’importance accordée aux savoirs quotidiens et aux croyances dans le discours confirme les résultats de l’étude de Piot (2008) observés chez des enseignants en début de carrière. Il y a lieu de se demander si les stagiaires éprouvent de la difficulté à verbaliser certains savoirs formels. Une autre hypothèse d’explication serait que ces savoirs n’ont pas encore été transformés : soit ils ne sont pas encore devenus fonctionnels (Piot, 2008), soit ils ne peuvent pas encore constituer des ressources pour l’action (Perrenoud, 2004) ; à moins qu’ils n’aient été lessivés, comme le suggère Martin (2004).

Notre étude a été réalisée avec des stagiaires de la 2e à la 4e année de formation. Les résultats montrent, d’une part, qu’il ne semble pas y avoir de catégories de ressources vraiment typiques à certains moments de formation. La mention du réseau de collègues comme ressource par les stagiaires de 2e année exclusivement semble mettre plutôt en relief l’influence du dispositif mis en place dans les stages, la formule coopérative en dyade, dans ce cas. D’autre part, il nous a été possible de dégager des liens entre les catégories de ressources mentionnées par les stagiaires et chacune des compétences étudiées. Ainsi, la figure 1 illustre une évolution, dans le discours des stagiaires en 4e année de formation, marquée non seulement par l’augmentation des liens entre les ressources et les compétences, mais aussi entre les compétences elles-mêmes. Nos résultats témoignent de la pertinence de considérer une variété de catégories de ressources nécessaires à l’action professionnelle, comme le préconise Le Boterf (2002), mais permettent surtout d’identifier les ressources que des stagiaires encore en formation sont en mesure de nommer. Rappelons-le, jusqu’à maintenant, les études ont été réalisées avec des professionnels en exercice, et non pendant l’apprentissage du métier. Les éléments de la typologie des savoirs enseignants de Cochran et de ses collaborateurs (1993) se retrouvent dans le discours des stagiaires, mais principalement sous la forme de croyances, à l’exception des contenus disciplinaires didactiques exprimés de manière formelle. Finalement, les propos des stagiaires permettent d’ajouter des composantes aux compétences étudiées du référentiel.

6. Conclusion

Une formation aux compétences professionnelles s’appuie d’abord sur l’acquisition / le développement de ressources qui pourront être mobilisées dans l’action lorsqu’elles seront requises. Le modèle de formation retenu au Québec (programme de quatre ans, intégrant un stage chaque année, concomitamment aux cours universitaires) invite à se demander à quelles ressources les étudiants sont en mesure de faire appel pendant leurs stages, et tout au long du programme. Notre étude, réalisée auprès de 22 stagiaires de la 2e à la 4e année de formation à l’enseignement secondaire, visait à explorer, d’une part, les ressources qu’ils sont en mesure d’évoquer pour expliquer leur agir par rapport aux compétences regroupées sous l’acte d’enseigner (Ministère de l’Éducation du Québec, 2001) et, de manière plus particulière, la part des savoirs théoriques parmi ces ressources. Pour ce faire, des situations de classe, enregistrées sur vidéo, ont été analysées selon trois perspectives : l’approche de Fenstermacher, la catégorisation de Le Boterf (2002) et la typologie des savoirs développée par Cochran et ses collaborateurs (1993).

Nous sommes conscientes des limites inhérentes à ce type d’étude : le nombre restreint des participants, tous volontaires, et le nombre des situations analysées ; enfin, l’approche méthodologique utilisée qui limite l’accès à certains types de données uniquement. Par ailleurs, notre choix d’une approche qui donne la parole aux stagiaires à propos des ressources mobilisées dans l’action semble justifié ; en effet, nous constatons, dans un autre volet de l’étude, que des formateurs (enseignants associés et superviseurs universitaires) ont très peu à dire à propos des ressources mobilisées par les stagiaires, ce qui confirme la difficulté de les observer.

Certes, nos résultats posent un certain nombre de défis qui débouchent sur des interventions possibles en formation initiale des enseignants et ouvrent de nombreuses pistes de recherche. Se pose d’abord la question de l’articulation théorie / pratique dans les stages, c’est-à-dire de savoir comment se réalise la transformation des savoirs en ressources mobilisables dans l’action. Perrenoud (2004) propose la notion de transposition pragmatique, à l’instar de la transposition didactique, pour désigner les remaniements, reformulations ou altérations nécessaires des savoirs d’éducation pour la pratique. Il y aurait lieu de poursuivre l’étude en examinant les mécanismes qui permettent la mobilisation des ressources. Par quels moyens pouvons-nous aider les futurs enseignants à transformer ces savoirs afin de les rendre mobilisables dans l’action ? Puisque la question se pose non seulement dans les stages, mais également dans les cours, Legendre (1998) propose l’utilisation d’études de cas pendant la formation.

Il faut aussi comprendre la prédominance des savoirs communs et chercher à sensibiliser les étudiants à la pertinence des savoirs théoriques spécifiques à l’éducation, seuls à offrir le potentiel pour faire comprendre les situations de pratique dans toute leur complexité. Compte tenu de l’influence importante des enseignants associés et des superviseurs de stage sur les stagiaires, comment inciter ces derniers à contribuer à changer le rapport au savoir des stagiaires ?

Le professionnel n’est pas compétent tout seul (Le Boterf, 2002, p. 158). Sauf pour les ressources matérielles, les stagiaires ne semblent pas faire appel aux divers réseaux professionnels. Cela s’explique-t-il par une pratique qui reste encore individualiste chez les enseignants du secondaire ? Comment les sensibiliser à cette dimension de la profession ? Des initiatives en cours telles que décloisonner les cohortes / programmes dans certains cours ou valoriser le travail en équipe-cycle permettraient que se développent des liens dès la formation initiale.

Comment forme-t-on à l’explicitation des pratiques, à la prise de conscience des ressources qu’on mobilise pour l’action ou dans l’action ? Comment accompagner les stagiaires dans ce processus ?

Par ailleurs, il serait intéressant de voir si le recours aux contenus disciplinaires revêt la même importance chez des stagiaires en enseignement primaire, l’identité professionnelle des enseignants du secondaire comportant souvent une composante disciplinaire importante, selon plusieurs auteurs (dont Helms, 1998). C’est ce qui, d’ailleurs, pourrait expliquer la difficulté à collaborer, mentionnée plus haut.

Toutes ces questions visent à mieux comprendre ce qui contribue au développement des compétences professionnelles pendant la formation à l’enseignement. De plus, elles font valoir l’importance de se pencher sur ce qui contribuerait à la mobilisation accrue de savoirs théoriques formels chez les stagiaires, dans une perspective de professionnalisation de l’enseignement.