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Publié sous la direction de trois chercheures de l’Université Laval, ce collectif est divisé en trois parties : 1) le rôle de la conversation dans l’émergence de la littératie, 2) l’exploitation de la littérature de jeunesse et le développement de l’enfant et 3) l’aspect culturel et l’entrée formelle dans l’écrit. Les thèmes abordés dans les neuf contributions sont les suivants. Boisclair et ses collaboratrices touchent à la fois à la numératie et à la littératie. Nelson et Shaw mènent une réflexion sur le développement langagier de l’enfant, notamment en relation avec les apports de Wittgenstein et de la théorie de l’esprit. Berthoud-Papandropoulou et Kilcher-Hagedorn mettent de l’avant les mécanismes par lesquels les jeunes enfants accèdent à des discours décontextualisés. Veneziano s’intéresse aux façons qu’ont de jeunes élèves du début du primaire de raconter une narration en images. Makdissi et ses collaboratrices considèrent la fonction du dialogue dans l’élaboration du sens d’un texte littéraire à la maternelle. Gamba aborde la narration en images pour étudier la manière dont des éducatrices et de jeunes enfants de trois ans traitent ce support. Ducret et ses collaborateurs décrivent la façon dont les enfants de 3 et 4 ans construisent la notion d’âge et des notions de temps comme celles de journée, de semaine et de saison. Van Kleeck aborde les facteurs culturels repérables dans les manières de mener les lectures interactives dans les familles. Enfin, Sirois et ses collaboratrices présentent les résultats d’une recherche longitudinale qui a pour but d’analyser le cheminement en écriture de 18 élèves du début de la maternelle à la fin de la première année.

Une des forces de ce collectif est l’unité apportée par le cadre socioconstructiviste mis de l’avant. Un autre aspect remarquable concerne la problématique générale retenue. Alors que beaucoup d’ouvrages centrés sur la littératie au préscolaire n’abordent que des aspects microstructuraux, comme la conscience phonologique ou la connaissance des lettres, celui-ci touche au contraire des composantes de haut niveau en compréhension et en expression, ce qui est nettement moins fréquent. La grande variété des provenances des auteurs est un autre point positif, même s’il occasionne parfois des styles de textualité très différents. Deux chapitres sont d’ailleurs des traductions de publications américaines de 2002 et de 2006.

Quelques choix, toutefois, semblent étranges. La contribution de Veneziano concerne le début du primaire et non le préscolaire. Le chapitre de Gamba, du fait de son thème, aurait été mieux mis en valeur après celui de Veneziano. Les groupes ethnolinguistiques étudiés par van Kleeck sont certes très représentés aux États-Unis, mais il n’en va pas nécessairement de même dans les contextes francophones propres aux lecteurs de ce collectif. Enfin, le choix du modèle de Ferreiro pour décrire les productions des jeunes scripteurs, dans la contribution de Sirois et ses collaboratrices, est discutable, compte tenu des nombreux travaux qui incitent à la prudence lors de l’emprunt vers une autre langue d’un modèle construit dans une langue donnée.

Malgré ces quelques réserves, il s’agit nettement d’un ouvrage pertinent pour les chercheurs ou les étudiants aux cycles supérieurs.