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Ainsi que le signale le chapitre introductif, l’ouvrage propose des regards croisés sur la question de la santé des élèves, regards posés par des chercheurs aux horizons variés vu leur provenance sociale et leur ancrage professionnel. Ces horizons sont représentés dans trois sections regroupant chacune plusieurs chapitres envisagés à partir des diverses approches psychologique (chapitres 1 à 4), institutionnelle (chapitres 5 à 10) et pédagogique (chapitres 11 à 14). Les thématiques qui y sont abordées témoignent des problèmes actuels qui concernent les jeunes et qui interpellent aussi vivement l’institution scolaire, aux différents niveaux de la structure : troubles de comportement, difficultés d’apprentissage, épuisement, stress, maltraitance, violence, dépendance, intimidation, conduites à risque sur le plan de l’alimentation ou de la consommation, dysfonctionnement social. Les contributions diffèrent selon que les réflexions présentées invoquent des résultats de recherche ou s’appuient sur des études existantes. Cet ouvrage axé sur les élèves fait suite à un autre portant sur la santé psychosociale des enseignants et enseignantes, et il vise à rejoindre un large public, dont les praticiens et les formateurs en éducation.

Outre l’accent qu’il met sur la population des jeunes, l’intérêt de l’ouvrage se situe d’abord dans le fait qu’il suggère de traiter de la question de leur santé sous l’angle des liens qu’elle entretient avec leur condition d’apprenant. Alors que cette question est encore trop souvent réduite dans les esprits à la dimension médico-sanitaire, les auteurs réussissent à nous faire voir, de manière convaincante et par l’entremise de thématiques pertinentes, son rattachement psychosocial. L’intérêt réside aussi dans le fait que le principal protagoniste, l’élève ou l’étudiant, est resitué dans l’entièreté de sa personne, laquelle est portée par un corps et influencée par des affects. Pour l’école, le rappel d’un apprenant incorporé est d’autant nécessaire qu’une représentation désincarnée de celui-ci perdure toujours, la compartimentation des missions sociosanitaire et éducative mais aussi la focalisation quasi obsessive sur ses performances scolaires contribuant à véhiculer une image asomatique et désarticulée de sa personne, les fonctions cognitives semblant n’être tributaires que de la tête. L’intérêt de l’ouvrage se situe finalement dans l’approche de traitement retenue : la réintroduction du social dans l’examen des conduites des jeunes a pour effet de faire ressortir le marquage des contextes et de nous rappeler la présence d’un apprenant déjà socialisé en divers lieux, et donc déjà en partie orienté par ses expériences de vie ; en outre, le caractère interactionniste de l’intervention qui y est affirmé, par l’attention portée aux facteurs de risque et de protection, souligne la nécessité d’associer l’agir des intervenants à l’examen des problématiques soulevées, les pratiques préventives et remédiatrices participant de la dynamique relationnelle engagée avec les élèves. En somme, l’élargissement de vues que permet cet ouvrage aux intervenants en éducation ne peut qu’être bénéfique, l’enjeu résidant dans une meilleure connaissance et une considération accrue de la personne de l’élève.