Corps de l’article

L’ouvrage présente le fruit d’une revue exhaustive des écrits de recherche sur l’efficacité de l’enseignement et de la formation à l’enseignement. Sa qualité majeure réside dans son souci d’objectivité. Il ne s’agit pas de synthétiser les avis d’auteurs et chercheurs en éducation qui se sont exprimés  in abstracto sur le sujet, mais bien de faire le bilan des recherches ayant démontré empiriquement (en termes de gains d’apprentissage par les élèves) l’efficacité de tel ou tel type d’enseignement, de tel ou tel programme de formation à l’enseignement.

En ce qui concerne l’efficacité de l’enseignement, il ressort du bilan de 40 ans de recherches empiriques qu’un enseignement direct, structuré, explicite et systématique est de loin celui qui engendre chez les élèves les progrès les plus importants. Les approches constructives et/ou basées sur la découverte sont nettement moins efficaces.

Quant aux programmes de formation des enseignants, peu d’études se sont attachées à en évaluer l’efficacité sur la base des performances des élèves sous la tutelle des maîtres nouvellement formés. Néanmoins, celles qui ont procédé de la sorte indiquent que les programmes les plus efficaces sont ceux qui forment à un enseignement structuré et explicite. Aucune étude n’a établi de lien entre programmes prônant une approche constructiviste et gains d’apprentissage des élèves, l’efficacité de ces programmes étant toujours évaluée sur la base des perceptions des acteurs (enseignants, formateurs).

Même s’il feront grincer des dents les défenseurs des approches où l’élève construit son savoir (qualification d’ailleurs peu appropriée puisque, comme le disent les auteurs, que l’enseignement soit constructiviste ou direct, c’est toujours l’élève qui pense et qui construit son savoir), le livre de Castonguay et Gauthier, en exposant des résultats solides, mérite d’être mis entre les mains de tous les acteurs de l’enseignement, en particulier les formateurs d’enseignants et les décideurs politiques.

Deux points de discussion sont toutefois importants à soulever. Les conclusions relatives à l’efficacité de l’enseignement gagneraient à être éclairées par un constat issu de recherches qui ont prolongé les études processus-produits : la variabilité des comportements d’enseignement (par exemple d’imposition ou de rétroaction) est plus importante pour un même maître confronté à différentes situations que pour différents maîtres confrontés à une situation d’enseignement similaire. Cette faible stabilité des maîtres  a amené certains chercheurs à dire que ce n’est pas tant l’enseignant qui contrôle la situation que la situation qui contrôle l’enseignant.

Le deuxième point concerne la dichotomie établie par les auteurs entre enseignement structuré et explicite d’une part, enseignement constructiviste d’autre part. Cette catégorisation doit-elle être exclusive ? Un enseignement basé sur une approche par la découverte peut (doit) aussi comporter des phases de structuration et d’explicitation. Par ailleurs, où situer l’approche par compétences et les didactiques disciplinaires ? Plusieurs de ces dernières reposent non seulement sur des conclusions issues du constructivisme, mais aussi sur l’enseignement explicite (de stratégies de résolution de problèmes, par exemple).