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1. Introduction : influences réciproques entre travail et rétablissement

À la différence des notions médicales de guérison ou de rémission qui désignent des modalités évolutives de la maladie, la notion de rétablissement caractérise le devenir de la personne. Or, ce devenir n’est pas conditionné uniquement, ni même prioritairement, par l’évolution de la maladie, mais par une série d’autres facteurs, personnels et environnementaux. La perspective du rétablissement signifie donc qu’un devenir favorable est possible, en dépit d’une maladie psychiatrique chronique, ce qui suscite un espoir précieux pour les personnes, mais requiert aussi de leur part de se réengager dans une vie active et sociale, de retrouver un contrôle sur leur vie et de s’affranchir de leur identité de « malade psychiatrique »1, 2. Cela requiert aussi de l’entourage et des professionnels du soin et de l’accompagnement social, un soutien approprié à ce processus3, 4. En ce sens, le paradigme du rétablissement en santé mentale renvoie au vaste mouvement de pratiques et de recherches visant à favoriser le processus de rétablissement.

Il est largement reconnu, et bien établi par la recherche que l’exercice d’une activité professionnelle est un des facteurs contribuant le plus efficacement au rétablissement des personnes ayant un handicap psychique5-7. Il reste bien sûr possible de se rétablir sans exercer d’activité professionnelle, ce qui suppose l’engagement dans d’autres types d’activité et d’accomplissement de soi, mais avoir un emploi reste un des moyens les plus sûrs – notamment par l’inclusion sociale et les formes de reconnaissance sociale qu’il permet – de progresser dans le rétablissement.

Une série d’études se sont attachées à spécifier de quelles diverses façons le travail participe au processus de rétablissement. Nous présenterons ces recherches, qui partent du travail pour en montrer les effets bénéfiques, notamment en termes de rétablissement (cf. § 4). Ce n’est cependant pas de cette façon que nous allons commencer. Dans cet article, nous faisons le choix de partir non du travail, mais de la notion de rétablissement, pour nous demander comment le changement de regard qu’elle suppose sur les personnes vivant avec des troubles psychiatriques et sur leur devenir, doit aussi s’accompagner d’un changement de regard sur leurs capacités de travail, sur l’importance d’une intégration professionnelle pour leur devenir, et sur les façons appropriées de les accompagner dans leur démarche de réinsertion. Il convient d’ailleurs de rappeler que l’accès à l’emploi n’est pas un but en soi, mais un moyen pour progresser dans la démarche de rétablissement.

2. Le paradigme du rétablissement : une exigence de réforme des pratiques professionnelles en santé mentale

On ne peut véritablement comprendre la perspective du rétablissement sans saisir pourquoi elle constitue un nouveau paradigme, et sans en percevoir le caractère radical, subversif, à l’égard de l’approche médicale traditionnelle, et intrinsèquement militant, comme en témoigne une partie de la littérature concernant cette approche.

En premier lieu, l’idée même du rétablissement d’une maladie mentale telle que la schizophrénie vient infirmer le préjugé médical traditionnel de mauvais pronostic qui s’attache à ce type de pathologie8. Il est bien connu que ce préjugé est hérité de l’histoire de la schizophrénie, individualisée par Kraepelin justement sur la base d’un critère d’évolution défavorable vers la détérioration9. Bien que cette idée ait été largement invalidée, d’abord par des observations de Bleuler10, puis par les résultats d’une série d’études longitudinales sur le devenir à long terme de ces personnes11-13, ce préjugé s’est néanmoins en partie maintenu, notamment du fait d’un « biais de jugement » des psychiatres : ceux-ci tendant à perdre de vue les personnes qui se rétablissent, alors qu’ils restent confrontés à ceux qui rechutent ou ont des formes de la maladie résistantes au traitement14. Or, ce préjugé sur le pronostic conditionne encore largement la conception de la maladie, et par conséquent aussi sa prise en charge. Renoncer à ce préjugé, admettre la possibilité réelle d’un rétablissement, et en faire l’objectif prioritaire des soins et des pratiques de soutien implique de changer ses représentations de la maladie, mais aussi les pratiques, désormais fondées sur les valeurs propres au rétablissement et le souci d’en soutenir efficacement le processus15. Cela implique notamment d’ajuster le traitement pharmacologique avec un objectif qui n’est plus seulement de rémission symptomatique, mais d’optimisation des capacités fonctionnelles.

Cet aspect subversif du rétablissement à l’égard de la tradition psychiatrique est aussi lié à l’histoire de cette notion, qui doit beaucoup aux contributions des mouvements militants d’usagers. Pour beaucoup d’entre eux, la « découverte », souvent par le témoignage de pairs, parfois par les encouragements de leur entourage, de cette perspective d’un rétablissement possible a été vécue comme un démenti à l’annonce du diagnostic et surtout du pronostic pessimiste qui lui était associé, qui ne laissait guère l’espoir d’un avenir favorable. Cette approche militante, dans laquelle les personnes revendiquent d’être reconnues comme des personnes, avec leurs perspectives d’avenir, et non plus seulement comme des malades – qui plus est des malades chroniques, réputés instables et stigmatisés – a été inspirée par plusieurs types de mouvements militants, notamment celui luttant aux États-Unis pour la reconnaissance des droits civiques aux minorités, mais aussi par l’expérience des groupes d’entraide pour sortir (se rétablir) de l’addiction, tels que les Alcooliques Anonymes16.

Le premier message innovant, au regard des représentations traditionnelles, que véhicule donc la notion de rétablissement est donc qu’il est possible pour une large majorité des personnes vivant avec des troubles mentaux sévères, ou un handicap psychique, de se rétablir dans une vie active et sociale, de reprendre en main leur vie et leur destin, d’envisager un devenir favorable. Si l’on prend cette possibilité au sérieux, elle suscite un espoir, une attente forte chez les usagers, qu’il importe de ne pas décevoir. Le rétablissement, ainsi défini comme le réengagement dans une vie active et sociale, doit pas conséquent constituer désormais l’objectif prioritaire des pratiques de soins et d’accompagnement social, ce qui implique la réorientation de ces pratiques en fonction de cette visée.

Un second message, également en rupture avec l’approche traditionnelle, est que cette possibilité de s’engager dans une démarche de réappropriation de son existence et de reprise d’activité n’a pas pour condition la réduction complète des troubles, même si celle-ci reste évidemment souhaitable. C’est un point important quand on a affaire, comme c’est souvent le cas en psychiatrie, à des maladies chroniques évolutives, avec lesquelles « il faut bien vivre », mais, peut-on désormais ajouter, « avec lesquelles il est possible de vivre bien »… à condition de trouver les soutiens appropriés. Tel est le rôle des pratiques axées sur le rétablissement.

On peut d’emblée entrevoir de quelle façon ce changement de posture – ou de paradigme – a des implications pour l’accompagnement vers l’emploi, démarche désormais priorisée, notamment pour ses contributions nombreuses au processus de rétablissement, mais aussi démarche qui n’est plus conditionnée par la réduction préalable complète des troubles.

L’approche du rétablissement, en priorisant cette perspective de réengagement dans une vie active et sociale, renverse notre conception des rapports entre travail et rétablissement. C’est parce qu’il est possible de se rétablir, que cela devient désormais l’objectif prioritaire, que l’intégration professionnelle apparaît souhaitable comme un des moyens de s’inscrire et de progresser dans cette voie de rétablissement.

La visée du rétablissement n’est donc pas seulement une approche complémentaire de l’approche médicale, dont la fonction serait de prendre en compte des dimensions (existentielles, sociales) jusque-là tendanciellement négligées. Prendre cette possibilité de rétablissement au sérieux, la percevoir comme un but accessible implique d’en faire le but prioritaire, ce qui implique un changement des pratiques de soutien. Ce changement doit naturellement concerner également les pratiques d’accompagnement vers et dans l’emploi.

3. Les pratiques axées sur le rétablissement : incidence sur la posture de l’accompagnant vers et dans l’emploi

Promouvoir la perspective du rétablissement ne se borne évidemment pas à diffuser l’annonce prometteuse de cette possibilité ; il s’agit de favoriser, mais aussi de soutenir, de façon appropriée, ce processus long et non linéaire. Ce soutien doit en premier lieu respecter la visée même du rétablissement : promouvoir l’autonomie, l’autodétermination. Il est par conséquent prioritairement guidé par l’exigence éthique de respecter, et d’encourager, l’autodétermination (et plus largement l’empowerment) des personnes accompagnées, mais il doit également s’appuyer sur la compréhension du processus de rétablissement dont les principaux ressorts doivent être soutenus. Il s’agit en particulier de soutenir la personne dans les tâches qu’elle doit accomplir pour progresser dans sa démarche de rétablissement. Parmi ces tâches, décrites de multiples façons par ceux qui rendent compte de leurs parcours de rétablissement, les spécialistes du domaine en retiennent quatre principales17 : 1) la reconstruction d’une identité positive ; 2) la (re)contextualisation de l’expérience de la maladie mentale pour parvenir à lui donner un sens ; 3) l’acquisition d’une aptitude à « gérer » soi-même ses troubles psychiques ; et 4) l’engagement dans des rôles sociaux valorisés selon le désir de la personne. Il est facile de voir que l’engagement dans une activité de travail contribue directement à plusieurs de ces tâches, et à ce titre, au processus de rétablissement. Il contribue en particulier à la reconstruction d’une identité positive (1), à l’engagement dans des rôles sociaux valorisés (4), et même souvent à l’aptitude à gérer soi-même ses troubles psychiques (3).

Prioriser le rétablissement implique donc une nouvelle hiérarchisation des objectifs, qui elle-même implique une nouvelle conception des pratiques et services, qu’il importe, selon Marianne Farkas, d’envisager à deux niveaux : d’une part celui de la conception même et de l’organisation des services, qui doivent être redéfinis en fonction des objectifs premiers et des valeurs du rétablissement ; d’autre part, au niveau individuel, où doivent être repensés les compétences, les contenus de formation et même les critères de recrutement des professionnels de l’accompagnement18-19. Les valeurs du rétablissement sont en particulier : 1) « l’orientation sur la personne » : sur la singularité de ses attentes, de ses buts, mais aussi de ses ressources, de ses forces et de ses limites ; 2) « l’implication de la personne » : celle-ci doit être constamment invitée à adopter une posture active, s’engager, et jouer un rôle moteur dans tous les aspects de son rétablissement, y compris l’appréciation des soutiens à lui apporter ; 3) « les choix, l’autodétermination », conçus comme un droit à respecter – notamment dans la définition de ses projets et de ses buts, et le choix des moments pour faire appel aux soutiens ; 4) « le potentiel de croissance, la focalisation sur les forces et les ressources » de la personne, et le souci de maintenir et renforcer l’espoir d’un devenir satisfaisant.

Une pratique d’aide à l’insertion professionnelle intégrée dans cette visée du rétablissement suppose donc de chaque professionnel de l’accompagnement une adhésion à ces valeurs, destinées à orienter sa pratique. Plusieurs auteurs soutiennent que c’est d’abord dans la posture même des professionnels de l’accompagnement, dans leur façon d’interagir et de se positionner avec les usagers, que se joue le soutien au processus de rétablissement, et plus précisément la qualité de ce soutien20-22.

Cette spécification des pratiques axées sur le rétablissement, ici simplement esquissée, peut certainement contribuer à faire évoluer les pratiques de soutien à la réinsertion professionnelle de ce public, a fortiori quand elles sont conçues avec l’objectif de promouvoir le rétablissement.

Il est en premier lieu frappant de constater la forte convergence entre les principes qui structurent les programmes de soutien à l’emploi (qu’on qualifie en France d’emploi accompagné)23, valorisés pour leur efficacité, et les principes des pratiques axées sur le rétablissement. Sans reprendre ici en détail tous les principes qui orientent les programmes de soutien à l’emploi conçus selon le modèle de référence IPS24, on peut simplement souligner de quelle façon certains font clairement écho aux valeurs du rétablissement :

  • L’accès au dispositif d’emploi accompagné n’est pas conditionné par la rémission complète des troubles, en vertu du principe « exclusion zéro » du modèle IPS ;

  • L’objectif d’insertion en milieu ordinaire de travail répond à l’exigence de prioriser l’inclusion sociale ;

  • L’attention portée aux attentes et préférences de la personne en matière d’activité professionnelle traduit l’exigence de promouvoir l’autodétermination et le respect du projet de la personne ;

  • L’accompagnement, dans ce type de dispositif, est personnalisé, adapté à la singularité de la personne, de son projet et de ses besoins, « sur mesure » au sens où c’est à l’accompagnant de s’adapter aux besoins et attentes de la personne, alors que les approches traditionnelles attendent plutôt que la personne s’adapte au cadre proposé ;

  • L’accompagnement continu, sans limitation dans la durée, traduit l’engagement du professionnel dans la relation d’aide et atteste à nouveau d’une pratique adaptée au besoin de sécuriser le parcours professionnel de la personne vulnérable.

Les travaux sur les pratiques axées sur le rétablissement apparaissent donc confirmer et renforcer les orientations, issues de la recherche, concernant la conception et l’organisation des services de soutien à la réinsertion, pour en optimiser l’efficacité. Ils proposent également des repères précieux pour promouvoir une évolution des postures individuelles d’accompagnement qui, à un autre niveau, conditionnent aussi fortement l’efficacité de ces pratiques.

4. Pluralité des contributions du travail au processus de rétablissement

Exercer une activité professionnelle compte parmi les critères objectifs du rétablissement25, 26, mais en constitue surtout un des moyens privilégiés pour un ensemble de raisons que nous allons évoquer en nous fondant sur une synthèse de la littérature pertinente dans le domaine27-32, et en particulier sur une métasynthèse internationale récente33. Une série d’études qualitatives, fondées sur des entretiens avec des personnes en situation de handicap psychique et ayant un emploi, se sont attachées à identifier les bénéfices liés au travail. On peut tout d’abord faire remarquer que dans les représentations sociales les plus courantes, le fait de « reprendre le travail », ou de « retrouver un emploi » après une maladie grave est tout simplement le signe de la restauration d’un état de santé suffisant, donc d’un rétablissement au sens de la reprise de ses activités et responsabilités, après l’interruption imposée par la maladie. Cela est sans doute encore plus vrai dans le cas de maladies désocialisantes telles que les troubles mentaux. Dans ces situations, l’accès ou le retour à l’emploi est souvent vécu comme un marqueur de normalisation sociale, et même plus largement de « normalité » au sens d’un « retour à la normale » après la maladie, et de restauration du sentiment d’appartenance au groupe social, lié notamment au fait de « faire comme tout le monde ».

Il se dégage de ces études une pluralité de bénéfices du travail susceptibles de contribuer au rétablissement27. La difficulté est de classer et de hiérarchiser ces facteurs, du fait de leur forte interdépendance, et qu’ils sont envisagés, et parfois nommés, différemment selon les études. Une façon de les ordonner est de recourir à la distinction entre les facteurs internes, directement liés au vécu du sujet, et les facteurs externes, sociaux ou environnementaux. Parmi les facteurs internes du rétablissement, les dimensions clés sont l’identité (intégrant l’identité sociale conférée par le travail, aidant à se dégager de l’identité de malade), l’estime de soi, le sentiment d’appartenance, le sentiment de bien-être et un but restauré à ses journées, à son activité, voire à sa vie28-30. Quant aux facteurs externes, ils concernent l’intégration sociale, le sentiment de citoyenneté et de contribution à la société31, le développement d’un réseau relationnel, et la réduction des préjugés stigmatisants32.

Nous nous appuierons pour présenter ces facteurs, sur la caractérisation hiérarchisée qui en est proposée par Walsch et Tickle33, sur la base d’une métasynthèse qualitative, portant sur six recherches qualitatives identifiées comme les plus pertinentes sur ce thème. En se fondant sur une méthodologie métaethnographique, quatre métathèmes sont identifiés pour l’ensemble des six études qualitatives : le sentiment d’efficacité personnelle, l’identité, le sentiment d’appartenance et les facteurs inhérents au travail. La spécification de ces métathèmes conduit à distinguer pour chacun d’eux deux principaux sous-thèmes, au sein desquels on retrouve l’essentiel des facteurs mentionnés par les autres études (y compris celles qui ne sont pas prises en compte dans cette métasynthèse qualitative, et que nous mentionnons plus haut), mais ici ordonnés de façon cohérente. Nous présentons ces métathèmes, en insérant en leur sein les facteurs et commentaires développés dans d’autres études.

  1. « Le thème du sentiment d’efficacité personnelle » s’avère lié à l’estime de soi ainsi qu’au sentiment d’accomplissement de soi. Il est associé à deux types de circonstances (correspondant à deux sous-thèmes).

    1. « Le fait de relever les défis du monde du travail », qui contribue à la restauration de la confiance en soi, de l’estime de soi, et d’un sentiment de compétence.

    2. « L’expérience d’un développement personnel » favorisé par le travail, en particulier par les compétences sociales mobilisées, les nouveaux intérêts suscités par le travail, et l’accroissement des capacités d’autogestion ou de contrôle de ses troubles. Il est couramment observable que des personnes vivant avec des symptômes psychiatriques persistants rapportent que leur activité de travail, par la focalisation attentionnelle ou la concentration sur la tâche en cours, les aide à contrôler et à mettre à distance les symptômes perturbants tels que les voix.

Tout cela contribue au sentiment de retrouver un contrôle sur sa vie, de parvenir à un accomplissement de soi, grâce à la restauration du pouvoir d’agir (empowerment), qui est l’indice même d’une expérience de rétablissement34.

  1. « Le thème de l’identité » renvoie à la construction d’une identité positive grâce au travail, ce qui est également lié à l’estime de soi et au sentiment d’efficacité. Il est associé à deux sous-thèmes :

    1. « le sentiment d’un “retour à la normale” », en satisfaisant par le travail les attentes sociales, en réduisant sa situation de dépendance à l’égard d’autrui et en restaurant un sentiment de sa propre valeur et de sa fiabilité.

    2. « le passage d’une identité de malade à celle de professionnel compétent », permettant de se dégager des préjugés stigmatisants associés à la maladie. La reconnaissance obtenue en tant que travailleur est un facteur de cette redéfinition identitaire.

  2. « Le thème du sentiment d’appartenance » s’avère lié au thème de l’identité, mais envisagé cette fois sous l’angle social plutôt que personnel.

    1. Le premier sous-thème est labellisé « faire partie d’un monde plus large », c’est-à-dire d’un monde qui n’est plus seulement celui des soins, notamment grâce au sentiment d’intégration dans le monde du travail, et au-delà dans la société ; grâce également au sentiment d’utilité sociale de son activité, d’apporter sa contribution à la société, d’où un sentiment d’appartenance ainsi « légitimé ».

    2. Le second sous-thème concerne « le développement de relations », à partir du lieu travail, mais aussi au-delà, en rappelant que ces relations peuvent fournir un étayage, tant pour le travail que pour la vie quotidienne. L’isolement est un risque qui menace ces personnes, et que le travail permet d’éviter.

  3. Enfin, « le thème des facteurs liés au travail » (appelés aussi facteurs instrumentaux) affecte la qualité de vie et la perception de la valeur de l’intégration en emploi.

    1. Le premier sous-thème concerne « la structuration de la vie de personne » : comme le fait remarquer Waghorn7 « avoir une raison de se lever le matin et quelque chose à faire de sensé durant la journée est essentiel au sentiment de bien-être ». L’emploi fournit une occupation quotidienne, précieuse pour des personnes vulnérables, et une structuration temporelle des journées, qui est de plus conforme aux rythmes sociaux dominants35.

    2. le second sous-thème a trait aux « opportunités financières offertes par l’emploi », susceptibles d’accroître l’autonomie et les choix, notamment en matière de loisirs.

    3. Enfin, un dernier sous-thème porte sur « la nature même de l’emploi », et conduit à souligner l’importance d’éviter une sous-qualification des emplois proposés au regard des compétences de la personne.

Les personnes ayant un handicap psychique sont tout à fait sensibles à ces bénéfices apportés par l’emploi. Ils sous-tendent en partie leur motivation intrinsèque, parfois plus que les revenus attendus de leur activité professionnelle. Ce point est d’autant plus important lorsque l’emploi est peu qualifié et que l’écart est faible entre les revenus garantis par la pension et les aides sociales et ceux, généralement non cumulables, assurés par le travail, comme c’est souvent le cas dans l’insertion professionnelle de ce public.

5. Conclusion : actualité de la thématique

Alors que se manifeste enfin en France une volonté de développer des pratiques efficaces d’insertion professionnelle, sur le modèle Place and train, qualifié en France « d’emploi accompagné », modèle qui vient d’être reconnu et recommandé par les pouvoirs publics dans l’article 52 de la loi 2016-1088 du 8 août 2016 dite « Loi travail »36, et que diverses structures s’efforcent de mettre en oeuvre ; autrement dit alors qu’est enfin soutenue une réforme des services et dispositifs de soutien à l’insertion professionnelle, pour promouvoir efficacement l’inclusion sociale, cette spécification des pratiques axées sur le rétablissement nous rappelle qu’il importe d’ajouter à la réforme des services et dispositifs, que spécifie le modèle de l’emploi accompagné de type IPS, une réforme de la posture des professionnels de l’accompagnement. L’étude des pratiques axées sur le rétablissement aide à caractériser le mode d’accompagnement approprié pour soutenir à la fois le processus de rétablissement et l’insertion professionnelle.