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Le néonaticide [1] est le meurtre d’un enfant né depuis moins de 24 heures par sa mère ou son père ; ce terme a été employé pour la première fois par Resnick, en 1970. L’examen des écrits montre que les parents ayant tué leur nouveau-né sont majoritairement des femmes (Crittenden et Craig, 1990 ; Rodenburg, 1971 ; Marks et Kumar, 1993, 1996). En effet, on retrouve peu de cas de néonaticides paternels (Adelson, 1991 ; Resnick, 1969 ; Kaye, Borenstein et Donnelly, 1990).

Chez les femmes filicides [2], les passages à l’acte néonaticide varient entre 12 % et 17 % dans les échantillons cliniques (Cheung, 1986 ; d’Orban, 1979) et de 13 % à 46 % dans les échantillons épidémiologiques (Alder et Baker, 1997 ; Brozovsky et Falit, 1971 ; Dubé, 1998 ; Haapasalo et Petäjä, 1999 ; Mark et Kumar, 1993). Les variations peuvent s’expliquer par l’âge des victimes ; dans certains échantillons, des enfants de moins d’un an ont été retenus, contribuant ainsi à un pourcentage plus élevé de néonaticides. Aussi, certains auteurs affirment que plusieurs cas ne seraient pas détectés, leur nombre étant beaucoup plus élevé que celui retrouvé à partir des statistiques officielles (Crittenden et Graig, 1990 ; Wilzcynski, 1997).

En 1970, Resnick a comparé sur une base internationale, 35 femmes néonaticides à 88 femmes filicides sur une période de trois siècles (1751 à 1968). Les données montrent des différences entre les deux groupes. Les femmes néonaticides sont plus jeunes et moins souvent mariées que les femmes filicides. Aussi, peu d’entre elles présentent des éléments dépressifs significatifs ou souffrent de psychose au moment du passage à l’acte. Aucune des femmes néonaticides n’a fait de tentative de suicide suite au passage à l’acte comparativement au tiers des femmes filicides. Enfin, la motivation la plus souvent identifiée chez les femmes néonaticides est que l’enfant est non désiré (83 % des cas) (voir aussi Wilczynski, 1997). Trente ans plus tard, Haapasalo et Petäjä (1999) arrivent à des résultats similaires à l’aide de données recueillies en Finlande sur une période s’étalant de 1970 à 1990.

Depuis cette recherche, plusieurs auteurs ont dressé un portrait des femmes néonaticides à l’aide de vignettes cliniques. Ces femmes sont habituellement jeunes (moins de 18 ans), célibataires, issues de milieu défavorisé, elle n’emploient pas de contraceptif et n’ont pas suivi de cours prénataux. De plus, elles ont souvent caché ou dénié leur grossesse et accouché seules dans la résidence de leurs parents. Récemment, Spinelli (2001) a évalué chez 16 femmes néonaticides leur état mental au moment du passage à l’acte. La plupart ont dénié leur état physique, manifesté un état de dissociation et de dépersonnalisation au moment du passage à l’acte. Ces résultats suggèrent qu’il existe plusieurs caractéristiques communes à l’ensemble des femmes néonaticides. Certains vont jusqu’à parler d’un « syndrome néonaticide » (Schwartz et Isser, 2000) ou d’un « syndrome » relié à la jeune mère célibataire (Pearson, 1997).

Ces dernières décennies, plusieurs auteurs ont tenté de catégoriser les passages à l’acte des femmes filicides. Il existe depuis Resnick (1969) une tradition de classification selon divers critères. Les gestes néonaticides forment une catégorie précise dans plusieurs systèmes de classification (Alder et Baker, 1997 ; Bourget et Bradford, 1990 ; Cheung, 1986 ; d’Orban, 1979 ; Rohde et al., 1998 ; Sadoff, 1995 ; Somander et Rammer, 1991 ; Vanamo et al., 2001 ; Wilkey et al., 1982). Le critère le plus important pour définir cette catégorie est que l’enfant soit âgé de moins de 24 heures au moment du passage à l’acte. Quelques auteurs ajoutent des critères supplémentaires comme le fait de cacher la grossesse (Somander et Rammer, 1991 ; Wilkey et al., 1982) ou l’accouchement (Somander et Rammer, 1991). Le portrait dépeint par plusieurs et l’utilisation d’une catégorie « néonaticide » dans certains systèmes de classification sous-entendent un profil similaire de mères néonaticides.

Cependant, certaines données indiquent qu’il existe plusieurs profils de femmes néonaticides. Par exemple, Schwartz et Isser (2000) montrent que plusieurs femmes de leur échantillon sont âgées de plus de 21 ans. Ce résultat souligne que ce ne sont pas uniquement des adolescentes qui effectuent ce type de passage à l’acte. Leur motivation peut différer des femmes plus âgées, plus souvent mariées, ayant d’autres enfants et dont le conjoint n’était pas au courant de la grossesse. Aussi, Green et Manohar (1990) suggère qu’il existe deux sous-groupes de femmes néonaticides : celles qui sont immatures et paniquent avant le passage à l’acte et celles qui préméditent leur geste (Resnick, 1970).

Notre étude présente cinq vignettes cliniques de néonaticides maternels afin de déterminer si ces femmes constituent un groupe homogène et de mieux comprendre ce phénomène. Les observations portent sur les cas qui ont passé par un processus judiciaire, entre 1986 et 1994, dans la province de Québec.

Méthodologie

Les cinq cas de néonaticides qui sont présentés proviennent d’une recherche effectuée pour une thèse de doctorat (Dubé, 1998). Cette recherche porte sur une cohorte de 75 parents biologiques (39 mères et 36 pères) qui ont tué un enfant ou plus, âgé de moins de 18 ans, entre le 1er janvier 1986 et le 31 mars 1994 dans la province de Québec (68 % ont tué un seul enfant et 25 % deux enfants). La cohorte comporte 105 enfants tués par les parents filicides. L’ensemble des dossiers des parents a été répertorié à l’aide d’une liste dressée par le Bureau du Coroner en chef du Québec. A l’aide d’un instrument créé lors de cette recherche, de nombreuses informations ont été recueillies sur des caractéristiques situationnelles, individuelles et comportementales. Les informations ont été collectées dans les rapports d’enquête des coroners, lesquels contenaient des rapports d’enquête de police, des extraits de dossier psychiatrique et de dossier médical, des comptes-rendus d’enquêtes menées par la Commission de la Protection de la Jeunesse et un rapport d’évaluation et d’intervention de la Direction de la Protection de la Jeunesse.

La définition employée est la même que celle que l’on trouve dans les écrits antérieurs, l’élément central étant que les femmes ont tué leur enfant dans les 24 heures suivant l’accouchement. Il est important de noter que comparativement à d’autres définitions portant sur le filicide, la notion de préméditation au moment du passage à l’acte ne constitue pas un critère de sélection.

Présentation des cas

Cas 1

Une adolescente de 16 ans a tué son garçon nouveau-né avec une arme blanche à un moment où elle était seule à la résidence de ses parents. Elle mentionne qu’il n’a jamais pleuré, étant mort à la naissance. Toutefois, à l’interrogatoire de la police, elle dit l’avoir tué. Elle ajoute qu’elle s’est défait du corps en le déposant dans un sac à poubelle afin qu’il soit ramassé par les éboueurs et porté au dépotoir municipal. Le corps a été retrouvé par la suite dans un placard de la maison. Le médecin et la famille de l’adolescente savaient qu’elle était enceinte et n’avait jamais pris de contraceptif. Elle a comparu au Tribunal de la jeunesse et le juge a accepté qu’elle soit confiée à un centre d’accueil pour un examen psychiatrique et psychologique.

La jeune fille mentionne qu’elle a mis son enfant au monde dans la chambre à coucher de sa mère. Elle a coupé avec une paire de ciseaux le cordon ombilical et à la vue du sang sur le bébé, selon ses propos, elle était trop effrayée pour en vérifier la provenance et demander de l’aide. Elle était au courant, depuis le début de la grossesse, qu’elle était enceinte. Elle a pensé au bout du sixième mois faire adopter l’enfant et s’est informée auprès d’un médecin, lors d’un examen de grossesse, des procédures à suivre, mais n’a jamais donné suite. Elle a dit aux policiers que « c’était mieux pour le bébé, mais elle ne sait pas pourquoi elle a fait ça ». Le chef d’accusation et la sentence ainsi que la date précise de l’homicide n’étaient pas disponibles aux dossiers.

Cas 2

Une adolescente de 16 ans, inscrite en secondaire V et considérée comme une élève modèle par son entourage, a donné naissance à un garçon, né vivant et à terme. La jeune fille a réalisé qu’elle accouchait lorsqu’elle a vu la tête de l’enfant. Aucune marque de violence n’a pu être décelée. Il n’a pas été possible de déterminer la cause exacte du décès. Une asphyxie périnatale aurait pu causer le décès. Une plainte portée par un médecin qui a opéré l’adolescente pour des lacérations multiples au vagin a été déposée à la police. Le nourrisson fut retrouvé par le père de la jeune fille, dans un sac vert, dans le garage de la résidence familiale. Personne n’était au courant de la grossesse. Le père de l’adolescente souligne qu’elle ne fréquentait plus de garçon depuis son retour des États-Unis, où elle avait fait un voyage scolaire. Il semble qu’elle n’ait pas consulté de professionnel de la santé durant la période anténatale.

La jeune fille a indiqué qu’elle avait mal au ventre au point de demander à sa mère d’appeler l’ambulance. La mère s’est absentée de la maison et à son retour, la jeune fille, ayant accouché seule, lui a dit qu’elle était allée aux latrines et que ses menstruations étaient commencées. Le médecin fut consulté, examina la jeune fille et constata qu’elle était en hémorragie. Le chef d’accusation et la sentence ne sont pas aux dossiers.

Cas 3

La mère âgée de 19 ans a donné naissance à un garçon au bout de neuf mois de grossesse. Elle a accouché au domicile de ses parents et a tué son bébé en l’étranglant. Elle l’a enveloppé dans un sac de plastique et déposé au fond d’une poubelle. Personne n’était au courant de sa grossesse. Elle a été conduite à un hôpital pour y passer 30 jours durant lesquels elle a été évaluée en psychiatrie avant de subir son enquête préliminaire. Elle a été accusée de meurtre au second degré et d’infanticide. La sentence n’était pas disponible aux dossiers.

Cas 4

Une jeune femme de 24 ans, mère de quatre enfants, a accouché d’un garçon, né à terme. Elle a causé la mort de l’enfant en le plaçant dans un sac de poubelle et en l’abandonnant au bord de la route. Dans ce cas, il y a eu un délai de quatre mois entre le passage à l’acte et la découverte du délit par les policiers. Elle a été accusée d’infanticide. La sentence n’était pas aux dossiers.

Cas 5

Une femme de 26 ans a accouché d’un garçon à neuf mois de grossesse, seule dans la chambre de bain de la maison de son conjoint. Il s’agit d’une grossesse qu’elle lui avait cachée de même qu’aux autres personnes de son entourage. En revenant du travail, le conjoint la découvre ivre, couchée par terre dans la chambre de bain. Il aperçoit aussi le nouveau-né dans le bol de la toilette.

Cette femme était en couple depuis quatre ans, mère d’un garçon de sept ans né d’une union précédente. Le conjoint actuel souligne qu’il soupçonnait la grossesse de sa conjointe sans vraiment en être certain. Elle prenait des contraceptifs.

Madame rapporte avoir eu très mal au ventre et savoir qu’il s’agissait de contractions. Elle a consommé de l’alcool et mentionne ne pas se souvenir de ce qui s’est passé par la suite. Elle raconte aussi avoir eu trois grossesses et camouflé aussi la deuxième, rapportant avoir perdu le foetus dans les toilettes au sixième mois. Elle indique l’avoir placé dans un sac de plastique et enterré derrière la maison.

Selon les propos de madame, le conjoint lui avait déjà dit : « Si tu tombes enceinte, fais tes valises et pars ». Elle ajoute que sa mère avait dit la même chose quand elle était plus jeune. De plus, elle confie avoir toujours eu peur de tomber enceinte, précisant que c’était pour cette raison qu’elle avait caché la grossesse. Elle mentionne n’avoir consulté aucun médecin durant la grossesse. Selon les dossiers d’enquête préliminaire, la sentence a été suspendue.

Discussion

Au Québec, cinq femmes néonaticides ont été répertoriées dans une cohorte de parents ayant commis l’homicide de leur enfant entre 1986 et 1994. Ce chiffre représente 13 % des femmes ayant commis un filicide ou plus qui ont été résolus durant la même époque. Ces données diffèrent des résultats constatés dans la littérature (Alder et Baker, 1997 ; Brozovsky et Falit, 1971 ; Haapasalo et Petäjä, 1999 ; Marks et Kumar, 1993 ; 1996) où les pourcentages varient entre 31 et 46 %. Il faut cependant considérer que l’échantillon étudié par ces auteurs inclut des mères ayant tué des enfants souvent âgés de moins d’un an.

Ces femmes ont toutes accouché seules de garçons. Trois adolescentes (deux de 16 ans et une de 19 ans) ont accouché dans la résidence de leurs parents. En ce qui a trait à la femme de 26 ans, elle a accouché dans la maison du couple, tandis que l’information est inconnue pour la femme de 24 ans. Le corps du bébé a été découvert soit dans le garde-robe de la maison (cas 1), soit dans un sac déposé dans le garage de la résidence des parents (cas 2), soit un sac de plastique au fond d’une poubelle (cas 3) soit dans les toilettes (cas 5). Dans un seul cas (cas 5), la femme n’a pas tenté de cacher le corps. Enfin, dans une situation, la femme a laissé l’enfant dans un sac au bord de la route (cas 4).

Malgré le manque d’homogénéité dans l’information recueillie, entre autres quant aux chefs d’accusation et aux sentences, une lacune inhérente à des études réalisées à l’aide de fouilles de dossiers, le profil de ces jeunes femmes peut être dégagé et comparé à celui que la littérature présente sur le sujet. De plus, des points communs et des recoupements émergent qui mènent à formuler des hypothèses théoriques et cliniques. Quelques notions, développées plus en détails, ouvrent des pistes d’explication contribuant à l’avancement des connaissances et, par conséquent, à la prévention de ce type de filicide : le genre du nouveau-né (Dubé, 1998), l’immaturité et la grossesse non désirée (Atkins et al., 1999), le déni (Schwartz et Isser, 2000) et l’angoisse de séparation (David, 1999).

D’après les données recueillies, les cinq nouveau-nés tués par ces femmes sont des garçons. Ces résultats vont dans le même sens que chez Haapasalo et Petäjä (1999), qui ont trouvé uniquement des victimes masculines dans leur échantillon. Bonnet (1993), ayant étudié un échantillon de femmes néonaticides qui ont subi l’inceste, pose l’hypothèse d’un état de choc se transformant en un état de crise, le passage à l’homicide de l’enfant pouvant alors être assimilé au meurtre symbolique de l’homme qui a abusé d’elles. Il serait pertinent d’explorer plus avant cette avenue.

En général, une grossesse stimulerait la réactivation de la relation primitive à la mère. Les conflits se réveillent, ainsi que les angoisses sous-jacentes. Étant donné l’immaturité psychique des femmes néonaticides du présent échantillon, surtout les adolescentes, la grossesse semble avoir mobilisé des conflits et des angoisses qui ont pu conduire au passage à l’acte (Atkins et al., 1999).

Dans les cinq cas, le cadre culturel généralement admis dans lequel s’inscrit la maternité ne tient plus, c’est-à-dire un projet de couple, préparé et désiré depuis des mois. Un bébé stimule au départ chez la mère la projection d’une partie de soi dans un être humain séparé et investi, comme le souligne David (1999), « dans le compromis de la séparation ». Cela ne peut être fait chez les femmes néonaticides. Pour elles, la grossesse est vécue dans le secret, le non-dit. Dans un seul cas, le premier, la famille savait ; toutefois, il semble qu’on n’ait engagé aucun dialogue sur la grossesse. Cette jeune femme a accouché dans la chambre de sa mère et a ensuite dit que c’était mieux pour le bébé. Pour les autres, personne n’avait été mis au courant de l’existence d’un quelconque projet en devenir. L’existence même du bébé était court-circuitée au départ.

On peut aussi se demander comment il se fait que les jeunes femmes ont été prises par « surprise » en ressentant les douleurs des contractions, signe concret qu’une vie autonome se préparait à advenir. Le déni peut en partie expliquer le geste. Kernberg (1997) définit ce mécanisme de défense :

D’un côté, la personne se rend compte que ses perceptions, ses pensées et ses sentiments concernant elle-même et les autres sont à tels ou tels moments totalement opposés à ce qu’ils ont été autrefois, mais le souvenir n’a aucun rapport avec les affects éprouvés et ne peut en rien modifier ce qu’elle ressent maintenant. Le déni peut se manifester par une absence complète d’intérêts, d’angoisses ou de conflits immédiats, graves, urgents qui existent dans la vie de la personne ; de sorte que celle-ci parle calmement de la situation tout en déniant les implications affectives de cette situation. Il existe donc deux champs de conscience affectivement indépendant l’un de l’autre.

Kernberg, 1997

Plusieurs auteurs évoquent ce mécanisme de défense en tant que protection psychique (Atkins et al., 1999 ; Spinelli, 2001). Toutefois, il y a une certaine confusion entourant la définition du déni. Certains parlent davantage de négation [3] alors que d’autres emploient le terme de déni. Dans le présent échantillon, les contractions et les douleurs de l’accouchement ont été en quelque sorte un appel de la réalité. Le déni ne pouvant plus fonctionner au plan mental (comme mécanisme de défense), le passage à l’acte est devenu alors une solution psychique, une façon de continuer cette forme de protection, soit garder le bébé dans la non-existence.

L’angoisse de séparation semble aussi être réactivée, la séparation impossible, la séparation inachevée d’avec la mère. Dans le cas de la femme de 26 ans (cas 5) qui souligne avoir caché la grossesse à son conjoint par crainte d’être abandonnée par lui et qui ajoute avoir caché à sa mère une autre grossesse antérieure pour un motif semblable, le passage à l’acte ne semble pas s’expliquer par le déni, mais davantage par l’angoisse reliée à la séparation. Ainsi, différemment des autres, au moment de l’accouchement, elle consomme de l’alcool afin de calmer les douleurs qu’elle prévoyait normalement endurer et ne tente pas de cacher le bébé mort dont elle attendait la venue.

Souvent répertoriée dans la littérature, l’immaturité psychique s’avère un élément commun à l’ensemble des femmes. Cet aspect est aussi présent parmi les cas de cette étude. De plus, certains auteurs (Green et Manohar, 1990 ; Schwartz et Isser, 2000) mentionnent la présence de différents sous-groupes de femmes néonaticides. Dans la présente étude, la jeune célibataire, immature, fait le déni de sa grossesse, ce qui caractérise quatre cas de l’échantillon. Dans l’autre cas, l’angoisse de séparation, l’abus d’alcool et possiblement l’absence de déni sont caractéristiques de la femme de 26 ans.

Certaines limites sont inhérentes à ce type d’étude. Premièrement, il importe de le mentionner, l’information varie selon les dossiers, et la longueur des vignettes va de une à quelques pages. En conséquence le type d’informations recueillies diffère d’un cas à l’autre. Deuxièmement, les informations recueillies sont tributaires du cadre théorique du Coroner qui les collige. Troisièmement, la notion de profil fait ici référence à un ensemble de caractéristiques communes aux femmes néonaticides ; nous sommes conscients que cette notion est utilisée dans sa perspective la plus large. Enfin, il importe d’être prudent dans la généralisation des résultats puisque le nombre de cas est restreint.

Conclusion

L’étude de ces cinq cas de femmes néonaticides montre la pertinence d’envisager les similitudes entre ces femmes, comme par exemple, l’immaturité psychique ainsi que les différences entre elles. Deux profils ont été dégagés de l’information disponible aux dossiers : les adolescentes déniant, non seulement la grossesse, mais aussi tous les signes physiologiques qui l’accompagnent, et les femmes plus âgées dont l’acte s’inscrit dans un registre d’angoisse de séparation. Ces données laissent entendre qu’il pourrait exister plusieurs profils de femmes néonaticides. Il serait pertinent de recueillir de l’information sur un plus grand nombre de cas afin de vérifier l’existence d’autres sous-groupes. La connaissance de ces profils peut ainsi aider une clinique à ajuster son intervention en approchant cette problématique avec une lecture qui ne soit pas homogène.